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point oppofée à la Raifon. Mais ces faits étant conformes aux quatre régles de vérité que j'ai établies, il n'y a point d'autre parti à prendre que de croire ces faits, & de tiquer la Religion dont ils font la évidente.

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preuve

Voilà, Monfieur, ce que j'ai cru devoir vous écrire, conformément à vos defirs, pour fixer vos doutes, ou plûtôt pour vous fournir dequoi combattre ceux qui s'efforcent de vous en donner. Confiderez qu'il n'y a point d'homme plus malheureux que celui qui doute, par rapport à un article auffi important que celui de la Religion. Si par malheur pour lui la Religion Chrétienne eft vraie, que deviendra-t-il? Dans quelles perplexités fe trouvera-t-il à l'article de la mort? S'il n'a point travaillé à diffiper fes doutes, tandis qu'il jouiffoit d'une pleine fanté & d'un efprit libre, fera-t-il en état de le faire, lorf

que le mal l'accablera? il mourra donc dans le doute. Pour moi je fuis convaincu qu'il n'eft point d'Incrédule abfolument décidé, à moins qu'il n'ait un extrême entêtement, ou une extrême ignorance. Le moins que puiffe faire un Incrédule un peu fenfé & éclairé eft de douter. Or mourir en doutant, fi on va être anéanti, ou enfeveli dans un gouffre de flammes pour toute une éternité,il me femble que c'est une fituation bien cruelle. On peut Tome I.

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dire qu'à ce moment terrible il vaudroit mieux pour le repos de fon efprit, ne point croire du tout: mais la Raifon qui nous fournit de malheureuses armes pour ne point croire, nous en fournit auffi pour nous rendre incertains & tremblans. Au reste, il ne faut pas nous attendre, que nous croirons tout d'un coup à l'article de la mort, dans l'idée qu'alors le parti le plus prudent fera de croire. La vue d'un Monde qui s'évanouit pour nous, fuffit pour nous en détacher, & pour éteindre nos paffions. Mais cette vue ne fert de rien pour éclairer notre esprit, lorfqu'il eft depuis longtems plongé dans les ténébres de l'incrédulité, à moins que cette incrédulité ne foit un pur oubli de Dieu & de la Religion, & ne foit que l'effet des paffions. Alors il y a encore de la reffource: mais ceux qui font dans ces difpofitions, ne font point, à proprement parler, des incrédules; le cœur eft gâté & non l'efprit.

Malheur donc à ceux qui ayant des lumie res, les obfcurciffent par de mauvais raisonnemens. Ce que doit faire un efprit prétendu fort qui a de la Raifon, & de la prudence, eft de chercher fans ceffe la Vérité, tandis qu'il eft en fanté, & qu'il peut faire ufage de fon efprit; Ambulate, dum lucem habetis. S'il cherche Dieu dans la fincérité defon cœur, Dieu se manifeftera à lui, il l'éclaire

ra. Dieu qui eft jufte, fe cacheroit-il toujours à un homme qui toute fa vie a fait des efforts pour le trouver? Il doit en quelque forte lui tenir compte de fes recherches, & éclairer lui-même fa Raifon; fur-tout fi cet homme s'eft adreffé à lui, comme à la fource de toute lumiere, pour implorer fon fecours au milieu de fes ténébres. Alors il verra que rien n'eft plus conforme à la Raison que le Chriftianifme bien entendu, & dégagé des fuperftitions du Peuple groffier, dont toute la foi confifte fouvent dans l'ignorance & le préjugé. La véritable Foi, au moins celle qui plaît davantage à Dieu, eft celle d'un homme judicieux & éclairé, qui croit fermement après s'être convaincu lui-même par sa Raifon qu'il doit croire.

FIN DE LA MÉTHODE COURTE ET AISÉE POUR COMBATTRE LES DÉISTES,

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UEL Efprit fort pourra réfifter, Monfieur, aux infultes de la multitude, s'il détruit l'idée d'une Justice fuprême & invisible? Sur quoi établira-t-on, qu'il faut s'éloigner du crime, & aimer la Vertu, fi l'on n'admet une régle & un ordre fouverain? Pourquoi fera-t-il défendu de tuer fon prochain, fi l'on ne veut avouer que cette action eft oppofée à l'ordre ? Et cet ordre, qu'on fera obligé de reconnoître, qu'eft-il en effet, que le caractere de l'Etre fuprême ?

pas

Non, Monfieur, il faut ne vouloir raifonner, pour nier l'Existence de Dieu; car enfin, il faut que les Libertins, ou les Ef prits-forts, qui veulent tracer de nouvelles routes, réduifent leur raisonnement à deux Articles. Ils fuppoferont le Monde de toute éternité; & le conftruiront, comme Epicure, par une rencontre fortuite d'atomes qui, s'étant accrochés de cette heureuse façon, ont fait ce que nous voyons, & ce que nous appellons le Monde. Et, en ce cas, je demande fi l'on fçauroit rien trouver dans la plus bizarre de toutes les Religions, qui approche de cette abfurdité? Ou, il faudra qu'ils foutiennent, que l'Etre fuprême, après avoir créé le Monde, le livre tout entier aux Créatures; & par une conféquence avouée, qu'il n'eft ni offenfé par les crimes des hommes, ni touché de leurs Vertus :

Nec benè pro meritis capitur, nec tangitur irá (*).

En quoi, certes, le fameux Epicure me paroît contradictoire à lui-même: car s'il n'y a pas eu un Dieu qui ait créé le Monde, comment peut-il l'avoir livré aux hommes ? Mais enfin, fi Lucrece a cru devoir trouver cet adouciffement, pour former la Secte de

(*) Lucretius,

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