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CORISQUE.

L'effronté ce fut lui qui malgré moi la prit : J'en attefte Cloris, Célimene & Florise, Pour ravoir cet illet, d'abord je l'attaquai Par les difcours polis que l'ufage autorife; Sur fon honneur je le piquai:

Mais m'ayant mife à bout, alors je le brufquai, Comme on fait à l'égard d'un Berger qu'on me. prife.

J'éclatai, j'employai d'inutiles efforts,
Dont le fcélerat ofoit rire.

Que mes bras contre lui n'étoient-ils affez forts!
Dans les fougueux accès que la fureur inspire,
Je lui dis, l'arrêtant, tout ce que pus.dire.
Il m'tchappa le traître, & quand il fut enfui,
Vainement, & très-loin, je courus après lui..
Cette fleur, dont les foins occupaient ma pensée,
Avoit exprès pour toi la faifon devancée ;
Je l'allois vifiter le matin & le foir,

Et lui difois tout bas en tenant l'arrofoir, Croiflez, aimable œillet, & couronnant ma peine,

Pour le feul Ménalis réservez votre haleine. Croiffe, & que de mon Berger,

Dont le cœur m'a promis de ne jamais.change, Puiffe ainfi croître la tendre ffe!

Dès qu'ils feront épanouis,

Vos appas en un jour feront évanouis,

Mais fon feu durera fans cele.

MENALIS.

Faccufois donc à tort votre fidelité ?
Mirtil par fa malignité,.

Me rendoit moi-même infidéle.

Que d'un vif repentir, je me fens tourmenté ! Vous en croirai-je ?ô Dieux ! quoi mon cœur fe rappelle,

Defes premiers foupçons, l'allarme criminelle 2 Aux Amans, par un fort contraire à leurs de firs,, Dans le fein même des plaisirs,

L'inquiétude eft. naturelle.

Permettez qu'à vos pieds., mes fanglots, mes Loupirs.....

CORISQUE.

Leve-toi, Ménalis, que les vents & la grêle Puiflent ravager de nos champs

L'efpérance, hélas !"rare & fiêle,

Si m'on cœur ne s'épanche en de vrais fenti

mens.

Mais moi, dois-je, à tes affurances,
Livrer de fes foupçons mon efprit revenu ?
M'offrirois-tu les apparences,

D'un amour autre part, peut-être retenu ?:
MENALI S

Ciel ! que Pan courroucé, laifle ma bergerie:
En proye, aux loups impétueux !

Puiffai-je fous mes pas,foulant l'herbe fleurie,
Ne rencontrer qu'afpics, qu'animaux veni--

meux. ....

CORISQUE.

Arrête, Berger, je te prie,

C'en est trop ; la bonté des Dieux
S'offenferoit de la furie

De tes fermens audacieux.

Je te crois, je vais même en coucher fur ta levre Le gage appétiffant d'un baifer gracieux.

MENAL IS.

Le miel du Mont Himette eft moins délicieux. Suis-je ici Me trompai-je ? Ah! votre amour me fevre r

Trop tôt d'un bien fi précieux;

Le baifer apprêté, dont la brillante Flore
Enyvre fon Zéphir, de fes charmes épris,
Celui dont la naiflante Aurore

Régale l'époux de Procris,

Les baifers de Diane, & tous ceux de Cypris,
Au vôtre comparés, font languiffans encore ;
Mais fouffrez qu'au lieu d'un, je vous en rende
deux.

Le Dieu, qui pour Pfyché, jadis fentit éclore
De tendres fentimens, des de firs amoureux,
Se plaît en nombre impair, à feconder nos jeux,
CORISQUE.
Ah! dans mon cœur brûlant, j'ai Paphos &
Cythere:

Berger, mon cher Berger, je ne fuis plus à moi, Mais que dis-je ! à quoi fert déformais le myftére?

Tu me montres affez que je fuis toute à toi.
Ainfi fe réconcilierent..

Corifque & Ménalis imprudemment fâchés,
Et les chaînes qui les lierent,
Retinrent à jamais leurs deux cœurs attachés ;
Les tendresRoffignols dans les rameaux cachés
Jaloux des douceurs qu'ils goûterent,
Les virent & les imiterent;

Et leurs petits goziers, fans être interrompus,
La nuit fuivante répéterent

Et leurs propres plaifirs, & ceux qu'ils avoient

vûs.

FONTENELLE, la gloire & l'honneur de notre âge, Toi qui par des talens divers,

As fait voir de nos jours que la Profe & les Vers» Sur les fiécles paẞés, remportent l'avantage ; Sufpens tes illuftres emplois,

Pour entendre un moment mon rustique hautbois. Je lis & je relis tes Eglogues fans ceffe,

Et les admire à chaque fois.

Les Bergers qu'a produits ta Mufe enchantereße »
Sont moins färdés, moins pointilleux,

Que ceux dont en fes Vers doux, faciles,heureux,
Racan fit parler la tendreße,
Quoique ceux de Ségrais foient galans, ingénus „
Ils font trop copiés, de Rome, & de Grèce,
Leur ftyle un peu rude me bleße,

Et leurs difcours par tout ne font pas foutenus a
Des tiens je prife beaucoup plus

L'originale politeffe.

N'ont-ils pas réuni tous les fuffrages.dis

A leur douce délicatesse ?

Les miens dépourvûs d'agrément,
N'entreront point en parallele :

Heureux! s'ils peuvent feulement Attirer les regards du fçavant FONTENELLE

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