SCÈNE I. NEMOURS, DANGESTE. NEMOURS. COMBAT infortuné, destin qui me poursuis! DANGESTE. Vous la verrez, seigneur. NEMOURS. Ah! mortel désespoir! Elle ose me parler, et moi je le souhaite! DANGESTE. Seigneur, en quel état votre douleur vous jette! Vos jours sont en péril, et ce sang agité... NEMOURS Mes déplorables jours sont trop en sûreté; DANGESTE. Remerciez les cieux de ce qu'ils ont permis lest dur de tomber dans des mains étrangères; Vous êtes prisonnier du plus tendre des frères. NEMOURS. Mon frère! ah! malheureux! DANGESTE. Il vous était lié Par les noeuds les plus saints d'une pure amitie. NEMOURS. Sa fureur m'eût flatté; son amitié m'accable. DANGESTE. Quoi! pour être engagé dans d'autres intérêts, NEMOURS. Je l'aime, et je me hais; Et, dans les passions de mon âme éperdue, DANGESTE. Si contre un frère aimé vous avez combattu, NEMOURS. Non, ma défaite, ami, ne fait point mon malheur. Du Guesclin, des Français l'amour et le modèle, Aux Anglais si terrible, à son roi si fidèle, Vit ses honneurs flétris par de plus grands revers: Que bientôt... DANGESTE. Seigneur, je vous ai dit NEMOURS. Ah! pardonne à mon cœur interdit. Trop chère Adélaïde! Eh bien ! quand tu l'as vue, DANGESTE. Votre sort en secret paraissait la toucher; NEMOURS. Elle pleure, et m'outrage! elle pleure, et m'opprime! Son cœur, je le vois bien, n'est pas né pour le crime. Pour me sacrifier elle aura combattu; La trahison la gêne, et pèse à sa vertu : DANGESTE. S'il s'en vantait lui-même, en pouvez-vous douter? NEMOURS. Il l'épouse! A ma honte elle yient insulter: Ah Dieu! SCÈNE II. ADÉLAÏDE, NEMOURS. ADÉLAÏDE. Le ciel vous rend à mon âme attendrie; En veillant sur vos jours il conserva ma vie. Je vous revois, cher prince, et mon cœur empressé... Juste ciel! quels regards, et quel accueil glacé! NEMOURS. L'intérêt qu'à mes jours vos bontés daignent prendre Hélas! que dites-vous? quelle fureur subite... NEMOURS. Non, votre changement n'est pas ce qui m'irrite. ADÉLAÏDE. Mon changement, Nemours? NEMOURS. A vous seule asservi, Je vous aimai trop bien pour n'être point trahi; Et que vous osiez joindre à l'horreur qui m'accable, D'une fausse pitié l'affront insupportable! Qu'à mes yeux... ADÉLAÏDE. Ah! plutôt donnez-moi le trépas. Immolez votre amante, et ne l'accusez pas. NEMOURS. Vous me plaignez, cruelle, et vous m'abandonnez. ADÉLAÏDE. Je vous pardonne, hélas! cette fureur extrême, NEMOURS Vous m'aimeriez? qui, vous? Et Vendôme à l'instant Que plutôt... ADÉLAÏDE. Ah! cruel, me faut-il employer Les moments de vous voir à me justifier? Et par amour, et par sa jalousie, Et par l'emportement dont je crains les effets, |