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l'œil

& des circonstances, la vérité des defcriptions jufques dans les détails les plus finement apperçus, & le doux éclat de fon coloris donnent à ses paysages toute la fraîcheur de la nature. M. Gefsner s'exerce quelquefois dans fes heures de loifir à manier le pinceau; je ne doute pas que du Peintre n'ait beaucoup aidé l'imagination du Poëte; & ce feroit peut-être un très-bon confeil à donner aux jeunes gens qui fe destinent à la poéfie, que celui de paffer quelque tems dans une école de peinture. La pratique de cet art oblige à confidérer la nature avec des yeux attentifs & à la fuivre dans un détail de cir

constances où il eft rare de pouffer l'obfervation. On s'accoutume à envisager les objets fous toutes fortes de faces & fous des points de vue qui échappent au commun des hommes; les images qu'on a recueillies dans cet exercice deviennent une fource abondante de variété & de nouveauté dans les descriptions, & donnent au Poëte les reffources néceffaires pour éviter également l'écueil de la féchereffe & celui des lieux communs.

à

Je ne ferai point étonné qu'on reproche en France à M. Gefsner de s'attacher un peu trop peindre & de descendre dans un trop grand détail de circonf

tances. Ces détails font un mérite aux yeux des Allemands à qui les peintures fidelles de la nature plaisent toujours, & qui font peut-être plus fenfibles aux beautés purement poétiques qu'on ne l'eft communément en France. M. de Voltaire a remarqué il y a long-tems à la fin de fon effai fur la Poéfie épique, que de toutes les Nations polies la Françoife eft la moins poétique. Ce n'est point à moi à décider quelle peut être la caufe de cette différence de goût, & s'il faut croire que Allemands font plus fenfibles, ou que les François font plus raisonnables.

les

On reprochera peut-être à

mon Auteur avec plus de justice d'avoir fait quelquefois paffer fes perfonnages de la naïveté paftorale à un enthousiasme philofophique & religieux d'un ton trop élevé pour des bergers. Il a eu foin de prévenir cette critique dans fa Préface, en nous avertiffant qu'il a mis la scene de fes Idylles en Arcadie & dans ce premier âge du monde où la vie pastorale étant l'occupation univerfelle du genre humain, étoit compatible avec une forte de loifir qui permettoit de cultiver jufqu'à un certain point fon efprit & sa raison. Je ne fai fi cette apologie est tout-à-fait satisfaisante, & je crois que la meilleure ex

cufe de M. Geffner eft dans la

par

beauté même des morceaux qui donnent lieu au reproche. L'Auteur s'eft cru autorisé l'époque & le lieu qu'il a choifis pour y établir la fcene de fes Paftorales, à fuivre le systême de la mythologie Grecque, à introduire des Faunes & des Nymphes & à employer l'intervention des Dieux. Il n'en a fait à la vérité qu'un ufage affez modéré; mais je defirerois qu'il s'en fût encore moins fervi. Je ne puis m'empêcher par exemple de regretter

que dans cette belle Idylle où le vieillard Palémon retrace avec une éloquence fi noble & fi touchante le bonheur & l'innocence

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