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à la portée de tout le monde, propres à attirer l'attention & à fonder l'autorité. Il a communiqué à fes difciples ce pouvoir de faire des miracles, & d'en communiquer le pouvoir à d'autres autant de temps qu'il a jugé convenable pour établir fuffifamment l'autorité de fon églife.

Cette autorité eft le fondement de la juridiction eccléfiaftique, qui confifte à conferver la faine doctrine & les bonnes mœurs. La doctrine fe conferve en établissant des docteurs pour la perpétuer dans tous les fiècles, & en réprimant ceux qui la voudroient altérer. Or l'églife a toujours exercé ce droit, enfeignant la doctrine qu'elle a reçue de Jesus-Chrift, & ordonnant des évêques qui en font les principaux docteurs : & qui pour leur aider ont ordonné, outre les prêtres, des diacres & d'autres miniftres inférieurs : tout cela malgré l'oppofition des infidelles, & pendant les plus 1. Tim. cruelles perfécutions. Saint Paul dans fes chaînes ne laiffoit pas d'enfeigner; & la parole de Dieu comme il dit lui-même, n'étoit Hir enchaînée. Il favoit auffi réprimer & châtier les Script, in Luc. faux docteurs, comme Hymenée & Alexandre qu'il livra à Satan à caufe de leurs blafphèmes ; 'Apôtre faint Jean dépofa le prêtre qui avoit fabriqué l'hiftoire des voyages de faint Paul & de fainte Thecle.

1.20.

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pas

Comme, dans le gouvernement temporel le premier acte de juridiction eft l'inftitution des magiftrats, des juges & des miniftres de juftice; ainfi l'ordination des évêques & des clercs eft le premier acte & le plus important du gouvernement eccléfiaftique. Auffi avez-vous vu dans toute cette hiftoire, avec quelle attention, & quelle circonfpection on ordonnoit les

évêques pendant les neuf ou dix premiers fiècles j'en ai marqué le détail au fecond difcours, où j'ai relevé cette parole de faint Cy- Cypr. epi prien, qu'un évêque ordonné canoniquement 67. ad eft établi par le jugement de Dieu. L'évêque Hisp. une fois établi ordonnoit les prêtres & les autres clercs, mais avec le confentement de fon clergé & de fon peuple; & toujours pour un titre certain, c'eft-à-dire pour fervir dans une certaine églife: d'où eft venu la collation des bénéfices, depuis le partage des revenus eccléfiaftiques.

L'autre partie de la juridiction, qui tend à la confervation des bonnes mœurs, s'exerce principalement par l'adminiftration de la pénitence où le prêtre prend connoiffance des péchés comme juge, pour favoir s'il les doit remettre ou les retenir, lier ou délier le pécheur. Voyez encore ce que j'en ai dit au fecond difcours, où j'ai montré que l'églife n'impofoit que des peines médicinales, & à ceux qui les acceptoient volontairement : fe contentant de prier pour les indociles & les endurcis, qu'elle fe trouvoit quelquefois obligée à retrancher de fon corps, de peur qu'ils n'infectaffent les autres. J'ai marqué dans le troifième difcours deux abus très-nuifibles à la pénitence, la multiplication exceffive des peines canoniques & les pénitences forcées. Or je vous renvoie à ces difcours fur l'hiftoire , pour éviter les

redites.

Une autre partie de la juridiction eccléfiaftique, qu'il falloit peut-être placer la première, c'eft le droit de faire des lois & des règlemens, droit effentiel à toute fociété. Ainfi les Apôtres, en fondant les églifes, leur donnèrent des règles de difcipline, qui furent long-temps con

7. 16:

YL. 4.

fervées par la fimple tradition, & enfuite écri tes fous le nom de canons des Apôtres & de conftitutions apoftoliques. Les conciles qui fe tenoient fréquemment, faifoient auffi de temps en temps quelques règlemens ; & c'eft ce que nous appelons les canons du mot grec qui fignifie règle.

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11. Comme un des devoirs des évêques étoit Arbitra de conferver l'union & la charité entre les fige des delles ils avoient grand foin d'apaifer les Evêques. querelles, & de terminer ou prévenir les différents du moins ils exhortoient ceux qui leur étoient foumis, à les régler entre eux à l'amiable, fans plaider devant les juges ordinaires qui étoient païens. Saint Paul en fait un grand 1. Cor. reproche aux Corinthiens; & dit, que les plus méprifables d'entr'eux ne font que trop bons pour juger leurs affaires temporelles, tant ils doivent faire peu de cas de ces fortes d'affaires; & prendre garde de ne pas fcandalifer les Païens, en plaidant pour de petits intérêts comme les autres hommes. Vous avez déjà tort, continue l'Apôtre, d'avoir des procès: que ne fouffrez-vous plutôt l'injuftice & la fraude? & là-deffus il leur fait une puiflante exhortation touchant le défintéressement & l'éloignement de l'avarice. Ainfi quand JefusChrift refufa d'être arbitre entre les deux frères ilen prit occafion d'inftruire le peuple sur le mépris des biens temporels.

Y. 7.

Lib. 11.

4.47.

Or quoique, felon faint Paul, les moindres des laïques puffent être pris pour arbitres de leurs frères, c'étoit toutefois l'évêque qu'ils choififfoient ordinairement, comme leur père commun; & l'on voit la forme de ces jugemens charitables dans le livre de constitutions apostoliques, écrit avant la fin des perfécutions.

L'évêque étoit affis au milieu des prêtres comme un magiftrat affifté de fes confeillers : les diacres étoient debout, comme fervant d'appariteurs, ou miniftres de juftice; les parties fe préfentoient en perfonne, & s'expliquoient par leur bouche. L'affaire étoit examinée fimplement & de bonne foi, fans formalités rigoureufes, & décidée fuivant la loi de Dieu, c'est-à-dire les faintes écritures. Le juge avoit égard à la qualité des parties, principalement à leurs inceurs, pour ne donner lieu ni à la calomnie ni à la chicane ; & non content de juger l'affaire au fonds en déclarant ce qui étoit jufte, il s'efforçoit d'en perfuader les parties, les faire acquiefcer à fon jugement, les réconcilier parfaitement, & les guérir de toute aigreur & de toute animofité. C'eft pourquoi l'audience de l'évêque fe tenoit 1. Tim.. le lundi, afin que les parties euffent le refte 11. 8. de la femaine pour calmer les paflions ; & que, le dimanche fuivant, ils puffent dans leurs prières lever à Dieu des mains pures, comme dit l'Apôtre.

Les affaires plus importantes, comme les III. plaintes contre les évêques mêmes, fe jugeoient Conciles, dans les conciles provinciaux qui fe tenoient régulièrement deux fois l'an, à moins que la perfécution ouverte ne l'empêchât; & audeffus de ces conciles, il n'y avoit point de tribunal ordinaire. Saint Cyprien, parlant des ep. 19. Chrétiens qui étoient tombés dans la perfécution, dit qu'ils attendent la paix publique de l'églife, afin que, dans une affemblée de plufieurs évêques, nous puiflions tout régler d'un commun avis. Le concile de Nicée tenu au Can. 5 commencement de la liberté de l'églife, ordonne deux conciles par an; ce qui femble montrer

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Tit. 111.

10.

que c'étoit déjà la coutume de les tenir fré quemment.

Telle est donc la juridiction efféntielle à l'églife, comme elle l'a reçue de Jesus-Chrift; Te foutenant par elle-même, fans aucun fecours de la puiffance féculière, & fe contenant dans fes bornes, fans rien entreprendre fur le temporel. Elle fe conferva dans cette pureté pendant les trois premiers fiècles fous les empereurs païens ; & jamais l'églife ne fut plus forte ni plus heureufe, c'est-à-dire plus floriffante en toutes fortes de vertus, qui eft l'unique bien que Jefus-Chrift lui a promis en cette vie. Les fondemens de cette Juridiction étoient l'autorité des pafteurs & la foi des peuples. Les pafteurs s'attiroient du refpect par leur doctrine & leurs vertus : les peuples ne connoiffoient point de plus grand mal en cette vie, que d'être retranchés de l'églife & privés de la communion des faints. S'ils n'en étoient pas touchés, rien ne les empêchoit de retourner au paganifme: mais tant qu'ils demeuroient chrétiens, rien ne leur étoit plus précieux que la grâce de Dieu & l'espérance des biens éternels.

Ce fut par cette autorité purement fpirituelle, que l'églife combattit & réprima tant d'héréfies, qui s'élevèrent dans les premiers fiècles: les Nicolaïtes, les Gnoftiques de diverfes fortes, les Ebionites, les Valentiniens, les Encratites, les Marcionites. On n'employa contre eux que l'inftruction, les conférences charitables ; & une fermeté invincible à n'avoir aucun commerce avec les incorrigibles, fuivant le précepte de faint Paul.

Or, encore que l'église n'eût pas befoin de la puiflance temporelle pour l'exercice de fa

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