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Et pour entrer d'abord en maticre, je vous dirai que nous avons deux devoirs effentiels à remplir, pour acquérir le dé gré de probité qui fait le caractere fpéci-fique d'un parfaitement honnête homme.Comme membres de la République civi le nous tenons au monde, & nous fommes obligez de remplir de certains devoirs dont on ne peut fe difpenfer aveo bienféauce. Comme membres d'une République encore plus parfaite, nous te nons à la Religion, & elle a fur nous dess droits plus particuliers qui font encore: plus indifpenfables que les autres. Ce p'eft pas une chofe impoffible, quand on le veut, d'accorder le monde & la Reli gion cependant cet accord parfait de-mande des qualitez toutes différentes, &. qu'il eft bien plus difficile que l'on ne pen... fe d'allier & de conferver dans la prati-que. Avant toutes chofes, il eft néceffaisre d'avoir une connoiffance exquife de fes devoirs, & une exacte fidélité à les remplir. C'eft déja beaucoup demander de laa plupart des hommes, parce qu'ils vivents fans refléxion ; ils n'aiment point à fe gê-ner ni à fe captiver, pour rendre à chacun ce qui lui eft dû, & ce qu'on a droit d'exiger d'eux. Il faut pour cela de luk«ge du monde, de l'expérience, de l'étusde, & une application continuelle. QuoiQOF

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que les vertus de tempéramment ne foient pas les plus héroïques, ni les plus méritoires, cependant elles font fort commodes, & fort à fouhaiter dans le commerce de la vie civile. Une femme qui eft naturellement prude & chafte, eft fort avancée dans le chemin de la vertu. De même ceux qui font nez obligeans, doux, complaifans, officieux, ont de grandes avances & de grandes difpofitions pour acquérir ce point de perfection, en quoi confifte principalement le caractered'honnête homme. Faites de ferieufes refléxions fur ces maximes, & tâchez de vous les rendre familieres par la pratique. Je fuis, Monfieur, Votre, &c.

On peut acquérir toutes les vertus quand on veut s'en donner la peine.

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Onfieur, les vertus dont je vous ai parlé dans ma premiere Lettre ne font pas toujours les effets ou les appanages d'un heureux tempéramment :mais enfin on peut fe les donner & les acqué

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par le fecours de l'art & de l'habitude, mais furtout par le commerce des honnétes gens à qui l'on s'étudie de plaire. Les hommes les plus imparfaits & les plus impolis peuvent fe défaire d'une certaine rudeffe & d'une groffiereté née avec

eux. Socrate en parlant de lui-même avouoit de bonne-foi, qu'il étoit né avec de très-mauvaises qualitez, & que s'il fe fût livré à fon tempéramment,le penchant naturel l'auroit entraîné dans toutes fortes de vices. Cependant ce même Socra te fe guérit fi bien de fes mauvaifes inclinations par le fecours de la Morale, & par l'étude de la Philofophie, qu'il fut déclaré par l'oracle, le plus homme de biens de toute la Gréce. Peu de Gens s'appli quent à fe bien connoître, comme faifoit: ce Philofophe : l'amour propre fait en eux: deux mauvais effets ; il diminuë l'idée de feurs défauts, & les leur rend prefque imperceptibles en même tems il grollit dans leur imagination l'idée de leur méri te, & des bonnes qualitez naturelles qu'ils peuvent avoir. De forte que ne fe connoiffant point tels qu'ils font effectivement, & croyant avoir un mérite rare, is n'ont garde de parvenir jamais au dégré de perfection, qui convient à un hon nête homme. Cependant il n'est rien de plus beau ni de plus fouhaitable que cette qualité ce titre feul efface tous ceux que la fortune, les richeffes, & la faveur peuvent donner. Je fuis, Monfieur, Votre, &

Lettre à Monfieur ***. Des moyens pour acquérir l'eftime & l'approbation des hommes.

Ma plus. infaillible pour le faire au

Onfieur, la voye la plus courte &

la

goût des hommes, eft de renoncer à fes propres inclinations pour fe plier à cellesdes autres,& fe conformer à leurs humeurs. Cette espéce de Philofophie ne s'acquiert qu'avec peine, & que par une grand défir de plaire. Mais il faut que: chacun y. mettre du fien: car on ne peut fe paffer les-uns des autres-dans le commerce de la vie civile. N'efpérez pas- de trouver des gens qui ayent toute les-perfections, fans le mélange d'aucun défaut.. Il n'y a point d'homme fi parfait qui n'ait des inégalitez, des bizarreries, des foibleffes ; mais enfin on en devient le maî tre avec le tems par la patience & les efforts que l'on fait pour réprimer les faillies de fes paffions. Si l'on ne peut êtreparfait en tout, il faut du moins s'appli-. quer férieufement à cacher fi bien fes foibleffes, que perfonne n'en fouffre, & quemême on ne s'en apperçoive pas. On confulte, on écoute, avec docilité les perfonnes éclairées pour profiter de leurs avis.. Un homme attentif à fon devoir fe tient: far fes, gardes, & craint que le Public

puiffe entamer fa conduite par quelque en droit que ce puiffe être. N'oubliez rien de ce qui peut vous mettre à couverr detout ce qui feroit capable de flětrir votre réputation.. Mais fi l'on vous blâme injustement, tenez-vous en repos ; car les perfonnes raisonnables vous rendront: toujours juftice. Je fuis, Monfieur, Votre, &c..

Lettre à Monfieur *** fur la Politeffe.

Monfieur, il ne faut pas s'étonner fi

l'on voit fr peu de gens polis dans le monde, quoique la plupart des François fe piquent de politeffe, & que ce foit. même par-là qu'ils fe diftinguent. Je ne parle pas fimplement d'une politeffe extérieure quife borne à certains égards, & à quelques devoirs que l'on fe rend réci proquement; je parle d'une politeffe intérieure qui regle les mouvemens de l'a-me. Celle-ci eft plus rare qu'on ne penfe; car elle eft comme un précis de tou tes les vertus morales: c'eft un affemblage de difcrétion, de civilité, de complaifance, d'une continuelle attention pour rendre à chacun les devoirs qu'il a droit d'exiger.La véritable politeffe rend agréa ble tout ce que l'on fait & tout ce que l'on dit. Au contraire, toutes les actions des..

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