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nus pour les Auteurs de cette Piece, l'ont jugée eux-mêmes trop fevérement, pour qu'il ne reftât rien à ajouter à leurs propres obfervations. Nous dirons feulement qu'elle fit le plus grand plaifir, & qu'elle eut cinquante repréfentations.

LE CAPRICE AMOUREUX,
OU NINETTE A LA COUR.

Comédie en trois afes, en vers, mêlée d'Ariettes, 12 Février 1755. (1)

N

INETTE en filant au rouet, ouvre la fcène avec Colas, & débute par cette Ariette.

Travaillons d'un bon courage;

La fraîcheur

De cet ombrage,
La douceur

De ce ramage,

(1) Le théâtre repréfente au premier acte une Campagne agréable, coupée d'arbres fruitiers, avec des cabannes de Payfans fur tes aîles. On les voit travailler à différens ouvrages.

Nous donne cœur

A l'ouvrage.

Près de l'objet qui m'attendrit,
Je file à merveille;
Quand la fatigue m'assoupit,
L'amour me réveille.

Elle prie en même-tems Colas d'aller cueillir du fruit pour elle; il monte fur un arbre, & voit la plaine couverte de Chiens & de Piqueurs ; il defcend alors tout allarmé, & dit à Ninette:

Rentrez, rentrez; morgué, ces malins drilles, Comme au Gibier fefont la guerre aux filles.

Aftolphe, Roi de Lombardie, paraît avec Fabrice fon Confident & lui fait l'aveu de fa paffion pour Ninette, par cette jolie Ariette.

Oui, je l'aime pour jamais ;
Rien n'égale fes attraits.

De fon teint, la fleur naïve,
Toujours fraîche, toujours vive,

Confond les efforts de l'art.

C'eft la nature

Simple & pure,

Elle enchante d'un regard.

Dans fon cœur eft l'innocence,

Dans fes yeux eft la candeur,
Sa parure eft la décence,

Et fon fard eft la pudeur.

Fabrice fort, & Ninette revient en chantant. Aftolphe lui témoigne fa furprise de la voir fi contente dans un état fi borné, & lui offre une fortune éclatante, en lui déclarant qu'il l'adore. Ninette qui le prend pour un Officier de fa Cour, lui répond naïvement que cette déclaration lui fait grand plaifir: Gardez, lui dit-elle,

Gardez tous vos tréfors; je ne veux qu'une grace.

Vous favez que l'on chaffe

Tous les jours en ces lieux, du matin jusqu'au foir;

Si vous avez quelque pouvoir,

Parlez au Prince, afin que l'on nous débar

raffe

De tout le train

que font fes

gens.

Je ne comprens point quelle fievre

Peut faire ainfi courir les champs?
Pour le plaifir de prendre un lievre,
On ravage quarante arpens.

Elle le prie, en conféquence, de ne plus revenir, en lui avouant franchement qu'elle aime Colas. Le Prince lui dit de mieux placer fon ardeur, ajoutant qu'un fort brillant l'attend à la Cour, & que les charmes d'une toilette la rendront encore plus belle. Questce qu'une toilette, lui demande Ninette? Il lui fait cette ingénieufe defcription:

C'eft un Trône où triomphe l'art; C'eft un Autel que l'on érige aux graces; C'eft-là qu'on peut des tems rapprocher les espaces,

Par l'heureux preftige d'un fard,

Qui des ans applanit les traces. Des couleurs du plaifir on ranime fon teint. Et le pinceau rival de la nature,

Par une agréable impofture

Fait éclore la fleur d'un vifage enfantin.
Chaque jour on est aussi belle ;

D'un air plus triomphant la jeuneffe y fourit,
La beauté même s'embellit,

Se fixe & devient immortelle.

Un Tableau fi flatteur pique la vanité curieufe de Ninette mais elle craint de fâcher Colas: il furvient dans

cette

cette irrésolution, & fait éclater fa jaloufie. Elle l'avertit tout bas de la ca-, cher, de peur d'irriter Aftolphe. Le. Prince qui s'en apperçoit, la raffure, en lui difant :

Si Colas vous eft cher, je deviens fon ami.
COLAS.

On n'eft guerre ami du mari
Quand on veut l'être de la femme.

Le Prince fort après avoir dit à
Ninette.

L'heureux Colas vous intéresse.

Puiffe-t-il mieux que moi faire votre bonheur!

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Ninette reproche à Colas fa groffiéreté vis-à-vis d'un Seigneur fi poli qui la veut mener à la Cour; il lui répond qu'Aftolphe lui parlait d'amour, & que cela ne convient pas. Elle lui répart avec une ingénuité rare aujourd'hui, même dans une jeune Payfanne.

Les Meffieurs de la Cour font trop bien élevés,

Pour entreprendre rien contre la bienséance.

Colas qui apperçoit dans ce moment
Tome VI.

K

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