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rite pas de me fuivre (1). Enfuite, il congédia le Peuple, & s'étant embarqué, il s'endormit peu de tems après à la pouppe; mais une tempête furieufe, qui furvint, obligea les Difciples à l'éveiller, comme les vagues entroient déjà de tous côtés dans la barque en lui criant, qu'il ne fongeoit pas qu'ils alloient périr (2). O Ames timides & de peu de foi leur dit-il d'abord. Après, il commanda à la Mer de fe calmer; & le vent ayant ceffé auffitôt (3), ils pafférent de la peur à l'admiration. Quel homme, difoientils entre eux, à qui la Mer & les Vents obéiffent (4) !

Comme il prenoit terre au Pays des Gadaréniens vis-à-vis de Galilée, deux démoniaques, fi méchans que perfonne n'ofoit plus paffer par cet endroit (5), fortirent de quelques Sépulcres qu'ils habitoient, & vinrent au-devant de lui. L'un, fur-tout, qui étoit tourmenté d'un Efprit immonde, & alloit tout nud depuis plufieurs années, étoit £

CITATIONS.

(1) Nemo mittens manum fuam ad aratrum, & refpiciens retro, aptus eft regno Dei. Luc. IX. 6z.

(2) Non ad te pertinet quia perimus. Marc. IV. 38. (3) Imperavit Ventis & Mari. Matth. VIII. 26. (4) Quis putas hic eft? Ventus & Mare obediunt ei Luc. VIII. 25.

(5) Savi nimis, ita ut nemo poßet tranfire per viam'ilfam, Matth. VIII. 28,

Tome I.

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furieux, qu'il brifoit quelque chaine que ce fût (1); de forte qu'on étoit contraint de le laiffer errer ainfi à fon gré dans les montagnes voisines, & autour de ces tombeaux, heurlant jour & nuit, & fe frapant lui-même avec de groffes Pierres (2). D'auffi loin qu'il vit Jéfus, il courut fe jetter à fes pieds l'adora, & fe mit à crier de toute fa force Que nous veux-tu, Fils du très - haut ? Viens-tu déjà nous tourmenter (3)? Jéfus lui demanda fon nom. L'Efprit répondit qu'ils étoient plufieurs dans ce même corps, & qu'ils s'appelloient Légion. Il leur commanda d'en fortir: mais ils le priérent avec grande inftance de ne les pas renvoyer dans F'Abyme, & qu'ils puffent refter dans ce Pays (4), ne fut-ce que dans des Pourceaux (5) qui paiffoient au pied de la montagne prochaine, & Jéfus l'ayant permis ainsi (6), tout d'un coup, environ deux mille de ces Animaux coururent impétueusement fe pré

CITATIONS.

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(1) Sapè dirupißet catenas & compedes comminuiffet.

Marc. V. 4.

(2) Concidens fe lapidibus. ibid. 5.

(3) Venifti ante tempus torquere nos? Matth. VIII. 29. (4) Deprecabatur eum multùm ne fe expelleret extra regionem. Marc. V. 1o.

(5) Si ejicis nos hinc (permitte nobis ut demigremus) in gregem porcorum. Matth. VIII. 31,

(6) Permifit. Luc. VIII. 32.

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cipiter dans la mer (1). Ceux qui les doient, s'enfuirent à une Ville voifine (XLV); & ayant conté ce qu'ils avoient

CITATION.

(1) Et ecce impetu abiit totus grex per præceps in mare. Matth. VIII. 32.

REMARQUE.

(XLV. ) C'étoit Gadare, Ville Grecque de Cale-Syrie, ainsi appellée du nom de la Tribu de Gad dans le partage de laquelle elle avoit été comprise anciennement, & prefque jufqu'au tems de Pompée qui la donna aux Grecs. Elle eft extrêmement connue par les Auteurs Païens, & mê me célébre pour avoir produit des hommes fort illuftres. Il est aisé de comprendre, qu'ayant été, il y avoit fi peu de tems Ville Juive, il demeuroit encore beaucoup de Juifs aux environs. Or ces Juifs entre autres Commerces en faifoient depuis long-tems un fort grand de Pourceaux principalement pour la fubfiftence des Armées Romaines qui fe nourriffoient beaucoup plus de cette chair, que d'aucune autre. Quoique ce trafic ne fût pas interdit précisément par la Loi, néanmoins, comme elle ne permettoit pas de manger de ces animaux, Hyrcan & Ariftobule avoient défendu quelque tems auparavant d'en nourrir pour plus grande précaution, & comme une occafion pro chaine de la violer, Mais l'ardeur du gain faisant mépriser cette défense aux Juifs, furtout dans les Pays, comme celui-ci, contigus aux Païens, où la Tranfgreffion pou voit être moins remarquée, & le débit plus facile; le Fils de Dieu n'héfira pas à permettre aux Démons de faire pé rir ces animaux, dont la vie ne fert à rien, & que Dieu avoit peut-être maudits par cette raison, afin de punir l'avarice des Juifs à qui ils appartenoient, & le mépris qu'ils faifoient des Loix Divines & humaines. Or les Habitans, Païens de Gadare, qui ne croyoient pas comme les Juifs, que les pourceaux fuffent maudits & défendus

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trouverent l'action du Fils de Dieu fort mauvaise, & le chafferent de leur Pays avec civilité; le prenant fans doute pour quelque habile enchanteur, qu'ils n'ofoient pas

vu, les habitans vinrent fur le lieu où la chofe étoit arrivée, pour en fçavoir la vérité, mais ils furent bien furpris de trouver le furieux démoniaque en fon bon fens, vêtu, & affis aux pieds de fon libérateur. La frayeur les prit à cette vue (1), & ils priérent Jéfus de fe retirer de leur Pays (2). Il remonta dans la même barque qui l'avoit amené, & le démoniaque le voulant fuivre, il le renvoya chez fes parens publier la miféricorde que Dieu lui avoit faite.

Le Peuple attendoit encore Jéfus fur l'autre rivage quand il y retourna prendre terre, & la foule fut en moins de rien plus grande autour de lui, qu'elle n'avoit jamais été. Comme il vit tout ce monde, il s'affit fur

CITATIONS.

(1) Magno timore tenebantur. Luc. VIII. 37. (2) Rogare cœperunt eum ut difcederet de finibus eoruma Mare. V. 17.

REMARQUE.

maltraiter, mais avec qui ils ne vouloient avoir aucune communication. Voilà le fond de cet événement fi étrange en apparence, & fi édifiant en effet ; par où les Libertins, s'il leur refte quelque bonne foi, peuvent juger avec quelle réferve, & quelle fufpenfion d'efprit, ils doivent examiner tout ce qui les étonne dans l'Ecriture, jufqu'à ce qu'ils ayent apporté toute l'application néceffaire pour s'en éclaircir par une étude profonde de ces matieres, s'ils en font capables, & fi le Seigneur veur bien regarder leur préfomption en pitié pour les appeller à fon admirable lumiere.

une montagne, & fes Difciples s'étant approchés de lui, il fe mit à les enfeigner, & commença fon difcours en difant, que le véritable bonheur confiftoit dans la pauvreté, la douceur, l'humanité, la pureté de cœur, dans les afflictions, dans la fouffrance des perfécutions, dans la haine & les malédictions des hommes (1): Que quand ces maux leur arriveroient à caufe de lui, c'étoit alors qu'ils devoient s'abandonner à la Joie, parce qu'ils en feroient infiniment récom penfés dans le Ciel: Que les Prophêtes avoient été traités de cette forte, & les impofteurs loués & bien reçus (2). Ne penfez pas, dit-il enfuite, que je fois venu anéantir la Loi & les Prophéties (3): le Ciel & la Terre périront plutôt qu'elles manquent d'étre accomplies dans un feul point; & c'est pour les accomplir, que je fuis venu. Mais ce n'eft pas affez de ne point violer la Loi : & fi votre vertu n'eft plus parfaite que celle des Pharifiens & des Docteurs, qui fe contentent d'observer ce qu'elle ordonne abfolu ment, & qui négligent tout le refte, vous n'aurez jamais de part au Royaume de Dieu

CITATION S.

(1) Pauperes, mires, mifericordes, mundo corde, qui lu gent, &c. Matth. V. 3, 4, 7, 8, 5.

(2) Pfeudo-prophetis. Luc. VI. 26,

(3) Solvere, Matth V. 17.

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