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VIII. PARTIE.

I. SECTION.

СНАРI TRE III.

Règles générales de fufpicion, & règles générales fausses ou infufifantes.

CE

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Es règles ont pour base les propofitions, ou lemmes fuivans. Si l'on ne s'amufe pas à prouver en détail ces propofitions; ce n'est pas qu'on ne pût aisément les démontrer. Mais outre qu'elles ont prefque la clarté des axiomes, nous croyons qu'il fufit d'indiquer en marge les principes fur lefquels elles font apuyées. Ces indications, dont nous ferons fouvent ufage pour abréger, font dans le fond équivalentes à des démonstrations. 1. La conjecture eft fufceptible de plus ou de moins de vraidéfinition 3.&l'a- semblances & de probabilités, fuivant que fes motifs font plus ou moins nombreux, plus ou moins folides.

Démontrée par la

xiome 12.

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Honoré de Sain

fur les règles de la

2. Le foupçon eft fufceptible d'une infinité de dégrés, comme la conjecture dont il eft une efpèce.

3. La conjecture doit balancer l'autorité, lorfque celle-là eft très-forte & très-probable, & celle-ci peu vraisemblable & chancelante, foit parceque l'auteur n'eft pas digne de foi, foit parcequ'il n'eft, ni contemporain, ni prefque contemporain, & d'ailleurs il n'a pas eu des mémoires furs.

que

4. Mais quand il arive qu'un fait eft fufifamment atesté par te-Marie, Réflex. » le témoignage d'un auteur qui a quelque autorité, qui s'excritiq. t.2.p. 298. " plique clairement.... qui n'eft point contredit d'autres écrivains, & qu'on ne peut convaincre de s'être trompé ; pour » lors l'autorité doit l'emporter fur la conjecture. «

Par l'axiome 13.99 & la propof. précédente.

Par les définit. 7.& 11.

Mém. de l'Aca

رو

par

5. Un fait devient douteux, quand il eft combatu par des conjectures extrêmement fortes, qui ne peuvent être, ni détruites, ni afoiblies.

6. » Un fait établi par un auteur prefque contemporain, ne dém. des Infcript. fauroit être détruit par le filence des autres. Il faudroit, con» tinue M. le Baron de la Bastie, en trouver quelqu'un, ou an» térieur, ou du même tems, qui dît précisément le contraire. «<

tom. 15. p. 110.

7. C'eft

7. C'est un excès de la critique de traiter de faux un fait qui n'est que douteux, ou de donner pour fupofé un diplome dont VIII. PARTIE. la foi eft fimplement fufpecte.

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Obfervation. Un académicien célèbre nous ofre des réflexions qui peuvent ici trouver leur place, quoique faites sur un fujet fort diférent. » La communication, dit-il, de l'Orinoque » & de l'Amazone récemment avérée, peut d'autant plus paffer » pour une découverte en géographie, que quoique la jonction » de ces deux fleuves foit marquée fans aucune équivoque fur » les anciennes cartes, tous les géographes modernes l'avoient fuprimée dans les nouvelles comme de concert, & qu'elle étoit » traitée de chimérique par ceux qui fembloient devoir être mieux informés de fa réalité. Ce n'eft pas probablement la première fois que les vraisemblances & les conjectures pure»ment plausibles l'ont emporté fur des faits atestés par des relations de voyages, & que l'efprit de critique pouffé trop loin, » a fait nier décifivement ce dont il étoit feulement permis » de douter. "

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Corollaire 1. Un fait vrai eft quelquefois regardé comme faux par ceux qui devroient en être les mieux inftruits.

Corollaire 11. Les conjectures même plaufibles ne doivent point l'emporter fur des faits ateftés.

8. En matière de faits, toutes chofes égales, l'auteur connu doit être préféré à l'anonyme, l'eccléfiaftique ou le religieux au laïque, l'homme en place au fimple particulier, le contemporain à celui qui n'a vécu qu'après les événemens qu'il raporte.

REGLES. I. Il ne faut fufpecter aucun livre, ou manufcrit de fupofition ou d'imposture, fi l'on n'est apuyé sur un témoignage irrépréhensible, ou fur une raifon légitime.

Preuve. C'est une vérité reconnue & confirmée par le P. Germon (1) lui-même.

Corollaire 1. On ne doit pas non plus fufpecter un fait con tenu dans les chartes, ni les chartes elles-mêmes, fans une autorité, ou une raifon légitime.

Corollaire 11. Les fimples foupçons n'ont aucune force contre

(1) Demonftravimus nulli libro'aut textui intentandam effe accufationem falfi, aur etiam fufpicionem afpergendam fine idoneo tefte aut legitima ratione. De veter. hæret. P. 609.

Tome VI.

Graviter quoque peccat qui receptum à majoribus tanquam genuinum opus aliquod aut fine idonea probatione accufat falfi aut fine legitima caufa fufpectum habet. Ibid. p. 361.

Sf

I. SECTION.
CHAP. III.
ART. I.

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VIII. PARTIE.
1. SECTION.
CHAP. III.
ART. I.

Démontrée par la définition 5.& les

corollaires 1. 2.

3. 6.

les chartes, ni contre les faits qu'elles renferment.

II. Le témoignage d'un homme digne de foi, défintéresse, & d'ailleurs contemporain, qui affureroit qu'un livre, ou qu'un titre auroit été corompu ou fupofé, rendroit ce livre, ou ce titre très-fufpect; mais il ne le convaincroit pas toujours de faux.

Preuve. En matière de fait, tout homme peut fe tromper. Ainfi le feul témoignage d'un homme n'eft pas absolument décifif, à moins qu'il ne prouve ce qu'il avance, ou que le fait ne foit de telle nature, qu'il n'ait pu s'y tromper; qu'il n'ait eu nul intérêt de tromper, ou que malgré cet intérêt, il ne foit pas fufpect de l'avoir voulu. L'autorité d'un tel homme fufiroit néanmoins, par la 3. propofition, pour rendre un livre ou un titre très-fufpect, fi l'on n'y opofoit des contredits très-forts, apuyés fur des faits capables de lever tout foupçon.

III. On a beau multiplier les fimples foupçons contre un titre ou un fait bien atefté; ils ne doivent répandre aucun doute contre la certitude de ce titre ou de ce fait.

Preuve. Il n'eft point de vérité, en fait d'histoire & de monumens, qu'on ne puiffe ataquer par des poffibilités métaphyfiques fans nombre. Sur cela, l'efprit de l'homme eft intariffable. Elles ne peuvent donc fervir au difcernement du vrai & du faux. Elles doivent donc être comptées pour rien, auffibien que tout jugement qui n'a pas d'autre apui. Il y a plus, des poffibilités toutes pures, font ou peuvent toujours être com+ batues par des poffibilités. contraires. Elles font donc inutiles, puifqu'elles font toujours détruites, ou qu'elles le peuvent être. Si elles ne le font pas, ce n'est jamais par impoffibilité du côté de la chofe; mais parcequ'on les méprife, ou qu'on néglige de les combatre, ou qu'on manque de fécondité d'efprit pour le faire.

Corollaire. Tout argument de pure poffibilité contre la vé sité des titres, doit être rejetté comme abfurde, & tendant au renversement de la fociété humaine.

Par les défini- IV. Le moyen de faux prouvé, fait condamner la pièce & tions 8. 9. 11. 7. fon auteur. Le foupçon violent invalide la première, & rend 6. 10. & les règles nulle la preuve qu'on en tire. Le foupçon légitime donne de faulleté 8. 9. ateinte à celle-là, & rend incomplete celle-ci, fuposé néan

moins que ces moyens ne foient pas détruits.

Preuve. Le moyen de faux juftifié, entraîne évidemment

I. SECTION.
CHAP. III.

ART. I.

la condamnation de la pièce. Le foupçon violent non détruit, n'eft pas moins éficace pour l'invalider. Car il fait voir, fui- VIII.PARTIE. vant la définition, qu'il eft plus probable, ou du moins auffi probable, qu'une pièce foit fauffe que vraie. Or, dès qu'il est également douteux, fi une pièce eft faufse ou vraie, elle ne doit conftamment plus faire preuve. Elle devient donc inutile, égale à zéro, & conféquemment invalide & nulle. Le foupçon légitime fur la vérité d'une pièce, prouve qu'il est moralement poffible qu'elle foit fauffe, quoiqu'il demeure plus probable qu'elle foit vraie. Ainfi, bien qu'il n'anéantiffe pas la preuve qu'on en tire, il ne laiffe pas de l'infirmer. Mais il n'apartient tout au plus qu'au foupçon violent de dépouiller un titre de l'autorité atachée à fa nature, & qu'au moyen de faux de la dégrader comme fauffe, & de flétrir fon auteur.

Corollaire 1. Une pièce légitimement, mais non violemment fufpectée, ne perd point toute fon autorité.

Corollaire 11. On peut tirer des argumens probables d'un diplome, contre lequel il y auroit plufieurs foupçons qui n'iroient pas jusqu'à le rendre douteux.

Corollaire 111. Une pièce qui foufriroit des dificultés, ajoutée à des pièces, ou à des raifons inconteftables, dans l'égalité de preuves, pouroit faire pencher la balance.

Corollaire IV. Comme dans les afaires purement civiles, au défaut de preuves évidentes, on s'en tient fouvent à la plus grande probabilité; on pouroit juger quelquefois, conformément à une pièce, à laquelle on opoferoit un ou plufieurs foupçons légitimes, infufifans pour la rendre nulle & douteuse, mais qui cependant ne pouroient pas être détruits.

V. De nouvelles preuves peuvent élever le fimple foupçon à l'état de foupçon légitime, le légitime à celui de violent, & ce dernier jufqu'au moyen de faux.

que

Démonftration. Par la 1. & 5. propofition, le foupçon est fufceptible d'une infinité de dégrés. Il peut donc croître à l'infini. Ainfi le fimple foupçon, qui d'abord n'étoit fondé fur de pures poffibilités, deviendra légitime, lorsqu'on poura l'apuyer fur l'inobfervation d'ufages conftans aux termes de la 6. définition. Il fera violent, lorfqu'il ira jufqu'à rendre une pièce plus ou moins douteuse, fuivant la 7o. définition. Il ateindra jufqu'au moyen de faux, lorfque fuivant la définition 8. il convaincra une charte de fupofition, par l'impoffibilité morale

VIII, PARTIE.

qu'elle foit vraie dans les circonftances où elle fe trouve. VI. Le moyen de faux peut, par de bonnes réponses, être CHAP. III. réduit an foupçon violent, le violent au légitime, le légiti me au fimple foupçon, c'est-à-dire, à rien..

1. SECTION,

ART. I.

Obfervation. Cette règle n'eft que l'inverfe de la précédente. On fupofe que le moyen de faux n'eft tout au plus démontré qu'en aparence, & non pas réellement. Il en eft de même des foupçons, felon leurs diférens dégrés.

VII. Plufieurs foupçons légitimes fe réuniffant contre une pièce, forment quelquefois un foupçon extrêmement fort, qui lui fait perdre toute autorité.

Démonftration. Le foupçon violent rend, felon la 4. règle, un titre invalide & de nul ufage. Il lui fait donc perdre toute fon autorité. Or, fuivant la 5. règle, un foupçon légitime peut devenir violent; & il le devient auffi-bien, par la réunion des foupçons légitimes, concourant à un même but, que par de nouveaux motifs de fufpicion, enchérissant sur les précédens. On conçoit que plufieurs foupçons légitimes doivent produire plus d'éfet qu'un feul qui leur feroit égal. Ils peuvent donc être portés à un dégré fufifant, pour rendre la vérité d'une pièce abfolument incertaine; c'est-à-dire, qu'ils feront tranf formés en foupçon violent. Donc plufieurs, &c. Néanmoins comme un motif de fufpicion ajouté à un autre, ne rend pas toujours une pièce doureuse; de même un nouveau. foupçon légitime, ajouté à un pareil foupçon, ne la rend pas toujours invalide.

Corollaire. Pour que le foupçon légitime foit transformé en foupçon violent, il faut ou que fes motifs fe fortifient & deviennent plus preffans, ou que de nouveaux foupçons légitimes, acumulés les uns, fur les autres, produisent le même éfet.

VIII. Le foupçon légitime ne fauroit être détruit, fi l'on ne peut montrer d'exception formelle, & dans l'efpace d'environ un fiècle, à l'ufage fur lequel ce foupçon eft fondé, ou fi l'on ne prouve pas démonftrativement vis-à-vis d'une pièce originale & authentique la poffibilité morale de cette exception.

Démonftration. Le foupçon légitime par la définition 6. eft fondé fur l'inobfervation d'ufages conftans, ou s'il s'agit d'ori ginaux, fur ce que la poffibilité morale de la vérité de ces. pièces, n'eft pas évidemment prouvée. Donc le. foupçon lé

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