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Il vit tapi, dont n'a beaucoup de joie.
C'est bien raison, a-t'il dit, qu'une fois
Il fçache au moins vous donner vos Etrennes,
Puifqu'attentif à foûlager le poids

De fes ennuis, gentiment tous les mois,
Jufqu'au Croific vous lui donnez les fiennes,

EPITRE IX.

A MONSIEUR TITON DUTILLET,

Le premier de l'An 1746.

Mo

ON cher Titon, l'an recommences

Et noùs finiffons tous les jours:

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Le Tems rapide, dans fon cours
Eteint pour moi fans que j'y pense,
Les feux paflagers des amours ;
Et ne me laiffe pour partage
Que le fouvenir & l'image
Des Jeux envolés pour toûjours.

J'ai vu dans mon adolefcence,
Que pétillant d'impatience,
Je me défolois quelquefois,
Que les femaines terminées
Tardoient trop a former les mois,
Les mois à former les années.
Un fentiment de vanité

Me faifant obferver que l'âge
Qu'accompagne la gravité,
Donnoit dans la fociété

Plus de poids & plus d'avantage,
Et certain air de dignité,

A qui chacun rendoit hommage.

Aujourd'hui que l'âge viril
Vers mon déclin me précipite;
Plus j'y reve, & plus j'y médite
Et plus le tems d'un vol fubtil
Me femble redoubler fa fuite.
Mon inutile plainte imite

Celle que fait dans fes écrits
L'élégant Catulle : & je dis,

Brillant Soleil, tu meurs dans l'Onde,

Pour y renaître avec le jour;

Mais, hélas ! en fortant du monde
Il n'eft perfonne qui fe fonde
Sur l'efpérance du retour.
Roi des Amis, où font les rofes
Que tu voyois l'autre Printemps,
Couvertes d'appas éclatans,
Dans tes rians jardins éclofes
Un limon vil & croupiffant
Les a toutes enfevelies;
Tel eft le fort qui nous attend
Au terme fatal de nos vies.

Tu me répondras, que je puis,

En comptant avec la nature,
Me flater qu'à l'âge où je fuis
Je n'ai pas comblé sa mesure;
Mais tu fçais que dans fes beaux Vers,
Malherbe, dont les divins airs
Enchanteroient un cœur de roche,
Dit que le jour eft refroidi,
Et que la nuit eft déjà proche,'
Dèsque l'on a paffé midi.

C'eft ainfi que l'aimable Flore
Venant de fes dons defirés
Rajeunir nos bois & nos prés,
On s'applaudit de voir l'Aurore
Preffer fa courfe le matin,
S'attendant à la voir demain,
Un peu plus diligente encore,
Semer l'ambre fur fon chemin.

Mais quand précurfeur de l'Automne
Le froid retour des Aquilons
Flétrit la derniere anémone,
Quoique les jours foient encor longs
On fent en foi fes efprits fombres,
De voir le Soleil pareffeux

Céder de fon tour lumineux,
Soir & matin aux triftes ombres :
Et l'on regrette vainement
Les beaux yeux de Flore éplorée;
Qui perd de moment en moment,
Chancellante & décolorée,

Ce qui lui refte d'agrément,
Et qui s'en va languiffamment
Chercher dans une autre contrée

Une faifon plus tempérée,

Où de fon teint vif & charmant
La douce fraîcheur réparée,
Plaise à Zéphire son Amant.

Le Ciel dans une nuit profonde
Nous cache fes arrêts conftans
Et c'eft moins pour vivre long-tems,
Que fa bonté nous mit au monde,
Que pour y répandre l'odeur
Qu'exhalent l'aimable sagesse,
L'amour du prochain, la candeur,
que leur fouvenir vainqueur
Long-tems après la mort y laifle,

Et

Mais à la vérité qui luit
L'incrédule a livré la guerre ;
Et publiant que le Tonnerre
N'eft qu'un accident & du bruit,
Le Vice regne fur la terre,
D'où la pâle Vertu s'enfuit.

J'ai vu fous des toits magnifiques,

Temples confacrés à Vénus,
S'endormir les maffes lubriques
Des riches & lâches Créfus;
Et dans leurs douceurs létargiques,
Ces Dieux terreftres éperdus,

Frappés de maux inattendus,
Pafler aux effrois tyranniques
De Balthazar, d'Antiochus.

J'ai vu fous des formes humaines, Nourrir des Tigres & des Ours, Des Crocodilles, des Vautours, Des Monftres à voix de Sirènes, Dont les faux & tendres difcours Nous payant d'espérances vaines, Dans un dédale de détours

N'ont fait que redoubler nos peines,

L'Enfer avide & ténébreux Les enfévelit dans fa flame.

Leur pouvoir, dont l'ufage affreux

Souilla leur odieufe trame,

Leurs vains monts d'or, le prix infame
Des entrailles des malheureux,
Corrompent leurs fils après eux;
Et fe gliffant de race en race,
Leur fanglante injustice passe
Jufqu'à leurs troifiemes neveux,
Ainfi leur mémoire abhorrée
Leur furvit pendant quelque tems,
Horriblement régénérée

Dans des fucceffeurs plus méchans.

Pour toi, cher Titon, cœur fidele, Ami fincere & plein de zele, Aftrée exprès quittant les Cieux,

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