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Confondez son orgueil et punissez sa rage.

Tous vos guerriers sont prêts; permettez que mon bras..
ÉRYPHILE.

Es-tu lasse, Fortune? Est-ce assez d'attentats?
Ah! trop malheureux fils, et toi, cendre sacrée,
Cendre de mon époux de vengeance altérée,
Mânes sanglants, faut-il que votre meurtrier
Règne sur votre tombe et soit votre héritier?
Le temps, le péril presse, il faut donner l'empire.
Un dieu dans ce moment, un dieu parle et m'inspire;
Je cède; je ne puis, dans ce jour de terreur,

Résister à la voix qui s'explique à mon cœur.
maître des rois et de la destinée,

C'est vous,
C'est vous qui me forcez à ce grand hyménée.
Alcméon, si mon fils est tombé sous ses coups...
Seigneur... vengez mon fils, et le trône est à vous.

ALCMÉON.

Grande reine, est-ce à moi que ces honneurs insignes... ÉRYPHILE.

I

Ah! quels rois dans la Grèce en seraient aussi dignes? 14

Ils n'ont que des aïeux, vous avez des vertus.
Ils sont rois, mais c'est vous qui les avez vaincus.
C'est vous que le ciel nomme et qui m'allez défendre:
C'est vous qui de mon fils allez venger la cendre.
Peuple, voilà ce roi si long-temps attendu,
Qui seul vous a fait vaincre, et seul vous était dú,
Le vainqueur de deux rois, prédit par les dieux même.
Qu'il soit digne à jamais de ce saint diadème!
Que je retrouve en lui les biens qu'on m'a ravis,
Votre appui, votre roi, mon époux et mon fils!

SCÈNE IV.

ÉRYPHILE, ALCMEON, POLEMON, THÉANDRE,

CHOEUR D'ARGIENS.

THEANDRE.

QUE faites-vous, madame? et qu'allez-vous résoudre ?
Le jour fuit, le ciel gronde : entendez-vous la foudre ?
De la tombe du roi le pontife a tiré

Un fer que sur l'autel ses mains ont consacré.

Sur l'autel à l'instant ont paru les furies:

Les flambeaux de l'hymen sont dans leurs mains impies. Tout le peuple tremblant, d'un saint respect touché, Baisse un front immobile à la terre attaché.

ÉRYPHILE.

Jusqu'où veux-tu pousser ta fureur vengeresse,
O ciel? Peuple, rentrez : Théandre, qu'on me laisse.
Quel juste effroi saisit mes esprits égarés!
Quel jour pour un hymen!

SCÈNE V.

ERYPHILE, ALCMEON.

ÉLYPHILE.

AH! seigneur, demeurez.

Eh quoi! je vois les dieux, les enfers et la terre
S'élever tous ensemble et m'apporter la guerre ;
Mes ennemis, les morts contre moi déchaînés;
Tout l'univers m'outrage, et vous m'abandonnez!
ALCMÉON.

Je vais périr pour vous, ou punir Hermogide;
Vous servir, vous venger, vous sauver d'un perfide.

ÉRYPHILE.

Je vous faisais son roi; mais, hélas! mais, seigneur, Arrêtez; connaissez mon trouble et ma douleur. Le désespoir, la mort, le crime m'environne; J'ai cru les écarter en vous plaçant au trône. J'ai cru même apaiser ces mànes en courroux, Ces mânes soulevés de mon premier époux. Hélas! combien de fois de mes douleurs pressée, Quand le sort de mon fils accablait ma pensée, Et qu'un léger sommeil venait enfin couvrir * Mes yeux trempés de pleurs et lassés de s'ouvrir, Combien de fois ces dieux ont semblé me prescrire De vous donner ma main, mon cœur et mon empire! Cependant quand je touche au moment fortuné Où vous montez au trône à mon fils destiné, Le ciel et les enfers alarment mon courage; Je vois les dieux armés condamner leur ouvrage : * Et vous seul m'inspirez plus de trouble et d'effroi * Que le ciel et ces morts irrités contre moi. * Je tremble en vous donnant ce sacré diadème; * Ma bouche en frémissant prononce, je vous aime. * D'un pouvoir inconnu l'invincible ascendant * M'entraîne ici vers vous, m'en repousse à l'instant; * Et par un sentiment que je ne puis comprendre, * Mêle une horreur affreuse à l'amour le plus tendre. ALCMÉON.

Quels moments! quel mélange, ô dieux qui m'écoutez,
D'étonnement, d'horreurs et de félicités!

L'orgueil de vous aimer, le bonheur de vous plaire,
Vos terreurs, vos bontés, la céleste colère,
Tant de biens, tant de maux me pressent à la fois,
Que mes sens accablés succombent sous leur poids.

Encor loin de ce rang que vos bontés m'apprêtent,
C'est sur vos seuls dangers que mes regards s'arrêtent.
C'est pour vous délivrer de ce péril nouveau,
Que votre époux lui-même a quitté le tombeau.
Vous avez d'un barbare entendu la menace;
Où ne peut point aller sa criminelle audace?
Souffrez qu'au palais même assemblant vos soldats,
J'assure au moins vos jours contre ses attentats;
Que du peuple étonné j'apaise les alarmes;
Que, prêts au moindre bruit, mes amis soient en armes.
C'est en vous défendant que je dois mériter

Le trône où votre choix m'ordonne de monter.
ÉRYPHILE.

Allez : je vais au temple, où d'autres sacrifices
Pourront rendre les dieux à mes vœux plus propices.
Ils ne recevront pas d'un regard de courroux
Un encens que mes mains n'offriront que pour vous.

FIN DU TROISIÈME ACTE.

SCÈNE I.

ALCMEON, THEANDRE.

ALCMÉON.

TOUT est en sûreté : ce palais est tranquille,
Et je réponds du peuple, et surtout d'Éryphile.
THÉANDRE.

Pensez plus au péril dont vous êtes pressé;
Il est rival et prince, et de plus, offensé.
Il songe à la vengeance; il la jure, il l'apprête;
J'entends gronder l'orage autour de votre tête :
Son rang lui donne ici des soutiens trop puissants,
Et ses heureux forfaits lui font des partisans.
Cette foule d'amis qu'à force d'injustices....

ALCMÉON.

Lui, des amis! Théandre, il n'a que des complices,
Plus prêts à le trahir que prompts à le venger;
Des cœurs nés pour le crime, et non pour le danger.
Je compte sur les miens : la guerre et la victoire
Nous ont long-temps unis par les nœuds de la gloire,
Avant que tant d'honneurs sur ma tête amassés
Traînassent après moi des cœurs intéressés.
Ils sont tous éprouvés, vaillants, incorruptibles;
La vertu qui nous joint nous rend tous invincibles;

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