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ricorde, & effacez mon péché par la multitude de vos bontés. Et ainfi, prefque dans tous les pfeaumes; foit qu'ils le fiffent pour donner plus de temps à l'efprit de goûter la même penfée, foit parce que ces cantiques fe chantoient à deux choeurs. Ces répétitions font la marque la plus ordinaire du ftyle poëtique. Il y a quelques poëmes qui font acroftiches c'est-à-dire, dont les verfets commencent par les lettres de Pfeau l'alphabet; tels font le pfeaume 33, le pfeaume 24. 118, la femme forte de Salomon, les lamen33. 36. 110.111. tations de Jérémie peut-être le faifoient-ils 118. & pour aider la mémoire.

mes

144.

V.

beauté du

Il y a une raifon particulière pour le pfeaume 118, que comme il ne contient qu'une feule fentence exprimée en une infinité de manières différentes, il importoit peu en quel ordre ces expreffions fuffent rangées. Mais il eft temps de prouver tout ceci par des exemples.

On voit un deffein très-bien fuivi dans le Exem- pfeaume 17, qui eft une action de grâce de ples de la David, après que Dieu l'eût délivré de tous deffein. fes ennemis. D'abord il propose fon dessein. 2. Diligam H repréfente fon affliction. 3. Sa prière. 4. te, &c. Comme Dieu l'a exaucée. 5. Comme il a ré

folu de le fecourir, où il exprime poëtiquement la puiflance de Dieu par l'ébranlement de toute la nature. 6. Comment Dieu a défait fes ennemis. 7. Comment il a délivré David. 8. Pourquoi il l'a fait à caufe de la vertu & de la juftice de David. 9. L'heureux état où il l'a mis. 10. L'avantage qu'il a fur fes ennemis, & leur misère. 11. Les grâces qu'il espère encore. 12. Il conclut par la louange comme il a commencé. Ce pleaume contient tout cela précisément dans le même ordre; & cette

fuite me paroît très-belle, de marquer qu'il étoit affligé, qu'il a prié ; que Dieu l'a fecouru; que fes ennemis ont été défaits ; qu'il a été nonfeulement délivré, mais mis au deffus, & qu'il a ruiné à son tour fes perfécuteurs. On voit encore beaucoup de deffein dans les cinq pleaumes qui font depuis le 102 jufques au 107; & même tous ensemble ils font une fort belle fuite de cantiques d'actions de grâce. Le 102, font les louanges de Dieu pour les biens de la grâce, pour le bonheur qu'il nous prépare, pour fa miféricorde envers les pécheurs. Le 103, le bénit pour les biens temporels, par une magnifique defcription de toute la nature. Le 104, des biens qu'il a fait à fon peuple; & c'est un abrégé de toutes les grâces que Dieu a faites aux hébreux depuis la vocation d'Abraham jufques à leur établissement en la terre promife. Le 105, le remercie de fes miféricordes, par le récit de toutes les révoltes & des principaux péchés de fon peuple, depuis fon établissement jufques au temps de David ou des dernières captivités: ainfi c'est la continuation de l'histoire précédente, mais dans un autre deffein. Le 106 remercie Dieu au nom de tous les hommes, du fecours qu'il leur donne dans quatre des plus grandes afflictions de la vie; la famine, la captivité, la maladie, le naufrage: chacune des quatre parties eft marquée fi nettement par des conclufions fi femblables, qu'il eft impoffible de douter du def fein. Il eft à remarquer fur les pfeaumes, comme le 04, le 105, le 77, & quelques autres, que la narration y eft très-différente de celle des histoires; on n'y marque que les principaux endroits, les plus importans, & les plus illuftres, & s'il fe préfente quelque circonftance Q

:

qui donne jeu à la poéfie, le Prophète ne manque pas de la relever. Voici l'histoire de Jofeph, dans le pfeaume 104. Dieu appela la famine fur la terre, il brifa tous les appuis de la nourriture, il envoya devant eux, (c'est les enfans de Jacob dont il a parlé :) un homme (c'eft Jofeph) fut vendu comme un esclave. Remarquez la grandeur de cette narration, qui remonte d'abord aux deffeins de Dieu; & la beauté de la figure. Dieu commande à la famine vous diriez qu'il lui parle comme à une perfonne. Je ne trouve print d'expreffions en notre langue pour rendre ce qui fuit. L'Ecriture & en ce lieu & en d'autres, compare le pain, c'est-à dire, la nourriture, à un bâton fur lequel un homme foible s'appuie pour marcher; de forte qu'ôter le pain aux hommes, c'est ôter à un vieillard ou un malade le bâton qui le foutient mais au lieu de toutes ces circonlocutions, l'Ecriture dit hardiment, & fa langue le fouffre, que la famine rompt le bâton de notre pain : voilà de les métaphores. Enfuite le pfeaume vous repréfente Jofeph chargé de fers, pour vous peindre en un mot fa prilon; & revient auffitôt à Dieu, qui le délivre par fa parole & par fa fageffe dont il l'anime. Et en effet le Roi envoie le délivrer : le Prince du peuple le met en liberté, il le fait Seigneur de fa maifon, & gouverneur de tous les biens, afin qu'il rendit fes princes favans, comme il l'étoit lui-même, & qu'il apprit la prudence aux vieillards, c'est àdire, aux plus fages de fon état. Voilà toute l'hiftoire de Jofeph, sa captivité, fa délivrance, fa puiffance, & tout cela par ordre de Dieu. On voit de cette efpèce de narration dans Virgile lorfqu'il repréfente fur le bouclier d'Enée les plus beaux endroits de l'hiftoire Romaine.

VI. Exem

beauté des pen

ées.

Si l'on veut voir de la hauteur & de la délicateffe dans les pensées : Seigneur, vous me fondez & me connoiffer: vous connoiffer mon repos & ples de la mon action: car s'affeoir, fignifie fe repofer; & fe lever, fe difpofer à l'action; & c'eft ainfi qu'il dit dans un autre Pleau ne: Levez-vous, après que vous aurez été affis, c'est-à-dire, repofezvous, & puis vous agirez. Dieu connoît donc l'action extérieure? Ce n'eft pas affez: Vous comprenez mes perfées, & même de loin. Vous découvrez ma conduite & mes deffeins. Bien plus Vous prévoyez toutes mes voies, ma conduite, mes allions, quoique je ne parle point; oui, Seigneur, yous connoiffez toutes chofes nouvelles & anciennes, le futur & le paffé. Et revenant au particulier : Vous m'avez formé, & vous tenez fur moi votre main pour me conferver & me conduire votre fcience eft fi admirable pour moi & fi grande, que je ne puis y atteindre. Puis changeant de figure tout d'un coup, il s'écrie: Ou irai-je pour me dérober à votre Efprit, où fuirai je de devant vous? Il prend toute l'étendue du monde fuivant toutes les dimenfions : Si je monte au ciel, vous y étes. Si je defcens aux enfers je vous y trouve. Autre figure encore plus riche: Quand je prendrois des ailes, & que je partirois dès le grand matin pour m'al ler loger au-delà des mers qui bornent le mon de, ou fuivant l'Hébreu, quand j'emprunterois les ailes de l'aurore pour voler comme elle en un moment jufques à l'extrémité des

mers

ne dit pas fimplement, tout cela feroit inutile,;
ou bien comme au verfet précédent, je vous ve
y trouverois mais par une expreffion bien plus.
favante & bien plus délicate, comme
homme qui s'accuferoit de fottife, de vouloir
fe cacher de Dieu: Bien-loin de me dérober à

Q &

un

VII.

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vous, c'est vous qui me foutenez & qui me pori tez dans ma fuite même : quelque chimère que je me figure, je ne puis m'imaginer de pouvoir fubfifter fans vous : quand je pourrois voler comme j'ai dit, ce feroit votre main qui me conduiroit, & vous me tiendriez de votre droite. Il femble qu'il a épuifé fon imagination; mais voici encore une idée plus creufe d'un moyen de fe cacher à Dieu : Je dis en moi-même: Peutêtre les ténèbres me pourroient couvrir, & je ferai mes délices de la nuit comme un autre de la lumière mais je fuis encore un infenfe; les ténèbres ne font point ténèbres pour vous; la nuit à votre égard eft éclairée comme le jour : les ténèbres de l'une font comme la lumière de l'autre. Que les beaux efprits modernes viennent après cela traiter de groffiers nos bons labou reurs de Palestine, & qu'ils nous trouvent dans les auteurs profanes des penfées plus hautes plus fines & mieux tournées, fans parler de la profonde théologie & de la folide piété que renferment ces paroles. Le refte du Pleaume contient encore des réflexion's admirables fur la formation de l'homme dans le fein de fa mère, & fur la prédeftination; d'où le Prophète prend occafion de marquer fon refpect pour les Saints, & fon mépris pour les pécheurs. La poéfie lyrique fouffre beaucoup de digreffions, & même elle les demande, fi l'on en juge par les exemples d'Horace & de Pindare.

La variété des figures toutefois fe trouve Exemple par-tout plus dans les Pleaumes de prière ou de la va d'exhortation, que dans ceux de narration. riété des Dans le Pfeaume 90, un de ceux qui nous figures. font les plus familiers, d'abord c'eft le poëte qui parle pour propofer fon deffein qui eft d'expliquer la protection de Dieu envers les

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