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AN. 1536.

17.n. 17. & feq.

Lutheriens croïoient prefque qu'il penfoit comme eux, il repete cent fois que la verité nous doit être donnée avec les fignes; que fous ces fignes, nous Inftitut. lib. 4. c. recevons vraiment le corps & le fang de JefusChrift; que la chair de Jesus-Christ est distribuée dans ce facrement; que nous fommes participans non feulement de l'efprit de Jesus-Christ, mais de fa chair; qu'il ne faut point douter que nous ne recevions fon propre corps; & que fi il y a quelqu'un dans le monde qui reconnoiffe fincerement cette verité, c'est lui. Il ajoûte dans un autre ouvrage, que nous fommes unis à Jefus-Chrift non par imagination, ni par la penfée, ou la feule perception de l'efprit, mais réellement & en effet par une vraie & fubftantielle unité. Il ne laiffe pas de dire que nous y fommes unis feulement par la foi ; ce qui ne s'accorde gueres avec fes autres expreffions.

Secondement, il enfeigne que ce corps une fois offert pour nous, nous eft donné dans la céne, pour nous certifier que nous avons part à son immolation,& à la reconciliation qu'elle nous apporte. Ce qui, à parler naturellement, voudroit dire qu'il faut diftinguer ce qu'il y a du côté de Dieu, d'avec ce qu'il y a de notre côté, & que ce n'eft pas notre foi qui nous rend Jesus-Chrift prefent dans l'euchariftie, mais que Jefus-Chrift prefent d'ailleurs comme un facré gage de l'amour divin, fert de foutien à notre foi. D'ou il paroît certain que le don du corps & du fang, eft indépendant de la for dans le facrement. C'eft à quoi tendent beaucoup d'expreffions de Calvin comme quand il dit que le

Inftitut. lib. 4. c. 17.8.16. 17.

corps de Jesus-Chrift eft fous le pain, le Saint-ElAN. 1536. prit eft fous la colombe, ce qui marque neceffairement une prefence fubftantielle, perfonne ne doutant que le Saint-Esprit ne fut fubftantiellement prefent fous la forme de la colombe, comme Dieu l'étoit toujours d'une façon particuliere, lorfqu'il apparoiffoit fous quelque figure. Et ailleurs parlant des Lutheriens qui fans détruire le pain, enferment le corps dedans. Si, dit-il, ce qu'ils prétendent étoit feulement que pendant qu'on prefente le pain dans le myftere, on presente en même temps le corps, à à caufe que la verité eft inféparable de fon figne, je ne m'y opposerai pas beau

coup.

Troifiémement Calvin dit, qu'il ne difpute point de la chofe, c'est-à-dire, de la presence & de la manducation fubftantielle, mais feulement Calvin inftitut. de la maniere de l'une & de l'autre. Delà vient ibid in opufc. pag. 877. qu'il admet une prefence tout-à-fait miraculeuse & divine, que les paroles lui manquent pour exprimer fes penfées, & que fes penfees, quoique beaucoup au-deffous de fes expreffions, n'égalent pas la hauteur de ce myftere ineffable. Ainfi nous conduifant par fes expreffions à une union tout-à-fait miraculeufe, où il ne dit rien, ou il exclut l'union par la feule foi. On voit qu'il met dans l'euchariftie une participation, qui ne fe trouve ni au baptême, ni dans la prédication, Catech. dim. 52. puifqu'il dit dans le catechifime, qu'encore que Jefus-Chrift nous y foit vraiment communiqué, toutefois ce n'eft qu'en partie, & non pleine, ment: ce qui montre qu'il nous eft donné dans la

céng

céne autrement que par la foi, puisque la foi se trouvant auffi vive & auffi parfaite dans le baptême AN. 1536. & dans la prédication, il nous y feroit donné auffi pleinement que dans l'euchariftic. Ge qu'il ajoûte pour expliquer cette plenitude, eft encore plus fort: car c'eft là qu'il dit que Jesus-Christ nous donne fon corps & fon fang, pour nous certifier que nous en recevons le fruit. Mais ce qu'il ajoûte, en parlant des indignes, fait voir une presence miraculeuse indépendante de la foi. Jefus-Christ, ditil, cft veritablement offert & donné à tous ceux qui font affis à la fainte table, encore qu'il ne foit reçu avec fruit que des feuls fidéles, qui eft la même façon de parler dont fe fervent les Catholiques. Ainfi pour entendre la vérité de ce mystere, il faut croire que fon propre corps y est véritablement offert & donné, même aux indignes, & qu'il en est même reçu, quoique ce foit fans fruit; ce qui ne peut être vrai, fi ce qu'on nous donne dans ce facrement, n'eft pas le propre corps du fils de Dieu indépendamment de la foi.

lib. 4. c. 17. n. 33•

La comparaifon dont Calvin fe fert au même calvin. in infits endroit, établit encore mieux la réalité. Car après avoir dit du corps & du fang ce qu'on vient d'entendre, qu'ils ne font pas moins donnez aux indignes, qu'aux dignes, il ajoûte qu'il en eft comme de la pluïe, qui tombant fur un rocher, s'écoule fans le penetrer; ainfi, dit-il, les impies repouffent la grace de Dieu, & l'empêchent de penetrer au dedans d'eux-mêmes. D'où il s'enfuit, que felon cette comparaison, Jesus-Chrift ne doit pas

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Joan. 1. 111.

moins être substantiellement préfent aux endurcis, AN. 1536. qu'aux fidéles qui reçoivent ce facrement, quoiqu'il ne fructifie que dans les derniers. Il eft vrai qu'il dit dans le même endroit, que quoique la chair de Jefus-Chrift foit également donnée aux indignes & aux élus, elle n'eft pourtant reçûë que des élus feuls. Mais il abufe de ces mots. Car s'il veut dire que Jefus Chrift n'eft pas reçu par les indignes dans le même fens que faint Jean dit dans fon évangile, qu'il eft venu chez foi, & les fiens ne l'ont point reçu, c'eft-à-dire, ils n'y ont pas cru; il a raifon. Mais comme ceux qui n'ont pas reçu Jefus-Chrift de cette forte, n'ont pas empêché par leur infidelité, qu'il ne foit venu à eux auffi véritablement qu'aux autres; ainfi pour parler confequemment, il faut dire que cette parole, ceci est mon corps, ne le rend pas moins prefent aux indignes qui font coupables de fon corps & de fon fang, qu'aux fidéles qui s'en approchent avec foi, & qu'à regarder fimplement la prefence réelle, il est également reçû des uns & des autres. Ce qui eft fi vrai Dilucid.expofit. que Calvin explique ces paroles de faint Jean, la

opufc. 859.

chair ne fert de rien, comme les Catholiques, en difant, que la chair ne fert de rien toute feule, mais qu'elle fert avec l'efprit. De forte que fi l'on ne reçoît pas toujours l'efprit de Jefus-Christ avec fa chair, ce n'eft pas qu'il n'y foit toujours, car JesusChrist vient à nous plein d'efprit & de grace, mais Inftit. lib. 4. cap. c'eft que pour recevoir l'efprit qu'il apporte, il faut lui ouvrir le notre par une foi vive. Ce n'est donc pas un corps fans ame, & un cadavre que les impies.

37.7.33.

reçoivent, comme parle Calvin, puifque Jesus- AN. 1536.

Christ eft toûjours plein de vie.

Les expreffions dont s'eft fervi Calvin lui ont paru fi fortes pour établir la prefence réelle, qu'il a tâché de les affoiblir, en voulant que la propre fubstance du corps & du fang de Jesus-Christ ne nous foit unie que par la foi, & n'aïant dessein de reconnoître dans l'euchariftie qu'une presence de vertu, refufant de dire qu'il foit réellement & fubftantiellement prefent; comme fi la participation n'étoit pas de même nature que de même nature que la prefence, & qu'on pût jamais recevoir la propre substance d'une chofe, quand elle n'eft prefente que par sa vertu. fa Il élude avec le même artifice le grand miracle qu'il se sent obligé de reconnoître dans l'eucharistie, & ce miracle, felon lui, eft comment Jesus-Christ nous fait participans de la propre fubftance de fon corps, vû que fon corps cft au ciel, & nous fur la terre. A cela que répondent Calvin & les Calviniftes ? C'est que la vertu incomprehensible du SaintEfprit conjoint bien les choses separées par distance de lieu. Mais de cette réponse on peut conclure, que les Calvinistes ont mieux fenti qu'il falloit admettre un miracle dans l'euchariftie, qu'ils ne l'ont admis en effet ; car la prefence par la foi, & la prefence de vertu n'eft pas un miracle, & les Suiffes gens de bonne foi qui s'énoncent en termes fimples, & qui reconnoiffent cette presence, n'admettent en cela aucun miracle.

Mais où l'on connoît mieux l'embarras de Calvin, c'est quand il s'agit d'expliquer ces paroles,

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