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Feuvent revenir fur la terre après nôtre ma
jufqu'à ce que Dieu en ait fait des Anges.

Mais pour mieux l'établir encore, il faut
pondre aux plus fortes objections de ceux qui
combattent. Ils rapportent le fentiment des Ju
qu'ils prétendent prouver par le témoignage.
Jofeph, & des Rabins. Les paroles de J. C.al
Apôtres, lorfqu'il leur apparut après fa Refant
tion. L'autorité du Concile (4) Eliberitain. Qu
ques paffages de S. Jerôme dans fon traité contr
Vigilance. Des Arrêts rendus en differens Park
mens, par lefquels les Baux de plufieurs mailo
ont été réfolus,à caufe des efprits qui y revenoie
journellement, & tourmentoient les Locataires
Enfin un nombre infini d'exemples qui font ré
pandus dans toutes les Hiftoires.

Pour détruire en peu de mots toutes ces auto-
rités, je dis d'abord qu'on ne peut pas conclur
que les Juifs cruffent le retour des Ames aprèsh
mort, de ce que Jofeph affure, que l'Esprit que
la Pythoniffe fit apparoître à Salil, étoit le vei
table Efprit de Samuel: car outre que la fainteté
de ce Prophete l'avoit mis au nombre des bienheu
reux, il y a dans cette apparition des circonftan
ces, qui font que la plupart des faints Docteurs
ont douté que ce fût l'Efprit de Samuel : croyant
que ce pouvoit être un preftige, dont la Pytho
niffe trompoit Saül, & lui faifoit croire qu'il voyoit
ce qu'il avoit envie de voir.

Ce que plufieurs Rabins rapportent des Pa
triarches, des Prophetes, & des Rois, qu'ils ont
vûs fur la montagne de Gerizim, ne prouve pas
non plus que les Juifs cruffent ique les Ames des

(d) C'eft ce qu'on appel- | Grenade. D'autres ont cru
le Concile d'Elvire, Illiberis, que c'étoit Collicure en
affen.blé vers l'an 305 ou Roufillon mais a tort.
313. dans le Royaume de l

morts

- morts pouvoient revenir; puis qu'outre que ce n'étoit qu'une vifion procédant de l'Efprit extafé, qui croyoit voir ce qu'il ne voyoit pas véritablement, tous ceux qui compofoient cette apparition étoient des perfonnes de la fainteté defquels les Juifs étoient perfuadés. Ce que dit J. C. à fes Apôtres, que les Efprits n'ont ni chair, ni os, de faire croire que les Efprits puiffent revenir, prouve au contraire évidemment qu'ils ne peuvent fans miracle fe rendre fenfibles aux hommes:

loin

puis qu'il faut abfolument une fubftance corporelle, & des organes pour fe faire entendre. Ce qui ne convient point aux Ames, qui étant des fubftances pures, exemtes de toute matiére, font invifibles, & ne peuvent naturellement être foûmifes à nos fens.

Le Concile Provincial Eliberitain tenu en Ef pagne fous le Pontificat de Sylveftre premier, lequel défend d'allumer de jour des Cierges dans le Cimetiere des Martyrs, ajoûtant pour raifon qu'il ne faut pas inquiéter les Efprits des Saints, n'eft d'aucune confidération : parce que, outre que ces paroles font fujettes à differentes interprétations, & peuvent même avoir été inferée par un Copiste, comme le croyent quelques Sçavans, elles ne regardent que les Martyrs, dont on ne peut pas douter que les Ames ne foient bienheureuses.

Je réponds la même chose aux paffages de S. Jerôme: parceque combatant l'Herefiarque Vigi lance, qui traitoit d'illufions tous les miracles qui fe faifoient aux tombeaux des Martyrs, il s'éforce de lui prouver que les Saints qui font dans le Ciel, prennent toûjours part aux mifetes des hommes, & leur apparoiffent même quelquefois visiblement, pour les fortifier & les confoler.

Pour ce qui eft des Arrêts qui ont annullé les Baux de plufieurs Maifons,à caufe des incommodi

rés que les Efprits y caufoient aux Locataires; i fuffit d'examiner les moyens & les raifons fur lef quelles ils ont été obtenus, pour comprendre, ou que les Juges ont été induits en erreur par les préjugés de leur enfance, ou que, comme il font obligés de déferer aux preuves qui font produites, fouvent même contre leurs propres con noiffances, ils ont été trompés par l'impofture, ou par la fimplicité des témoins.

A l'égard des apparitions dont toutes les Hif toires font remplies, une des plus fortes qu'on me puifle objecter,& à laquelle je me crois le plus obligé de répondre, eft celle qu'on prétend être arrivée à Paris dans le dernier fiécle, dont on cite plus de cinq cens témoins qui ont examiné la vé rité du fait avec une attention particuliere. Voici l'Avanture telle que la rapportent ceux qui ont écrit dans le temps qu'elle s'eft paflée.

Le Marquis de Rambouillet (e) frere aîné de Madame la Ducheffe de Montauzier, & le Marquis de Précy, aîné de la maifon de Nantoüiller, tous deux âgés de 25 à 30, étoient intimes amis, & alloient à la guerre, comme y vont en France toutes les perfonnes de qualité. Comme ils s'enIretenoient un jour enfemble des affaires de l'autre monde, après plufieurs difcours qui témoi gnoient affez qu'ils n'étoient pas trop perfuadés de tout ce qui s'en dit, ils fe promirent l'un à l'autre, que le premier qui mourroit, en viendroit apporter des nouvelles à fon compagnon. Au bout de trois mois, le Marquis de Rambouillet partit pour la Flandres, où la guerre étoit pour fors, & de Précy arrêté par une groffe fiévre demeura à Paris. Six femaines après de Précy entendit fur les fix heures du matin tirer les rideaux de () Voye ci-deffus page rapportée; mais trop fury 37. pù cette avanture cft cinctement,

dui

on lit, & fe tournant pour voir qui c'étoit, il =pperçût le Marquis de Rambouillet en bufle & en bottes. Il fortit de fon lit, & voulut fauter à on col, pour lui témoignerda joye qu'il avoit de on retour; mais Rambouillet reculant quelques Pas en arriere, lui dit que ces careffes n'étoient lus de faifon, qu'il ne venoit que pour s'acquitter He la parole qu'il lui avoit donnée, qu'il avoit été tué la veille en telle occafion; que tout ce que l'on difoit de l'autre monde étoit très-certain, qu'il devoit fonger à vivre d'une autre maniere, & qu'il n'avoit point de temps à perdre, parcequ'il feroit tué dans la premiere occafion, où il fe trouveroit. On ne peut exprimer la furprife out fut le Marquis de Précy à ce difcours : ne pouvant croire ce qu'il entendoit, il fit de nouveaux efforts pour embraffer fon ami, qu'il croyoit le vouloir abufer: mais il n'embraffa que du vent; & Rambouillet voyant qu'il étoit incredule, montra l'endroit où il avoit reçû le coup, qui étoit dans les reins, d'où le fang paroiffoit encore couler. Après cela le phantôme difparut, & laiffa de Précy dans une frayeur plus aifée à com. prendre qu'à décrire. Il appella en même temps fon Valet de Chambre, & réveilla toute la maison par fes cris. Plufieurs perfonnes accoururent, à qui il conta ce qu'il venoit de voir : tout le monde attribua cette vifion à l'ardeur de sa fièvre, qui pouvoit alterer fon imagination. On le pria de fe recoucher, lui remontrant qu'il faloit qu'il eût rêvé ce qu'il difoit. Le Marquis au défespoir de voir qu'on le prenoit pour un vifionnaire, racon. La toutes les circonstances que je viens de dire: mais il eut beau protefter qu'il avoit yû & entendu fon ami en veillant, on demeura toûjours dans la même penfée, jufqu'à l'arrivée de la Pofte de Flandres, par laquelle on apprit la mort du Marquis de

Rambouillet. Cette premiere circonflance s'étant trouvée véritable, & de la maniere que 'avoit dit Précy, ceux à qui il avoit conté l'avanture commencerent à croire qu'il en pouvoit être quelque chofe, parceque Rambouillet ayant été tué précisément la veille du jour qu'il l'avoit dit, il étoit impoffible qu'il l'eût appris naturellement. Cet évenement s'étant répandu dans Paris, on crut que c'étoit l'effet d'une imagination troublée, ou un conte fait à plaifir: & quoi que puffent dire le perfonnes qui examinoient la chofe férieufement, il resta toûjours dans les Efprits un foupçon, qu'il n'y avoit que le temps qui pût diffiper. Cela dépendoit de ce qui arriveroit au Marquis de Précy, lequel étoit menacé de périr à la premiere occafion. Ainfi chacun regardoit fon fort comme le dénouement de la piece; mais il confirma bien-tôt tout ce dont on doutoit: car dès qu'il fût guéri de fa maladie, les guerres civiles étant furvenues, il voulut aller au combat de S. Antoine, quoique fon pere & fa mere, qui craignoient la prophétie, diffent tout ce qu'i's purent pour l'en empêcher: il y fut tué au grand regret de toute fa famille.

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En fuppofant la vérité de toutes les circonftances de ce fait; voici ce que je dirai, pour détruire les conféqueces qu'on en veut tirer.

Il n'eft pas difficile de comprendre que l'ima gination du Marquis de Précy échauffée par la fiévre, & troublée par le fouvenir de la promeffe que le Marquis de Rambouillet & lui s'étoient faite,ne lui ait répréfenté le phantome de fon ami, qu'il fçavoir qui étoit aux coups, & à tout moment en danger d'être tué. Les circonstances de la bleffure du Marquis de Rambouillet, & la prédiction de la mort de Précy, qui fe trouva accomplic, ont quelque chofe de plus grave; ce

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