prime d'un ton guindé & outré. La Critique veut le ramener au naturel mais les efforts font vains, & la Critique ne peut s'empêcher de dire: Quoi que je faffe, un jour ne fuffira jamais Pour ramener au vrai des Acteurs indifcrets Dont le jeu ridicule affermi par l'usage, Du Public indulgent a gagné le fuffrage. La Comédie Italienne fuccede à l'Acteur tragique. La Critique déclame contre les Parodies d'Opéra qui fe font emparées du Théâtre Italien, & qui y ont détruit tous les genres de comique. Ces Parodies, ajoute la Critique, ne font que de froides & triftes élégies, & il n'y eft question que de bergeries doucereufes qui affadiraient la Nation Française fi elle continuait a s'y accoutumer. Les farces Italiennes font auffi fort décriées dans cette scène. La Comédie Italienne fe retire pour faire place à l'Opéra, qui arrive en chantant; après qu'il a ceffé de chanter, il fait faire quelques pas à des Danfeurs & à des Danfeufes qu'il a amenés avec lui. La CRITIQUE. Quel deffein s'il vous plaît vous amens à Une DANSEUSE Nous venons pour allonger la scène ; Fuyêz, ou redoutez l'excès de ma colere, Tous ces jeux déplacés, indignes de me plaire,, Banniffent l'intérêt & bleffent la taifon. L'OPÉRA.. Sans l'art de mes Danfeurs, veriiez-vous Ti " ton Triompher en Héros, des fons de Pergolefe, Et rétablir l'éclat de la fcène Française? La CRITIQUE. Dans ce trifte concours de mufique & de chant, (1) Le Parterre mécontent de voir fronder avec fi peu de ménagement des Pieces qui faifaient fes délices, n'eut pas pour celle-ci plus d'indulgence que fon Auteur n'en avait pour les autres; il faifit cette plaifanterie & Fapplaudit a tant de reprises, qu'il ne fut pas poffible d'aller plus loin.. Quel parti prenez vous ? L'OPÉRA. Le parti de l'argent. Mais par un fort fatal qu'à peine je puis croire,, Je perds depuis trois ans ma fortune & ma gloire, Tantôt pour les bouffons, & tantôt pour Luth, Je fuis prêt à périr malgré ce double appui. On peut remédier au danger qui vous preffe.. Parlez, que faut-il faire, adorable Princeffe La CRITIQUE De vos Auteurs fameux connaillant les beautés, Remettre avec plus d'art ces Poëmes vantés,. Dont à jufte raison le Théâtre s'honore. L'Opéra répond qu'Armide, Atis,, & vingt autres chefs-d'œuvres tomberaient à préfent, & la Critique combat un préjugé auff ridicule. La Mode revient avec Mademoiselle Ballarini, jeune Italienne qui eft propre à tout; elle fait chanter, danfer, parler & quelquefois fe taire : elle chante un air de Lulli, enfuite une Ariette Italienne; elle danfe le gracieux, elle faute, elle danfe la Pantomime enfin elle tient tout ce qu'elle a promis. La Critique eft enchantée de tant de talens, mais elle ne peut être d'accord avec Mademoiselle Ballarini fur la prééminence de la mufique Italienne & il y a entr'elles un grand débat fur les deux mufiques. La Critique a beau vanter le dernier fuccès d'Atis à la Cour de Louis, Mademoifelle Ballarini reprouve cet Opéra qui eft trop férieux, & elle finit par ces quatre vers: Pour moi laffe à la fin de votre dignité, Cette Piece-ci fut jugée un peu trop fevérement; elle eft de Chevrier mort depuis quelques années, après s'être fait connaître par plufieurs Ouvrages qui ont fait plus d'honneur à fon efprit qu'à fon cœur. * LE RETOUR DU GOUT, Comédie en un acte, en vers libres 25 Février 1754. LA premiere Scène eft entre le Goût mis a la Françaife, & Mercure ayant fon caducée à la poche gauche de fon habit. Mercure demande au Goût la caufe de fon retour à Paris: Le Goût lui apprend qu'Apollon lui a ordonné de revenir dans le féjour qu'il avait choifi depuis fi long-tems, & de s'y fixer pour jamais il dit à Mercure qu'il a befoin de fon fecours pour briller davantage. J'ai toujours de ta voix admiré les accens ; MERCURE. Jobéirai, Seigneur; mais un feul point m'arè rête. Quel genre voulez-vous? Italien? Français, |