페이지 이미지
PDF
ePub

heures du matin, heurter affez rudement à la porte de Mademoiselle de Scu.... Le petit du Buiffon que vous connoiffez, courut ouvrir, & penfa mourir de peur.. Il vit un homme terrible par fa mine, par fa mouftache, & furtout par la ceinturede fa culotte garnie de piftolets, de poignards & de bayonnettes, qu'il laifla voir en entrant, & qu'il avoit cachées de fon manteau dans les rues. Le petit Laquais s'enfuit aufli vite qu'une grande frayeur le peut permettre; & ayant rencontré la Demoiselle qui eft à notre illuftre amie :: Ah! Mademoiselle Crois.... s'écria-t'il en tremblant, nous fommes perdus ; il y a dans la cour un grand diable d'homme qui nous ya tous.tuer. Crois... entre dans la chambre de fa Maîtreffe, & rapporte ce qu'on venoit de lui dire. Mademoisel le de Scu.... tâche de la raffurer. Ne voyez-vous pas, lui dit-elle, que c'eft un Cavalier qui ne fçait où donner de la tête, & qui vient dans une rue détournée, & chez une fille, croyant recevoir une aumône plus confidérable qu'ailleurs? Portez lui ces deux piftoles, & dites-lui que je ferois plus libérale fi ma fortune étoit en; meilleur état. La Demoifelle enhardie par ce préfent qu'elleavoit à faire, aborda l'homme terrible; mais ce ne fut qu'avec une grande révé

rence. Monfieur, lui dit-elle, voilà ce que Mademoiselle vous envoye: elle vous prie de l'excufer fielle n'a pas l'honneur de vous voir. Dites à Mademoiselle votre Maîtreffe, lui répondit-il en s'humanifant, & en refufant l'argent, que je viens pour donner, & non pas pour recevoir.. Préfentez lui cela de ma part, ajoûta-t'il, en lui mettant une petite corbeille entre les mains. Il n'eût pas plûtôt achevé.ces mots, qu'il fortit, & la Demoifelle prit cette avanture pour un enchantement. Elle la raconta à fa Maîtreffe qui n'en fut pas moins furprife, furtout lorfqu'elle ou vrit la corbeille. Elle y trouva une bourfe de point d'Espagne d'or, d'un travail admirable. Il y avoit dans cette bourse un bracelet de pierreries avec un petit Madrigal, où l'homme terrible parloit peu près de cette forte: « Illuftre Sapho, »je viens de la part-de-mes Camarades » les Filoux, pour vous donner vos étren

כן

nes, & vous offrir la plus jolie bourfe » que nous ayons volée depuis que vous eûtes la générofité de défendre notre » caufe. » Mademoiselle de Sc.... connut par le tour des Vers, & par cette libéralité faite d'une maniere fiingénieuse, que le préfent lui venoit d'une perfonne de grande qualité, & d'un efprit fort ga lant, qui a pour elle toute l'eftime & toute,

l'amitié qu'elle mérite. Je voudrois bien que vous en euliez autant pour moi. Je fçai que je ne le mérite pas, mais fçachez que je fuis plus que perfonne au monde, MONSIEUR, Votre, &c.

A Monfieur de ***, l'Auteur lui rend comp te d'un voyage, & lui fait la defcription d'un Bal ridicule.

Ous l'aviez bien prévû, Monsieur. J'ai paffé les Landes tout feul pendant un mauvais tems, c'eft-à-dire, que: j'ai fait un voyage fort trifte & fort pénible: mais enfin j'arrivai hier en cette Ville. Après les embraffades & les comment vous portez-vous, on me fit mettre à ta-ble, & cela fort à propos; car je vous jure que dans les Landes j'avois penfé mourir de faim. Pendant le repas, on m'apprit que Monfieur le Marquis de P.... étoit en Ville, & que le foir il devoit y avoir un Bal de conféquence. De forte que je réfolus de donner l'aprèfdîné à la vifite, & l'après-foupé au Bal. Je fus reçû chez Monfieur le M... avec toute la bonté que je pouvois efpérer; & même il fut fi civil, qu'il me mena voir tout ce qu'il y avoit de plus confidérable en Ville. Au retour nous foupâmes; après le fouper

[ocr errors]

nous allâmes voir ce Bal d'importance, où tout étoit plus que très-provincial, l'exception de la maifon de Monfieur le. Marquis. Tous ceux qui la compofent font fort bien faits, danfent en perfection, & ne fentent aucunement les gens de Village: mais tout le refte peut paffer pour franc-campagnard. J'y vis quantité de jeune gens, dont les habits témoi gnoient fort leur antiquité, par le peu: de rapport qu'ils avoient avec la mode, force chauffes étroites, fur lesquelles il paroiffoit quelques rubans couleur de feu, redreffez avec le fér, & femez en divers lieux, fans aucune proportion d'éloigne ment; force chapeaux de toutes, fortes >> de modes, finon de celle qui court, & tous portez de la maniere qui déplaît tant à votre Héroïne; force colets d'Höllande, quelques-uns à paffemens, mais.. . tous remplis & rehauffez. Je vis même des.. Galans qui s'étoient parez de leurs habits. d'Efté, parce qu'ils étoient accompagnez d'un miférable pourpoint de tafetas ou de brocard. La Sale étoit fans tapifferie, & quoiqu'affez grande, elle n'étoit éclai rée que par douze chandelles qu'on avoit plantées dans quelques bâtons croisez, qui faifoient là le perfonnage de douze chandeliers. Pour des violons, je vous jure, Monfieur, qu'il ne s'eft jamais rien

[ocr errors]

entendu de fi pitoyable. Quiconque eût eû l'oreille un peu fine, eût fouffert comme un damné. Si l'ami Baptifte les eût entendus, fur l'heure même il eût pris la pofte, pour fuir cent lieux loin d'une fi miférable harmonie. De Citrons doux, d'Oranges de la Chine, ni de collation, je n'en vis point paroître, & je crois qu'elle ne fit mal à l'eftomach de perfonne. Pour les femmes de qualité (j'entens les femmes à tabis ou à tafetas, & non pas les Dame à caroffe, ) j'en vis fört peu de belles; mais j'en remarquai beaucoup dont la phifionomie étoit affez friponne, & fur le vifage defquelles il paroiffoit un certain air d'enjouement, qui ne déplaifoit pas. Vous ferez étonné fi je vous dis que les Servantes furent les objets qui attacherent le plus mes yeux ; mais il faut que vous fçachiez qu'elles font ici fort jolies, propres, éveillées & fouples com me des Bafques. Pour les jeunes gens du fexe mafculin, il y en a fort peu de bien faits, mais il y en a beaucoup qui croyent l'être, & qui à force de faire les beaux, font merveilleufement bien les ridicules.Au refte on m'a dit que les honnêtes fem mes vivoient ici chaftement. Pour les au tres, elles font fufpects à ceux qui font gens à foupçon. Voilà, ce me femble, Monfieur,s'être acquitté fört exactement

« 이전계속 »