ÆäÀÌÁö À̹ÌÁö
PDF
ePub

De la Flandre à sa voix on doit ouvrir la porte;
Du roi sous les remparts il trouvera l'escorte;
Le temps presse, évitez un ennemi jaloux.
ADÉLAÏDE.

Je vois qu'il faut partir.... mais sitôt.... et sans vous!

NEMOURS.

Prisonnier sur ma foi, dans l'horreur qui me presse,
Je suis plus enchaîn par ma seule promesse,
Que si de cet État les tyrans inhumains

Des fers les plus pesants avaient chargé mes mains.
Au pouvoir de mon frère ici l'honneur me livre.

Je peux mourir pour vous, mais je ne peux vous suivre;
Et j'ai du moins la gloire, en des malheurs si grands,
De sauver vos vertus des mains de vos tyrans.
Allez ; le juste ciel, qui pour nous se déclare,
Prêt à nous réunir, un moment nous sépare.
Demain le roi s'avance et vient venger mes fers.
Aux étendards des lis ces murs seront ouverts;
Pour lui des citoyens la moitié s'intéresse ;
Leurs bras seconderont sa fidèle noblesse.
Hélas! si vous m'aimez, dérobez-vous aux traits
De la foudre qui gronde autour de ce palais,
Au tumulte, au carnage, au désordre effroyable,
Dans des murs pris d'assaut malheur inévitable;
Mais craignez encor plus les fureurs d'un jaloux,
Dont les yeux alarmés semblent veiller sur nous.
Vendôme est violent, non moins que magnanime,
Instruit à la vertu, mais capable du crime :
Prévenez sa vengeance, éloignez-vous, partez.

ADÉLAIDE.

Vous restez exposé seul à ses cruautés.

NEMOURS.

Ne craignant rien pour vous, je craindrai peu mon frère. Que dis-je ? mon appui lui devient nécessaire;

Son captif aujourd'hui, demain son protecteur,

Je saurai de mon roi lui rendre la faveur ;

324

Et fidèle à la fois aux lois de la nature,
Fidèle à vos bontés, à cette ardeur si pure,
A ces sacrés liens qui m'attachent à vous,
J'attendrai mon bonheur de mon frère et de vous.

ADÉLAÏDE.

Je vous crois, j'y consens, j'accepte un tel augure.
Favorisez, ô ciel, une flamme si pure!

Je ne m'en défends plus : mes pas vous sont soumis.
Je l'ai voulu, je pars........ cependant je frémis :

Je ne sais, mais enfin la fortune jalouse
M'a toujours envié le nom de votre épouse.

NEMOURS.

Ah! que m'avez-vous dit? vous doutez de ma foi !
Ne suis-je plus à vous? n'êtes-vous plus à moi?
Toutes nos factions, et tous les rois ensemble
Pourraient-ils affaiblir le nœud qui nous rassemble?
Non ; je suis votre époux : la pompe des autels,
Ces voiles, ces flambeaux, ces témoins solennels,
Inutiles garants d'une foi si sacrée,

La rendront plus connue, et non plus assurée.
Vous, mânes des Bourbons, princes, rois mes aïeux,
Du séjour des héros tournez ici les yeux !
J'ajoute à votre gloire en la prenant pour femme.
Confirmez mes serments, ma tendresse et ma flamme;
Adoptez-la pour fille; et puisse son époux
Se montrer à jamais digne d'elle et de vous!

ADÉLAÏDE.

Tous mes vœux sont comblés; mes sincères tendresses
Sont loin de soupçonner la foi de vos promesses;
Je n'ai craint que le sort qui va nous séparer.
Mais je ne le crains plus, j'ose tout espérer;

Rempli de vos bontés, mon cœur n'a plus d'alarmes.
Cher amant, cher époux....

NEMOURS.

Quoi! vous versez des larmes?

C'est trop tarder, adieu. Ciel! quel tumulte affreux!

SCÈNE III.

VENDOME, GARDES, ADÉLAIDE, NEMOURS.

VENDÔME.

JE l'entends, c'est lui-même.... Arrête, malheureux :
Lâche qui me trahis, lâche rival, arrête.

NEMOURS.

Ton frère est sans défense; il t'offre ici sa tête.

[blocks in formation]

C'est votre frère.... ah! prince, pouvez-vous....

VENDÔME.

Perfide! il vous sied bien de fléchir mon courroux.... Vous-même, frémissez.... Soldats, qu'on le saisisse.

NEMOURS.

Va, tu peux te venger au gré de ton caprice;
Ordonne, tu peux tout, hors m'inspirer l'effroi ;
Mais apprends tous nos maux : écoute, et connais-moi.
Oui, je suis ton rival; et, depuis deux années,
Le plus secret amour unit nos destinées.
C'est toi dont les fureurs ont voulu m'arracher
Le seul bien sur la terre où j'ai pu m’attacher.
Tu fais depuis trois mois les horreurs de ma vie :
Les maux que j'éprouvais passaient ta jalousie.
Juge de mes transports par tes égarements;
J'ai voulu dérober à tes emportements,
A l'amour effréné dont tu l'as poursuivie,
Celle qui te déteste et que tu m'as ravie.
C'est pour te l'arracher que je t'ai combattu;
J'ai fait taire le sang, peut-être la vertu ;

Malheureux, aveuglé, jaloux comme toi-même,
J'ai tout fait, tout tenté pour t'ôter ce que j'aime.
Je ne te dirai point que, sans ce même amour,
J'aurais pour te servir voulu perdre le jour;

Que, si tu succombais à tes destins contraires,
Tu trouverais en moi le plus tendre des frères;
Que Nemours, qui t'aimait, aurait quitté pour toi
Tout dans le monde entier, tout, hors elle et mon roi,
Je ne veux point en lâche apaiser ta vengeance;
Je suis ton ennemi, je suis en ta puissance;
L'amour fut dans mon cœur plus fort que l'amitié;
Sois cruel comme moi, punis-moi sans pitié.
Aussi-bien tu ne peux t'assurer ta conquête,
Tu ne peux l'épouser qu'aux dépens de ma tête.
A la face des cieux je lui donne ma foi;
Je te fais de nos voeux le témoin, malgré toi.
Frappe, et qu'après ce coup, ta cruauté jalouse
Traîne aux pieds des autels ta sœur et mon épouse.
Frappe, dis-je oses-tu?

VENDÔME.

Traître... c'en est assez :

Qu'on l'ôte de mes yeux; soldats, obéissez.

ADÉLAÏDE.

Non, demeurez, cruels; ah! prince, est-il possible
Que la nature en vous trouve une âme inflexible?
(A Vendôme.)

Nemours.... frère inhumain, pouvez-vous oublier......

NEMOURS, à Adélaïde.

Vous êtes mon épouse, et daignez le prier!

(A Vendôme.)

Va, je suis dans ces lieux plus puissant que toi-même ; Je suis vengé de toi : l'on te hait, et l'on m'aime.

ADÉLAÏDE.

Ah, cher prince! ah, seigneur! voyez à vos genoux....

(Aux gardes.)

VENDÔME.

(A Adélaïde.)

Qu'on m'en réponde: allez. Madame, levez-vous;
Je suis assez instruit du soin qui vous engage,
Je n'en demande point un nouveau témoignage,

Vos pleurs auprès de moi sont d'un puissant secours; Allez, rentrez, madame.

ADÉLAÏDE.

O ciel, sauvez Nemours!

SCÈNE IV.

VENDÔME.

SUR qui faut-il d'abord que ma vengeance éclate?

Que je te vais punir.... Adéla de.... ingrate,

Qui joins la haine au crime, et la fourbe aux rigueurs.
Eh quoi ! je te déteste, et verse encor des pleurs!
Quoi! même en m'irritant, tu m'attendris encore !
Tu déchires mon âme, et ma fureur t'adore!
Frère indigne du jour, tu m'as seul outragé;
Et mon bras dans ton sang n'est point encor plongé !

Ainsi donc ma bonté, ma flamme était trahie.
Par qui? par des ingrats dont j'ai sauvé la vie!
Par un frère ! ah, perfide! ah, déplaisir mortel!
Qui des deux dans mon cœur est le plus criminel?

Qu'il meure; vengeons-nous : c'est lui, c'est le perfide,
Dont les mains m'ont frayé la route au parricide.
Et toi, le prix du crime, et que j'aimais en vain,
Je cours te retrouver, mais sa tête à la main.

SCÈNE V.

VENDOME, COUCY.

COUCY.

QUE votre vertu, prince, ici se renouvelle :
Recevez de ma bouche une triste nouvelle :
Apprenez....

« ÀÌÀü°è¼Ó »