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M. DE LA SORINIERE ayant fait inférer dans le Mercure de Juin 1746 les Vers fuivans,

NOUVEAU Catulle, organe d'Apollon,

Enfant gâté fur le facré vallon,

Vivez les jours de Sophocle & d'Homere ;
Et dans un coin de ce vafte Hémisphere,
Soumis aux lois de la faine raifon
Goûter les fruits d'une utile retraite ;
Et Philofophe autant qu'Anachorette,
Forgez des Vers dignes de votre nom.

M. DESFORGES MAILLARD y répondit par cette Epître.

EPITRE IV.

A M. DE LA SORINIERE >

De l'Académie Royale des Sciences & BellesLettres d'Angers.

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UI, le talent des Vers eft beau, cher Soriniere, Quand on fçait l'art d'unir au brilant coloris, L'élégance, l'accord, le goût & la maniere, Que j'admire dans tes écrits.

Mais je prife encor plus ton cœur droit & fincere,
Cette candeur & cette probité,

Qui, comme on me l'a raconté,

Forment ton rare caractere.

Voilà pour

toi fans compliment,

Ami, les vrais motifs de mon attachement;
Car de Londre à Paris, de Congo jusqu'à Rome,
On trouveroit plus aifément

Cent beaux Efprits, qu'un honnête
homme.

En différens états, comme en divers pays,

Je me fuis fait ce que l'on nomme
En ftyle commun, des Amis.

Ainfi qu'un Papillon qui voltige & s'immole
A l'éclat qui féduit fa crédulité folle,
J'ai fuivi quelques Grands, Fantômes refpe&tés,
Avares de réalités,

Prodigues d'un espoir frivole.

Ceux-ci dans mes chanfons en héros érigés,
Yvres de mon encens, de mes palmes chargés;
M'ont afpergé de certaine Onde,

Eau bénite appellée, & m'ont fort poliment
Promis à tout événement

La moitié de la terre ronde.

Les autres qu'infpiroit une veine féconde,
Dans leurs chiffres tracés de la main du Zéphir,
M'ont juré de m'aimer jufqu'au dernier foupir.
Leurs fons étoient fi doux, leur voix étoit fi tendre,

Qu'il fembloit que l'Amour aux rives du Lignon, Sous un mirthe fleuri leur eût fait la leçon,

Comme il la faifoit à Sylvandre,

Au jeune Hilas, à Céladon.

Cette foule d'amis, fi vrais à les entendre,

Ne l'étoient pourtant que de nom.

J'ai vu fe diffiper leur volage fequelle,
Comme on voit dans les airs un timide efcadron
Se rompre devant l'Aquilon,

Et s'échaper tirant de l'aîle.

Deux ou trois, & fur tout le célebre Titon,
Et l'illuftre Bouguer, dont le peuple Triton
Fait fonner fur les flots la loüange immortelle,
Que la terre à l'envi répete à l'uniflon;

Ceux-là, fans démentir leur bonté naturelle,
M'ont conftamment payé d'une foi mutuelle.
Telle étoit au furplus l'étrange illufion,
La téméraire opinion

D'un homme fimple & franc, qui n'avoit pour fyf

tême,

Que de fe figurer les fentimens d'autrui,
Suivant ce qu'il sentoit en lui.

Dans mon aveuglement extrême,

Infenfé j'oubliois ce que Fétrone a dit,

Comme dans le quatrain qui fuit
Je l'ai paraphrafé moi même.

On prône, on vante affez fon cœur,†

Nomen amicitia, fi quatenus expedit, hares.
Petr. Satyric.

De promettre beaucoup on se fait un mérite;

Mais l'ami qu'on éprouve, hésite

S'il s'agit d'employer fes foins & fa faveur.

Hélas! c'est de tout tems que la Fortune adverse,
Cette Divinité perverse,

Des amis inconftans a fait rougir le front.
Ceux du galant Ovide exilé dans le Pont,

En font une preuve éternelle,
Mais que quelqu'un des miens par une trahison
M'ait lâchement vendu, victime trop fidelle,
Un fi grand coup de foudre étonne ma raison;
J'ai long-tems reffenti fon atteinte cruelle,
Dont pour moi la penfée eft encore un poifon.

Aufi j'ai fait une liaffe

Des lettres, des billets de tout ce monde-là;
Et pour infcription fur cette paperaffe,
Dans ma mauvaife humeur j'ai mis, à qui lira,
Lettres de faux amis, trompeurs, & cetera.

Enfin perfévérant dans fa longue colere, Souflant toûjours le vent contraire

La Fortune m'a confiné

Dans le climat où je fuis né,

Sur une côte folitaire."

C'est là qu'en impromptu l'Hymen vint me lier :

Sur quoi le Président Bouhier,

Ce fçavant renommé, que le Pinde regrette

M'ecrivit affez plaisamment,

Qu'il étoit jufte qu'un Poëte

Ent tout fait poëtiquement.

Mais puis-je, ami très cher, te faire en affùrance,
Une certaine confidence?

Tu me promets du moins de ne pas l'éventer:
Mets la main fur ta confcience.

La femme que j'ai prife aime tant coqueter,
Que nulle autre en ce point ne l'égale, je penfe
Sarrafin, diras-tu, dans un fort beau Sonnet,

Nous apprend que l'efprit coquet

Des femmes fut toûjours l'attrait
Et la rocambole ordinaire,

D'accord: mais j'ai furpris la mienne fur le fait
Sur le fait! Avec qui? De cet autre secret,
Si tu m'assûres de te taire',

Je te ferai dépofitaire.

Hé bien, je l'ai trouvée, ... écoute, & fois difcret,
Je l'ai trouvée, Ami, fur un lit de fougere,
Que parfumoit le ferpolet,

Et les rideaux tirés, même en fon cabinet,
Couverte feulement d'une gafe légere,

Tête à tête, en commerce avec Virgile, Homere,
Horace, Anacréon, & tel autre Muguet,

Tu comptois, conviens en, que la fin du mystere,
Feroit allonger mon bonnet ;

Non, d'une fage époufe, & très digne de plaire
Par fes appas & ses talens,

Euterpe fur le Pinde, Euphrofine à Cythere,
Voilà les Favoris, les aimables Galans,

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