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Secondez les tranfports d'un Disciple fidéle
A vos divines loix.

Je veux, en publiant votre illuftre louange,
Que fur les bords du Nil, & fur les bords du Gange
On entende ma voix.

Je triomphe avec vous de la foule importune; Je commande à mes vœux, maître de la Fortune, Et libre dans fes fers.

D'abord que de vos feux mon ame eft échauffée; Je monte dans l'Olympe, & fur les pas d'Orphée Je defcens aux Enfers.

Qu'on baiffe la barriere, & qu'on m'ouvre la lice;
Que la Terre s'ébranle, & qu' Atlas treffaillifle
Par mes chants foulagé.

Vous - mêmes diatez - moi, Muses, votre origine
Faites-la par vos foins furvivre à la ruine
Du Monde ravagé.

Quand l'Arbitre des Cieux débrouillant toute chofes,

Sagement difperfa les femences éclofes
Du Cahos odieux,

De fon centre faillit la puiflante Harmonie,
Et des neuf doctes Sœurs la troupe étoit unie
Dans fon fein radieux.

De fes nombreux accords l'Intelligence active
Pénetre, communique à la matiere oifive
Ses fouples mouvemens ;
Sa fubtile douceur l'amollit, la remue,
Et met un frein durable à la Difcorde émuc
Entre les Elémens.

La Terre alors s'affied par fon poids condenfée :
L'Air s'éleve & bondit; fa fubftance élancée
Des Cieux forme l'afur.

Les Eaux forment la Mer ; chaque Corps dans
Sphere

Soumis à l'Harmonie, attentif à lui plaire,
Conferve un Ordre fûr.

Le Soleil luit, la Lune au milieu des Etoiles
S'annonce, & de la Nuit vient éclairer les voiles
Dans le Jour & la Nuit

La Matiere s'agite, & produit fon efpece:
Un Etre en aime un autre ; un Etre fuit fans ceffe
Un autre qui le fuit.

Les Bois, les Fruits, les Fleurs, les Ruiffeaux, la
Verdure,

S'échappent en riant du fein de la Nature:

L'Air excite le Vent;

Le Nuage eft produit des Vapeurs de la Terre
Le Tourbillon rapide enfante le Tonnerre
Du Nuage brûlant.

Tout naît,tout croît:l'Humide avec le Sec s'affemble Le Chaud avec le Froid; & compofent ensemble Les Animaux divers.

Mais tout tombe, auffi tôt que la vive Harmonie Cefle de foûtenir par fa force infinie

Leurs intimes concerts.

Alors ouvrant fon fein, fa puiflance féconde; Muses, vous met au jour pour le bonheur du Monde Et pour charmer fes maux.

Le Plaifir naît de vous; l'Horreur fuit, elle expire L'Harmonie, elle-même, à votre docte empire Soûmet tout les travaux.

La Lyre avec le Luth, Nymphes ingénieuses,
Accompagnent bien-tôt vos voix mélodieuses,
Et vos nobles chansons:

Les Antres les plus fourds hautement retentiffent;
Les Spheres, en roulant, hautement applaudiffent
Au pouvoir de vos fons.

Le Ciel à votre afpe&t jette des étincelles ;
La Terre fe revêt de fes fleurs les plus belles ;
La Mer couvre fes bords;

Le froid Poiffon bondit; la Brute perd sa rage;
L'Oiseau qui fend les airs, apprend fon doux xamage

De vos tendres accords.

Tout s'embellit par vous: mais ce n'eft que dans l'Homme,

Que votre ame tranfpire, où l'œuvre se consomme
Par vos dons précieux :

Apollon vient l'inftruire à bâtir fes afyles;
Et l'Art & la Nature à vos leçons dociles,
Le rapprochent des Dieux,

Apollon, chaftes Sœurs, vous donna fa tendresse;
Vous choisit un féjour qu'il fixa dans la Grece
Sur des côteaux fleuris:

De Lauriers immortels ce Dieu couvrit leurs cimes;
Et là, vous enyvrez de vos transports fublimes
Vos plus chers Favoris.

Comme un torrent fuperbe inonde les Campagnes,
Prêtres, Législateurs, du haut de vos Montagnes
Fondent chez les Humains :

Les Peuples étonnés au bruit de leurs miracles,
Viennent des quatre Vents écouter les Oracles
Du Dieu dont ils font pleins.

L'Univers rend hommage à leurs talens infignes: Mais parmi les Mortels peu vous ont femblé dignes De vos plus grands fecrets.

Saifis de votre efprit ils font marcher la Pierre, Commandent aux Poiffons, aux Vents, aux Flots en guerre,

Aux Lions, aux Forêts,

Aux accens de Tirtée un cœur craintif s'éleve ;
Pindare au haut des Airs, ou fa Verve l'enleve,
Ceint la tête des Rois:

Homere par les hants dérobe a l'Ombre noire,
Des Heros dont, fans lui, les grands noms & la gloire
Fuflent morts à la fois.

Leurs fons chaffent la Pefte, & diffipent la Foudre
DontJupiter vengeur s'armoit pour mettre en poudre
Les Peuples effrayés.

Des foucis affligeans ils charment l'amertume,
Et rappellent l'espoir, dont la flamme s'allume
Dans les cœurs égayes.

Heureux qui de vous plaire a fait sa seule envie!
Mufes, vous préservez ses talens & fa vie
Des atteintes du Sort.

Simonide fuit feul des malheurs manifeftes,
Au milieu des Serpens & des Monftres funeftes
Le jeune Horace dort.

Aftres dur facré Mont, préfidez fur ma Veine,`
Je furmonte avec vous les clameurs & la haine
Des Jaloux ralliés.

Nouveau Bellerophon, je fends les Airs, je vole ;
Et je vois tous les traits de leur rage frivole
Se perdre fous mes pieds.

Illuftre cher ROUSSEAU, dont la Veine fertile,

S'ouvrant dans tous les cœurs un chemin fi facile,

C

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