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vouloir difpofer à recevoir une funefte nouvelle.

Thibault, pénétré de la plus vive affliction, dit à Raoul, en le ferrant dans fes bras, Ah ! mon cher Raoul! venez au fecours de mon malheureux Fils! aidez-moi à l'arracher à un défefpoir qui me fait tout craindre pour fes jours. La Comteffe de Dammartin eft morte. Au nom de la tendre amitié qui eft entre vous & mon Fils, ne l'abandonnez pas; mais que votre douleur adouciffe la fienne. Il n'eft pas encore tems de présenter la Raifon à fes yeux, elle augmenteroit fes maux. Plaignez- le; convenez avec lui de la perte irréparable qu'il vient de faire; entrez avec complaifance dans les juftes motifs qu'il a de s'affliger. Enfin, mon cher Raoul pour mieux effuïer fes larmes,

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pleurez avec lui; vous devez ce généreux fecours à la tendre amitie qu'il a pour vous.

Le Sire de Couci passa, le cœur ferré de douleur, dans l'appartement du Comte de Rethel : la présence de cet Ami irrita en core fon défefpoir. Ah! mon cher Raoul, s'écria-t'il, en venant à lui les bras ouverts, Alix eft morte! Puis-je le prononcer fans expirer C'en eft fait, il n'eft plus d'Alix pour moi ! Alix eft morte! Les pleurs & les fanglots empêcherent Roger d'en dire davantage. Vainement vouloit-il ou parler, ou répondre à Raoul, qui mêloit fes larmes avec celles de fon Ami : la liberté de proferer deux mots de fuite lui étoit ravie par l'excès de fa douleur. Raoul refta plufieurs jours fans le quitter : fa fenfibilité au malheur de fon Ami, l'affliction où

étoit Thibault de voir fon Fils abandonné à fon défespoir, attendrirent enfin Roger ; il parut fe prêter à quelque confolation, Raoul jugeant que ce malheureux Ami ne trouvoit d'adouciffement à fa trifte fituation, qu'en parlant d'Alix, l'engagea infenfiblement à lui conter les fatales circonftances qu'il ignoroit. Roger y confentit avec une forte de plaifir que les feuls malheureux connoiffent & trou vent dans le récit de leurs maux. Plaifir étrange, mais confolant! Voici ce qu'il apprit à Raoul. Lorfque j'arrivai à Nantes, dit Roger il n'y avoit pas encore fix mois que la Comteffe de Dammartin étoit Veuve. Une fcrupuleufe délicateffe lui faifoit trouver ce terme trop court, pour passer à de fecondes nôces. Elle vouloit attendre que l'année fût

expirée. J'étois depuis un mois tous les jours à fes genoux, pour la conjurer de hâter mon bonheur; mais je l'en conjurois en vain; & fi mes inftances réiterées trouvoient une tendreffe qui m'enchantoit, elles trouvoient auffi une fermeté dont j'étois défefpéré. Cette fermeté me fit prendre le parti d'engager le Duc de Bretagne & la Ducheffe Conftance, à parler à la Comteffe. Ils fe fervirent tous deux du pouvoir qu'ils avoient fur fon efprit; ils la prefferent, & enfin ils obtinrent qu'elle me donneroit la main dans deux mois. Les trois que je gagnois par cette parole, ne m'empêcherent pas de murmurer contre les deux qu'il me falloit encore attendre. J'inftruifis mon pere que la Comteffe avoit cédé fixé mon bonheur à ce terme.

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Cette nouvelle dont il fut charmé, le détermina à partir de Rethel. Vous le vîtes à Paris où il refta quinze jours; il prit enfuite avec un plaifir inexprimable, la route de Bretagne. Lorfqu'il fut à Rennes, il nous dépêcha un Courier pour nous apprendre qu'un peu de fatigue, & l'envie de voir le Comte de Marcé, avec qui il avoit été autrefois très-uni, lui faifoit prendre la résolution d'aller paffer une quinzaine de jours au Château de Marcé. Helas la furveille qu'il devoit en partir pour prendre doucement le chemin de Nantes, il fut obligé d'y voler en toute diligence.

Depuis que la Comteffe de Dammartin étoit en Bretagne, elle s'étoit liée de la plus tendre amitié avec Madame de Rhedon, femme encore aimable,

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