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point promis d'en défendre l'entrée aux mé-
chans au contraire, il a prédit qu'elle en feroit
toujours mêlée jufqu'à la dernière féparation. Il
n'a pas promis la fainteté à tous les miniftres &
à tous les pafteurs de fon églife, non pas même
à leur chef: il a feulement promis des pouvoirs
furnaturels à tous ceux qui entreroient dans le
ministère facré, fuivant les formes qu'il a pref-
crites. Ainfi, comme de tout temps il s'eft
trouvé des méchans, qui fans la converfion du
cœur & les autres difpofitions néceffaires, ont
reçu le baptême & l'euchariftie, il s'en eft
trouvé qui ont reçu fans vocation l'impofition
des mains, & n'en ont pas moins été prêtres
ou évêques, bien qu'ils l'ayent été pour leur
perte, & fouvent pour celle de leur troupeau.
En un mot, Dieu ne s'eft point engagé à arrêter
par des miracles les facriléges, non plus que les
autres crimes. Il ne faut donc point faire diffi-
culté de reconnoître pour papes légitimes ni
Sergius III, ni Jean X, & les autres, dont la
vie fcandaleufe a déshonoré le faint fiége, 49.
pourvu qu'ils ayent été ordonnés dans les formes
par des évêques; mais il faut convenir qu'il eût
été plus avantageux à l'églife d'être toujours
pauvre, que d'être expofée à de tels fcandales.

Hift. 1. LIV.n.42.

XII.

mœurs.

Ils furent auffi en partie caufés par l'ignorance, depuis qu'elle eut jeté de trop profondes Corrup racines. Après la chute des études, les bonnes tion des mœurs & les pratiques de vertu fubfiftèrent encore quelque-temps, par la force de l'exemple & de l'éducation. On vivoit ainfi à Rome fous le pape Agathon, vers la fin du feptième siècle; mais l'ignorance croiffant toujours, on fe relâcha de ces faintes pratiques, dont on ne connoiffoit plus les raifons, & la corruption vint au point où vous l'avez vue vers la fin du neuE s

vième fiècle, après Nicolas I & Adrien II: en forte que, pour relever l'églife Romaine, il fallut vers le milieu de l'onzième fiècle y appeler des Allemands mieux inftruits, comme Grégoire V & Leon IX. L'ignorance n'est bonne à rien, & je ne fais où le trouve cette prétendue fimplicité qui conferve la vertu. Ce que je fais, c'est que dans les fiècles les plus ténébreux & chez les nations les plus groflières, on voyoit régner les vices les plus abominables. J'en ai donné quelques preuves à cette occafion; mais je n'ai ofé les rapporter toutes & je n'ofe même les marquer plus.précifément. C'est que la concupifcence eft en tous les hommes, & ne manque point de produire fes funeftes effets, fi elle n'eft retenue par la raison aidée de la grâce. Hift. 1. Il y a un genre de crime, dont je ne trouve XLIX. n. en ces fiècles des exemples que dans l'Orient;

17.

n. 43.

c'est l'impiété & le mépris manifefte de la religion. Vous avez vu fans doute avec horreur les jeux facriléges du jeune empereur Michel, fils de Théodora, qui fe promenoit par les rues de Conftantinople avec les compagnons de fes débauches, revêtus des habits facrés, contrefaifant les proceffions & les autres cérémonies de Liv. LI. l'églife même le redoutable facrifice. Photius, alors patriarche, le voyoit & le fouffroit, comme il lui fut reproché au huitième concile ce qui montre qu'il étoit encore plus impie que l'empereur. Car ce prince étoit un jeune fou, fouvent ivre, & toujours emporté par fes paffions; mais Photius agiffoit de fang froid, & par de profondes réflexions: c'étoit le plus grand efprit & le plus favant homme de fon fiècle : c'étoit un parfait hypocrite, agiffant en fcélérat & parlant en faint. Il paroît l'auteur d'une autre efpèce d'impiété c'eft d'avoir pouffé la flatte

:

tie, jufqu'à canonifer des princes qui n'avoient Hift. 1. rien fait pour le mériter: leur bâtir des églifes, LIII. n.3. leur confacrer des fêtes, comme il fit à Conf- Sap. xiv. tantin, fils aîné de l'empereur Bafile Macédo- 15. hift.l. nien, pour le confoler de fa mort, imitant en ce point les auteurs de l'idolâtrie. Conftantin Monomaque en voulut faire autant à Zoé, à qui il devoit l'empire.

LX. 1.13.

Inconti

XIII.

nence du

n. 5.

Les trois vices qui ravagèrent le plus l'églife d'Occident dans ces malheureux temps, furent l'incontinence des clercs, les pillages & les vio- clergé. lences des laïques, & la fimonie des uns & des Juft. Apo. autres : tous effets de l'ignorance. Les clercs p. 61. B. avoient oublié la dignité de leur profeffion, & Apol. Athan.p les puiffantes raifons de cette difcipline de la 36. C. continence. Ils ne favoient pas que dès l'origine Aug. ver. du chriftianifme, cette vertu angélique en a rel. c. 3. fait la gloire, & qu'on la montroit aux païens H. 1. comme une des preuves des plus fenfibles de 111.num. fon excellence. L'églife ayant donc toujours un 38. 47. grand nombre de perfonnes de l'un & de l'au- 1. Cor. tre fexe, qui fe confacroient à Dieu par la conVII. 32. tinence parfaite, rien n'étoit plus raifonnable 33. que de choisir fes principaux miniftres dans cette partie la plus pure du troupeau. L'églife en étoit mieux fervie par des hommes, qui, dégagés des foins d'une famille, n'étoient point partagés, & ne penfoient, comme dit S. Paul, qu'à plaire à Dieu; s'appliquant entièrement à la prière, à l'étude, à l'instruction, aux œuvres de charité. Auffi, avez-vous vu que cette fainte difcipline du célibat des clercs fupérieurs, s'eft toujours obfervée dans l'églife, quoiqu'avec plus ou moins d'exactitude, felon les temps & les lieux.

Mais nos clercs ignorans, du neuvième & du dixième fiècle, regardoient cette loi comme un

joug intolérable. Leurs fonctions étoient pref que réduites à chanter des pfeaumes qu'ils n'entendoient pas, & pratiquer des cérémonies extérieures; vivant au refte comme le peuple, ils fe perfuadèrent aifément qu'ils devoient auffi avoir des femmes ; & la multitude des mauvais exemples leur firent regarder le célibat comme impoffible, & par conféquent la loi qui l'impoloit, comme une tyrannie infupportable. H. Les Grecs furent les premiers, qui, dès la fin XL.n.49 du feptième fiècle, fecouèrent ce joug falutaire, par le canon du concile de Trulle, où ils permirent aux prêtres de garder leurs femmes comme ils font encore; & ils prirent pour prétexte un canon de Carthage mal entendu & les fcandales déjà trop fréquens chez les HA. 1. Latins. Mais le premier exemple formel en OcLIV.A.20. cident, eft celui de ce curé du diocèse de Châlons, qui voulut fe marier publiquement, & contre lequel les gens de bien s'élevèrent, comme on feroit aujourd'hui, tant on avoit d'horreur d'un mariage fi nouveau.

XIV.

Les pillages & les violences étoient un refte Hoftilités de la barbarie des peuples du Nord. J'en ai maruniver- qué l'origine dans le foible gouvernement de Louis le Débonnaire, & le progrès fous fes Hift. 1. fucceffeurs; & certainement il est étrange que LIX.A.38. des Chrétiens ignoraffent à un tel point les pre

felles.

miers élémens de la religion & de la politique, qu'ils fe cruffent permis de fe faire juftice euxmêmes, & de prendre les armes contre leurs compatriotes comme contre des étrangers. Le fondement de la fociété civile eft de renoncer à la force, pour fe foumettre à des lois & à des juges qui les faffent exécuter; & l'effence du chriftianifme eft la charité, qui oblige nonfeulement à ne faire aucun mal au prochain,

mais à lui faire tout le bien poffible. Qu'étoit-ce donc que des Chrétiens toujours prêts à fe venger de leurs frères par les meurtres & les incendies, & ne cherchant la juftice qu'à la pointe de leur épée ?

Vous avez vu les plaintes & les remontrances inutiles que l'on faifoit contre ces défordres dans les affemblées des évêques & des feigneurs. Autre preuve de l'ignorance: car il falloit être bien fimple pour s'imaginer que les exhortations par écrit, & des paffages de l'écriture & des Pères, feroient tomber les armes des mains à des gens accoutumés au fang & au pillage. Le remède eût été d'établir des lois tout de nouveau telles qu'en avoient eu les Grecs les Romains, & les autres nations policées : mais où trouver alors des légiflateurs affez fages pour dreffer de telles lois, & affez éloquens pour en perfuader l'exécution?

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Cependant la difcipline de l'églife dépériffoit, & les mœurs fe corrompoient de plus en plus. Les nobles, cantonnés chacun dans fon château, ne venoient plus aux églifes publiques recevoir les inftructions des évêques. Ils affiftoient aux offices des monaftères voifins, ou fe contentoient des meffes de leurs chapelains, & des curés de leurs ferfs; encore prétendoientils les établir & les deftituer comme il leur plaifoit, & fouvent ils s'attribuoient les dixmes & les autres revenus des églifes. Les évêques ne pouvoient ni corriger ces prêtres, protégés par les feigneurs, beaucoup moins les feigneurs eux-mêmes, ni vifiter leurs diocèfes, ni s'affembler pour tenir des conciles ; & quelquefois ils étoient réduits à prendre les armes, pour défendre contre les feigneurs les terres de leurs églifes.

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