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SCÈNE V.

ALCMÉON, ÉRYPHILE.

ÉRYPHILE.

* FH bien! ne tarde plus, remplis ta destinée :
* Porte ce fer sanglant sur cette infortunée.
* Étouffe dans mon sang cet amour malheureux

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Que dictait la nature en nous trompant tous deux; * Punis-moi, venge-toi, venge la mort d'un père; * Reconnais-moi, mon fils; frappe et punis ta mère. ALCMÉON.

Moi, votre fils! grands dieux!

ÉRYPHILE.

C'est toi dont, au berceau,

Mon indigne faiblesse a creusé le tombeau;

C'est toi qui fus frappé par les mains d'Hermogide;
C'est toi qui m'es rendu, mais pour le parricide :
Toi mon sang,
toi mon fils, que le ciel en courroux,
Sans ce prodige horrible, aurait fait mon époux.
ALCMÉON.

De quel coup ma raison vient d'être confondue.
Dieux! sur elle et sur moi puis-je arrêter la vue?
Je ne sais où je suis : dieux qui m'avez sauvé,
Reprenez tout ce sang par vos mains conservé.
Est-il bien vrai, madame, on a tué mon père?
Il veut votre supplice, et vous êtes ma mère?
ÉRYPHILE.

* Oui, je fus sans pitié : sois barbare à ton tour,

* Et montre-toi mon fils en m'arrachant le jour.

*

Frappe... Mais quoi! tes pleurs se mêlent à mes larmes!

* O mon cher fils! ô jour plein d'horreur et de charmes!

* Avant de me donner la mort que tu me dois,

* De la nature encor laisse parler la voix :

* Souffre au moins que les pleurs de ta coupable mère * Arrosent une main si fatale et si chere.

ALCMÉON.

Cruel Amphiaraus! abominable loi!

La nature me parle, et l'emporte sur toi.
O ma mère!

ÉRYPHILE, en l'embrassant.

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Je ne méritais pas une si pure joie.

J'oublie, et mes malheurs, et jusqu'à mes forfaits,
Et ceux qu'un dieu t'ordonne, et tous ceux que j'ai faits.

SCÈNE VI.

ERYPHILE, ALCMEON, ZELONIDE, POLEMON.

POLÉMON.

MADAME, en ce moment l'insolent Hermogide,
Suivi jusqu'en ces lieux d'une troupe perfide,
La flamme dans les mains, assiège ce palais.
Déja tout est armé, déja volent les traits.
Nos gardes rassemblés courent pour vous défendre;
Le sang de tous côtés commence à se répandre.
Le peuple épouvanté, qui s'empresse ou qui fuit,
Ne sait si l'on vous sert, ou si l'on vous trahit.
ALCMÉON.

O ciel! voilà le sang que ta voix me demande;
La mort de ce barbare est ma plus digne offrande.
Reine, dans ces horreurs cessez de vous plonger;
Je suis l'ordre des dieux, mais c'est pour vous venger.
FIN DU QUATRIÈME ACTE.

ACTE CINQUIÈME.

SCÈNE I.

ALCMEON, THEANDRE, POLEMON, SOLDATS.

ALCMÉON.

Vous trahirai-je en tout, ô cendres de mon père?
Quoi! ce fier Hermogide a trompé ma colère!
Quoi! la nuit nous sépare, et ce monstre odieux
Partage encor l'armée, et ce peuple, et les dieux!
Retranché dans ce temple, aux autels qu'il profane
* Il me brave : il jouit du ciel qui le condamne. 19
(A Polémon)

Allez.

POLÉMON.

Et qu'avez-vous, seigneur, à ménager? Tous les lieux sont égaux quand il faut se venger; Vous régnez sur Argos...

ALCMÉON.

Argos m'en est plus chère;
Avec le nom de roi je prends un cœur de père.
Me faudrait-il verser, dans mon règne naissant,
Pour un seul ennemi tant de sang innocent?
Est-ce à moi de donner le sacrilège exemple
D'attaquer les dieux même, et de souiller leur temple?
Ils poursuivent déja ce cœur infortuné

Qui protège contre eux ce sang dont je suis né.

Va, dis-je, Polémon, va, c'est de ta prudence
Que ton maître et ce peuple attendent leur vengeance.
Agis, parle, promets; que surtout d'Alcmeon

Il ne redoute point d'indigne trahison;

Fais qu'il s'éloigne au moins de ce temple funeste.
Rends-moi mon ennemi, mon bras fera le reste.
(Polémon sort.)

(A Théandre.)

Et vous, de cette enceinte et de ces vastes tours
Avez-vous parcouru les plus secrets détours?
Du palais de la reine a-t-on fermé les portes?
THÉANDRE.

J'ai tout vu; j'ai partout disposé vos cohortes.
Cependant votre mère...

ALCMÉON.

A-t-on soin de ses jours?

THÉANDRE.

Ses femmes en tremblant lui prêtent leur secours:

Elle a repris ses sens; son âme désolée

Sur ses lèvres encore à peine est rappelée.

Elle cherche le jour, le revoit et gémit. (4)
Elle vous craint, vous aime; elle pleure et frémit.
Elle va préparer un secret sacrifice

A ces mânes sacrés, armés pour son supplice.

Son désespoir l'égare, elle va s'enfermer
Au tombeau de ce roi qu'elle n'ose nommer,
De ce fatal époux, votre malheureux père,
Dont vous savez...

ALCMÉON.

Grands dieux! je sais qu'elle est ma mère.2

THÉANDRE.

Les dieux veulent son sang. Dans un tel désespoir
Quels conseils désormais pourriez-vous recevoir?
ALCMÉON.

Aucun. Quand le malheur, quand la honte est extrême,
Il ne faut prendre, ami, conseil que de soi-même.
Mon père!... Que veux-tu? chère ombre! apaise-toi! 21
Le nom sacré de fils est-il affreux pour moi?
Je t'entends, et ta voix m'appelle sur ta tombe!
De tous tes ennemis y veux-tu l'hécatombe?

Tu demandes du sang... demeure, attends, choisis,
Ou le sang d'Hermogide, ou le sang de ton fils.

SCÈNE II.

ALCMEON, THEANDRE, POLEMON.

ALCMÉON.

EH bien! l'as-tu revu cet ennemi farouche?
A lui parler d'accord as-tu forcé ta bouche? 22
Les dieux le livrent-ils à ma juste fureur?
Sait-il ce qui se passe?

POLÉMON.

Il l'ignore, seigneur.

Il ne soupçonne point quel sang vous a fait naître;
Il méprise son prince, il méconnaît son maître;
Furieux, implacable, au combat préparé,
Et plus fier que le dieu dans ce temple adoré :
Mais il consent enfin de quitter son asile,
De vous entendre ici, de revoir Éryphile.
Il veut qu'un nombre égal de chefs et de soldats,
Également armés, suivent de loin vos pas.

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