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aucune, il eft continuellement en fenti nelle, pour furprendre une pointe au paffage; & lorfqu'il en vient à bout, vous avez pris garde de quelle maniere il rit, & combien on le chagrine, quand on ne rit auffi fort pas lui. Quand j'euffe eu que envie de devenir fçavant, voilà juftement l'homme qu'il me falloit pour m'en dégouter, & pour me faire aimer mon ignorance.. Je vous avoue que fa converfation me donna tant d'ennui, que la douceur de la vôtre ne fut pas capable de foulager mon chagrin. Pardonnez moi fr je vous le dis, il vous laiffa parler fi peu, que cet aveu ne doit pas Vous offenfer.

Lettre de remerciment à une Dame.

N vérité, Madame, vous n'êtes point intéreffée. C'eft avoir l'ame bien généreuse, de ne me demander que des. Chanfons pour le riche tableau que vous m'avez donné. Vous avez trop bonner opinion de ma petite Mufe. Croyez-vous que fes ouvrages foient dignes de payer les vôtres ? Non, non, Madame le travail de vos mains eft plus précieux. que celui des miennes, & je fais confcien-. ce de vous voir tant perdre à cet échange.. Mais enfin vous le voulez, & à cela je nai point de replique.. Il eft vrai qu'il court:

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par la Ville plufieurs chanfons de ma façon: mais je ne fçai si je pourrai vous les envoyer toutes. Ma mémoire ne garde guere de femblables ouvrages: commeje les fais affez facilement, je vous puis affurer que je les oublie de même. Au ref te, je voudrois bien que ceux aufquels je fais comptable, fuffent auth faciles que vous. Si je les pouvois païer en chanfons je m'imagine que ma fortune feroit bientôt faite.

Apologie d'un efprit badin. Lettre enjouée.

MADAME,

Ld'accord. Il est vrai ... a de l'efprit infiniment, j'en fuis que fon efprit eft fi fubtil, qu'il s'évapore fouvent; je l'avouë auffi. Quand il auroit moins de ce qui éleve, & qu'il auroit davantage de ce qui affermit, il n'en vaudroit que mieux; je le confeffe encore. Mais quelque éventé qu'il puiffe être, n'eft il pas plus agréa ble que le mélancolique S.... La fotte retenuë de celui ci eft bien moins fuppor table que l'emportement de celui là. Le brillant eft toujours beau dans un efprit, quand même il ne feroit pas toujours reglé. Je veux bien croire que quelquefois on peut avoir de l'efprit par excès. Peut

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être même

que d'en avoir trop, eft plus près de la folie, que d'en avoir fort peu. Mais pour moi j'aime mieux les vices qui pêchent en excès, que ceux qui pêchent en défaut. Ils femblent avoir quelque chose de plus relevé. La témérité eft toujours plus noble que la poltronnerie, & la prodigalité que l'avarice. Quand un homme n'eft pas courageux, ni libéral de la belle maniere, j'aime bien mieux qu'il foit téméraire & prodigue, que poltron & avare. Et n'eft-il pas vrai, Madame, que le Comte de B. qui mange fon bien avec tant d'honneur, eft à votre gré plus honnête-homme que le Préfident D.... qui le conferve fi vilainement? Et le Chevalier D. qui fe bat quelquefois fi mal à propos, n'eft-il pas mieux venu parmi les gens de qualité, que C. qui fe laiffe battre avec tant de lâcheté? Je crois qu'il en eft de même de l'efprit. Il eft plus avantageux de l'avoir vif, quoique mal conduit, que tout à fait péfant & bien reglé. Vous dites fort agréablement, qu'il vaudroit autant entreprendre de fixer le Mercure, que de vouloir arrêter la vivacité de celui dont nous parlons: mais pour çela, Madame, croyez-vous qu'il en foit moins eftimable? Ne fçavez-vous pas que le mouvement eft naturel à notre ef pris auffi bien que la légereté; & que plus

il poffede ces deux qualités, & plus il eft ce qu'il doit être? Enfin j'aime les emportemens & la vivacité de L. Vous avez beau dire qu'il s'éleve quelquefois fi haut, que les meilleurs yeux le perdent de vûë; eftime plus les animaux qui s'élevent en l'air, que ceux qui rampent fur la terre. Parmi ceux-ci, on trouve fouvent du venin, & parmi les autres il ne s'en trouve prefque jamais. Si cet efprit femble, ainfi que vous le dites, un fleuve, ou bien un torrent, il reffemble à celui du Nil, qui ne fe déborde jamais fins engraiffer toutes les terres de fon voifinage. Avoüez, Madame, que dans fes débordemens il pouffe cent chofes excellentes, dont on peut faire du profit: & que du moins il vous fait bien rire quand il s'abandonne tout à fait au torrent de fa veine poëtique. Hé bien, Madame, n'eft-ce pas là foutetenir comme il faut le parti de L.... Ne dites donc plus que je fuis vindicatif, puifqu'après avoir reçû de lui tant de railleries baffes ou fpirituelles, je foutiens fon efprit contre vous, qui avez reçu de lui tant de loüanges bonnes ou mauvaises.

Au Révérend Pere***.

L'Auteur le remercie de lui avoir traduit en Latin deux petits complimens François.

MON REVEREND PERE,

JE reçûs hier de votre part les deux

petits Difcours que vous avez habillez à la Romaine. Sans mentir, vous êtes un admirable Tailleur ; vous leur avez fait des robes fi riches & fi magnifiques, que l'éclat m'en a furpris, & m'a prefque empêché de les reconnoître. Je n'euffe jamais crû qu'un ouvrage qui fortoit de mes mains, fi groffier & fi mal limé, pût devenir fi beau & fipoli entre les vôtres. Mais je fuis bien détrompé, je commence à connoître que la Rhétorique est une Coquette qui entend fi parfaitement l'ufage du fard, qu'elle embelliroit les chofes du monde les plus laides; car enfin je vous avois envoyé deux petits complimens François d'un ftile rampant, & d'un caractere foible: & vous m'avez renvoyé ces complimens Latin, mais en Latin beau, net, poli, fort, tel enfin qu'on le parloit à Rome fous l'Empire d'Augufte, & avant que les Goths & les autres Barbares fuflent allez en corrompre la pureté. De forte que mes difcours, ou plûtôt les

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