PREFACE.

De la Differtation fur les Apparitions des Anges, des Démons, & des Efprits, & fur certains effets qui paroiffent furnaturels,

L

E grand nombre d'Auteurs qui ont écrit fur les Apparitions des Anges, des Démons, & des ames féparées du corps, ne m'eft pas inconnu, & je ne préfume pas affés de ma capacité, pour croire que j'y réuffirai mieux qu'ils n'ont fait, & que j'enchérirai fur leurs lumieres & fur leurs découvertes. Je fens bien que je m'expofe à la critique, & peutêtre à la rifée de bien des Lecteurs qui regardent cette matiere comme ufée & comme décriée dans l'efprit des Philofophes, des Savans, & de plufieurs Théologiens. Je ne dois pas

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compter fur l'approbation du peuple que fon peu de difcernement empêch d'être un juge compétent dans cett matiere. Mon but n'eft pas de fomen ter la fuperftition, ni d'entretenir l vaine crédulité des Vifionaires & d ceux qui croient fans examen ce qu'on leur raconte, dès qu'ils y trou vent du merveilleux & du furnature] Je n'écris donc que pour des Efprit raifonnables & non prévenus, qu examinent les chofes férieusement & de fang froid; je ne parle que pou ceux qui ne donnent leur confente ment aux vérités connues, qu'ave maturité, qui favent douter dans le chofes incertaines, fufpendre leu jugement dans les chofe douteufes & nier ce qui eft manifeftement faux Pour les prétendus efprits forts, qu rejettent tout pour fe diftinguer & pour fe mettre au deffus du commun Je les laiffe dans la fphere de leur éle vation; ils penferont de mon Ouvra ge ce qu'ils jugeront à propos, & comme il n'eft pas fait pour eux, ap

paramment ils ne prendront pas la peine de le lire.

Je l'ai entrepris pour ma propre inftruction & pour me former à moimême une jufte idée de tout ce qu'on dit fur les Apparitions des Anges, des Démons & des ames féparées du corps. J'ai voulu voir jufques à quel point cette matiere étoit certaine ou incertaine; vraye, ou fauffe; connue, ou inconnue; claire, ou obf

cure.

Dans le grand nombre de faits & d'exemples que j'ai ramassez, j'ai tâché d'apporter du choix, & de n'en pas entaffer une trop grande multitu de, de peur que dans le trop grand nombre d'exemples, les douteux nơ nuififfent aux certains, & qu'en vou→ lant trop prouver, je ne prouvaffe abfolument rien. Il s'en rencontrera même entre ceux que j'ai cités, qui ne trouveront pas aifément créance parmi plufieurs Lecteurs, & je confens qu'ils les tiennent comme non rapportez.

Mais je les prie cependant de faire un jufte difcernement des faits & des exemples, après quoi ils pourront avec moi porter leur jugement, affirmer, nier ou demeurer dans le doute.

Il m'a paru très-important, par le respect que tout homme doit à la vérité, & par la vénération qu'un Chrétien & un Prêtre doit à la Religion, de détromper le monde, de l'opinion qu'il a fur les Apparitions, s'il les croit toutes vraies; ou de l'inftruire & de lui en montrer la vérité & la réalité d'un grand nombre, s'il les croit toutes fauffes. Il est toujours honteux de fe tromper, & il eft dangereux, en fait de Religion de croire légèrement ou de nier témérairement, de demeurer volontairement dans le doute, ou de s'entretenir fans raifon dans la fuperftition & dans l'illufion. C'eft déja beaucoup de favoir douter fagement, & de ne porter pas fes jugemens au delà de fes connoiffances.

Ce qui m'a le plus frappé, dans la