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Elle a eû même en mourant la feule bonne qualité qui lui avoit manque durant fa vie, c'est-à-dire, qu'elle a fouffert avec courage une chofe dont le feul nom l'avoit toujours fait trembler. Elle a accompagné cette fermeté d'ame d'une piété fi chrétienne, qu'il me femble que nous ne la devons pas regretter. C'eft l'aimer d'une affection trop intéreffée, que d'être trifte quand elle nous quitte pour être mieux, & qu'elle va jouir dans l'autre monde d'un repos qu'elle n'a jamais trouvé en celui-ci. Je tâcherai de profiter de l'exhortation que vous me faites de fuivre un fi bon exemple, & ce ne fera pas la premiere fois que vous m'aurez fait devenir homme de bien. Les déplaifirs que j'ai eû jufqu'à préfent, ne feconderont pas mal vos remontrances; car je m'imagine que peu de chofes contribuent mieux à nous. faire mourir fans répugnance, que de n'avoir point de plaifir à vivre. Ce n'est pas que je fuffe bien aife de finir trop promptement ma carriere; puifque vous devez revenir bientôt, jugez s'il m'est aisé de renoncer à l'avantage de vous revoir, & de vous protester à quel point je fuis, &c.

Lettre de Littérature à Monfieur de ***.

J

MONSIEUR,

E lis avec le plus grand plaifir du mon de les belles chofes que vous m'écrivez. Mais le chagrin me prend un moment après, quand je me vois fi éloigné d'une converfation charmante que vos Lettres me repréfentent. J'ai admiré la Traduction que vous m'avez envoyée. Vous avez amené où vous avez voulu les Graces qui étoient dans l'original, encore qu'elles femblaffent ne le point quitter. Elle font devenuës Françoises avec tous les agrémens que lui prêtoit le Latin, & je fuis perfuadé que fi Horace revenoit au monde, il ne vous remercieroit pas de bon cœur de l'honneur que vous avez fait à fon Ode. Il auroit un fecret dépit de fe voir furpaffé en plufieurs endroits. Cela fait dit, s'il vous plaît, fans offenfervotre modeftie, ni l'amour que vous avez pour un fi charmant Poëte. Je vous avoüerai méme, fi vous ne vous fâchez pas, que je ne fuis point de votre fentiment, quand vous preferez avec tant de hauteur l'endroit où Horace parle de la mort, à la belle imitation que Malherbe nous en a laillée. Ce n'eft pas que je ne demeure

d'accord avec vous, que le Mors pulfat d'Horace ne foit admirable, en ce qu'il anime la mort, la fait agir, & femble nous la faire voir. Son aquo pede montre en peu de mots la générale égalité du def tin des hommes, qui eft de mourir, & il n'y a pas d'oppofition plus jufte que fon Pauperum tabernas, Regumque turres. Mais je demeure dans ma premiere opinion, que fi la pensée de Malherbe est moins vive, parce qu'elle eft moins figurée, & qu'elle ne fait pas agir la mort, il me fem ble que fon expreffion eft plus magnifique que celle d'Hor ce. On y trouve même quelque oppofition entre la cabane d'un pauvre, & le Louvre qui eft le Palais de nos Rois. Je fouhaiterois feulement pour l'honneur du Poëte François, qu'il eût voulú changer le premier vers pour le rendre digne d'être à la tête des autres. Je ne fçaurois m'empêcher de vous les écrire, tant je crains que l'Original Latin ne vous ait fait négliger l'imi tation Françoife.

La pauvre en fa cabane où le chaume le cou-

vre,

Eft fujet à fes loix;

Et la Garde qui veille aux barrieres du Lou

vre,

N'en défend pas nos Rois.

Une infinité de gens moralifent für la mort, en vers ou en profe, bien ou mal. Mainard même ne fe foûtient point par tout, quand il traite cette matiere dans. fa belle Ode: Alcipe, revient dans nos bois. Je vous en allois citer quelques endroits, mais je me fuis fouvenu que Coftar en a fait une efpéce de Differtation dans fes Lettres. Il vaut mieux que je vous renvoye à cet Auteur, que de pren-dre la peine de m'étendre fur une matiere que je ne traiterois pas fi bien que lui Je fuis, &c.

Avanture fur les Placets des Amans & des Filoux. A Monfieur de ***.

J

MONSIEUR

E ne puis vous envoyer les Vers que· vous me demandez, je ne les trouve, ni dans ma mémoire, ni dans mon portefeüille; contentez-vous, s'il vous plaît de la petite avanture dont ils furent fuivis, & que vous me priez de vous raconter, Monfieur de *** fit un Placet galant, comme pour être préfenté au Roi par les Amans contre les Filoux. Les premiers.. fe plaignoient de ce que les autres les empêchoient de fortir la nuit, & de profiter d'un tems fi commode pour leurs rendez

You's Mademoiselle de S.... répondit à ce Placet, & les Filoux fe défendirent agréablement par fon fecours. Ils fe mocquerent des Amans timides, & dirent que puifqu'ils avoient peur, ils n'étoient pas dignes de ces rendez vous dont ils parloient fi haut. Ils ajoûterent même que leur crainte étoit mal fondée, & que leurs bourfes n'étoient pas affez pleines pour attirer les voleurs; que les préfens de leurs Maîtreffes qu'on leur pourroit prendre, ne confiftoient qu'en quelques petits bracelets de cheveux: qu'ils étoient bien différens des Amans qui vivoient. fous le Regne de Henri le Grand, d'amoureuse mémoire: Que l'on trouvoit fur eux les portraits de leurs Belles dans des boëtes d'or enrichies de diamans. Si on venoit à les leur voler, ils les rachetoient le lendemain plus qu'elles ne valoient & ne manquoient jamais de payer le secret qu'il leur importoit que l'on gardât pour les portraits. Ces Placets plûrent extrêmement, on trouva que les Vers en étoient jolis, & tout le monde en voulut avoir des copies, mais peu 'de gens fçavent la fuite, dont j'ai promis de vous faire part. Je vous dirai donc que quatreou cinq mois après, que l'on ne fongeoit : plus à parler du démêlé des Amans & des Filoux, on vint le jour de l'an fur les dix

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