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Prenons un exemple fenfible: que diriez-vous d'un prince qui, par une fauffe clémence, offriroit à tous les criminels des moyens faciles pour éviter le fupplice, des amendes modiques, de légères taxes pour contribuer aux dépenfes de fes bâtimens ou à l'entretien de fes troupes : une vifite à fon palais, quelques paroles de fatisfaction; enfin pour l'abolition de toutes fortes de crimes, quelques années de fervice dans fes armées ? A votre avis, l'état de ce prince feroitil bien gouverné? Y verroit-on régner l'innocence des mœurs, la bonne foi dans le commerce, la fureté des chemins, la tranquillité publique? N'y verroit-on pas au contraire un débordement général de tous les vices, une licence effrénée, & toutes les plus funeftes fuites de l'impunité? L'application eft facile.

pas tou

Il en faut donc revenir à la maxime de faint Paul, que tout ce qui eft permis n'eft jours expédient. Car ce prince qui feroit grâce à tous les coupables, uferoit fans doute de fon droit, puifque je le fuppofe fouverain: mais il en uferoit indifcrétement. Il en eft de même des indulgences. Aucun Catholique ne doute que l'églife n'en puiffe accorder qu'elle ne le doive en certain cas; qu'elle ne l'ait toujours fait mais c'eft à fes miniftres à difpenfer fagement ces grâces, & n'en pas faire une profufion inutile ou même pernicieufe. Au refte, je réferve à un autre difcours à parler plus amplement de l'indulgence de la croifade.

:

:

Je conclús celui-ci, en vous faisant remarquer ce que je penfe avoir prouvé, que les changemens arrivés dans la difcipline de l'églife depuis cinq ou fix cents ans, n'ont point été introduits par l'autorité des évêques & des conciles, pour corriger les pratiques anciennes :

mais par négligence, par ignorance, par erreur, fondée fur des pièces fauffes, comme les dé crétales d'Ifidore, & par les mauvais raisonnemens des docteurs fcolaftiques. Dieu veuille que nous profitions de la grâce qu'il nous a faite de naître dans un fiècle plus éclairé; & que fi nous ne pouvons ramener l'ancienne difcipline nous fachions au moins l'eftimer, la révérer & la regretter.

CINQUIEME DISCOURS

UN

Sur l'Hiftoire Eccléfiaftique.

A

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Paris

cours

&

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IN des moyens dont Dieu s'eft fervi pen- Ecole de dant les derniers temps pour conferver la faine doctrine dans fon églife, a été l'inftitution de Bou des Univerfités, qui ne prirent ce nom qu'au logne. commencement du treizième fiècle, quoique quelques-unes fuffent déjà prefque formées fous le fimple nom d'écoles. J'ai marqué dans le troi- 3. Diffième difcours, la fucceffion des écoles latines jufqu'à la fin du dixième siècle : celle de Reims étoit alors la plus fameufe; elle continua de l'être pendant tout le fiècle fuivant, & faint Bruno en fut le principal ornement. On y peut rapporter Rofcelin de Compiegne, & les deux illuftres frères Anfelme & Raoul de Laon, puifqu'ils enfeignoient dans la province de Reims.

21.

31.

L'école de Paris étoit célèbre dès la fin du HiA. L dixième fiècle, comme on voit dans la vie de LVII. n. faint Abbon de Fleuri qui y vint étudier; & peut-être le féjour de nos rois, qui en firent n. 25. alors leur capitale, ne contribua pas peu à y attirer de bons maîtres, La réputation de cette

L.

LXVI. 7. 22.

école augmenta confidérablement au commencement du douzième fiècle fous Guillaume de Champeaux, & fous fes difciples, qui enfeignèrent à faint Victor. En même temps Pierre Abailard vint à Paris, & y enfeigna avec un grand éclat les humanités & la philofophie d'Ariftote: Alberic de Reims y enfeignoit auffi, & fut le plus fameux dialectitien, quoiqu'attaché à la fecte des Nominaux dont Rofcelin fut l'auL. LXX. teur. Mais la grande lumière de l'école de Paris, fut l'évêque Pierre Lombard, fi connu par fon livre des Sentences, qu'il compofa vers le milieu du douzième fiècle. On le regarda comme le corps de théologie le plus parfait, & on le choifit pour être enfeigné publiquement par préférence à tant d'autres recueils femblables compofés vers le même temps, par Hildebert, archevêque de Tours, par le cardinal Robert Pullus, l'abbé Rupert, & Hugues de Saint

c. 34.

Ib. n. 28.

2. 18.

Victor.

Aipfi entre plufieurs compilations des canons la plus univerfellement approuvée fut celle du moine Gratien, compofée dans le même temps à Boulogne, en Italie, & fon ouvrage femble avoir rendu plus fameufe cette école, qui l'étoit déjà par l'étude des lois Romaines, renou1. LXX. velée vingt ans auparavant. Car il paroît qu'on alloit de loin les étudier en Lombardie, par l'exemple entre autres d'Arnould, évêque de Lifieux. Et en 1220, le pape Honorius témoignoit dans une bulle, que l'étude des bonnes lettres avoit rendu la ville de Boulogne célèbre Spicil.to. par tout le monde. Remarquez encore que le 2.p.336. maître des fentences étoit forti de Novarre, & Liv. qu'avant lui Lanfranc, archevêque de CantorLXXVIII. beri, étoit venu de Pavie: ce qui nous découvré en Lombardie une fuite de théologie com

n. 34.

me

me de jurifprudence. Aufli les deux plus an ciennes univerfités que je connoiffe, font celles de Paris & de Boulogne; & on les nomma univerfités d'études, pour montrer qu'elles les renfermoient toutes, & qu'en une même ville on enfeignoit tous les arts libéraux & toutes les fciences qu'il falloit auparavant aller appren

dre en divers lieux.

II. Utilité des Uni

Cette inftitution fut très-utile à l'églife. Les docteurs, affurés de trouver dans une certaine ville de l'occupation avec la récompenfe de verfités. leurs travaux, venoient volontiers s'y établir : & les étudians, affurés auffi d'y trouver de bons maîtres avec toutes les commodités de la vie, s'y rendoient en foule de toutes parts, même des pays éloignés; ainfi on venoit à Paris d'Angleterre, d'Allemagne & de tout le Nord, d'Italie & d'Efpagne. L'émulation faifoit étudier à l'envi les maîtres & les difciples; & le plus grand bien, c'eft que la doctrine fe confervoit mieux dans fa pureté : puifqu'entre plufieurs docteurs, enfeignant à la vue les uns des autres, la moindre nouveauté étoit bientôt relevée. On confervoit auffi plus facilement l'uniformité, foit pour le fond de la doctrine, foit pour la manière d'enfeigner. Tant d'écoliers de divers pays y répandoient ce qu'ils avoient puifé dans les mêmes fources; & devenus maîtres à leur tour, enfeignoient chacun chez eux ce qu'ils avoient appris à Paris.

La police des univerfités étoit un bon moyen pour affermir la tradition de la faine doctrine. Il ne dépendoit plus comme auparavant de chaque particulier d'enfeigner quand il s'en croyoit capable: il falloit être reçu maîtreès-arts ou docteur dans les facultés fupérieures; & ces titres ne s'accordoient que par degrés,

après des examens rigoureux & de longues épreuves, pour répondre au public de la capacité des maîtres. Tout le corps en étoit garant, & avoit droit de corriger celui d'entr'eux qui s'écartoit de fon devoir. Suivant le règlement donné en 1215 par le cardinal légat, RoHift. 1. bert de Courçon, pour enfeigner les arts à PaLXXVI. n. ris, il falloit être âgé de vingt-un an, & les

39.

Echard.

avoir étudiés au moins fix ans; pour enfeigner la théologie, il falloit l'avoir étudiée huit ans & en avoir trente-cinq.

Les frères Prêcheurs ayant été agrégés à l'ufum. S. niverfité de Paris dès le commencement de Thom. leur inftitut, obfervoient l'ordre fuivant pour vind. P. la promotion de leurs docteurs en théologie.

130.

Celui qui étoit nommé bachelier par le général de l'ordre ou par le chapitre, commençoit par expliquer le maître des fentences dans l'école de quelque docteur, ce qu'il faifoit pendant une année à la fin de laquelle le prieur du couvent, avec les docteurs qui profeffoient actuellement préfentoit ce bachelier au chancelier de l'église de Paris, & ils affuroient avec ferment qu'ils le jugeoient digne d'obtenir la licence, c'està-dire, la permiffion d'enfeigner comme docteur. Après quelques examens publics, & quelques autres formalités, le bachelier étoit reçu docteur, & continuoit la feconde année d'expliquer le livre des fentences dans fon école, car chaque docteur avoit la fienne. La troifième année le nouveau docteur tenoit encore fon école; mais il avoit fous lui un bachelier qui expliquoit les fentences, & qu'il préfentoit à la fin de l'année pour la licence, comme on l'avoit préfenté lui-même. Tout le cours du doctorat s'achevoit en ces trois années, fans préjudice des actes qu'il falloit foutenir de temps

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