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LE MAITRE DE MUSIQUE.

Parodie en un acte en vers, mélée d'Ariettes, 3 Mai 1755.

LAMBERT

ouvre le premier acte avec Laurette, & débute en grondant,

par cet air.

Ah! quel martire!

Sans ceffe inftruire,
Cent fois redire,

Sans rien produire,
C'est toujours pire.

Eh! laiffe-moi,

Va, tais toi.

Laurette fe fâche à fon tour, & fon Maître lui-dit:

Mademoiselle joue au mieux l'impertinence, Et pour faire dans peu l'Actrice d'importance, Il ne lui manque plus, ma foi, que du talent, Encor fouvent on s'en difpenfe,

En mettant à la place un ton bien infolent.

LAURETTE.

En ce cas-là, Monfieur, je fuis en bonne école,

Je puis très-bien l'apprendre ici de vous.

Lambert fe met au Clavecin. Laurette crie exprès méchamment au lieu de chanter, il l'interrompt en difant.

Chanteur qui pour mieux nous féduire,
Voulez être à la fois agréable & touchant,
Que l'haleine du doux zéphire,
Qui, de fa Flore, à l'oreille foupire,
Soit l'image de votre chant.

Eh! crois-moi, renvoyons aux halles
Tous ces Chantres bruyans, qui favent feu-
lement

De leurs grands cris remplir nos falles.

Excellente leçon pour tous nos théâtres! Laurette chante de nouveau & chante bien, Lambert témoigne qu'il eft content, & lui promet, fi elle continue, de la rendre dans peu une parfaite Aarice. On annonce Tracolin comme un perfonnage ridicule. Il entre, & après avoir embrassé Lambert, il regarde Laurette, & s'informe quel eft ce charmant objet. Lambert lui répond que c'est un fujet qu'il éleve pour le théâtre. Tracolin fe récrie: quelle mine! quel jeu! quelle voix!

Lambert lui demande s'il l'a entendue.

Non, replique-t'il.

Nous autres gens

de l'art,

Nous n'avons pour cela befoin que d'un re

gard,

Et nous jugeons d'une voix par la vue

D'ailleurs, ajoute-t-il,

Avec un tel minois,

A-t-on jamais manqué de voix.

Il fe répand en fleurettes, qui donnent d'autant plus de jaloufie à Lambert, que Laurette y répond.

Tracolin paraît fi transporté d'entendre Laurette, qu'il l'embraffe & la demande à fon Maître qui la lui refuse. On vient chercher Lambert de la part d'une Ducheffe. Il eft obligé de fortir malgré lui, & de laiffer Tracolin feul avec fon écoliere. Tracolin fait fa tendre déclaration. Laurette joue l'Agnès, en difant :

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AIR: La pudeur me guide.

La pudeur me guide,

Me rend timide,

Je n'ofe lever les yeux,

Si quelque curieux

Auprès de moi fe place.

Et me regarde en face,

Je fuis toute honteufe de cela.

Ma langue s'embarrasse,

En lui difant de grace,

Souffrez, Monfieur, que je paffe,

Je ne puis refter là

Où me voilà.

La pudeur, &c.

Si quelque téméraire

Pourfuit trop loin l'affaire,

Moi qui fuis bonne, & ne me fâche

J'excite ma colere,

Et lui dis d'un ton févere,

guere,

Mais finirez-vous donc, Monfieur,
Sachez qu'on eft fille d'honneur,
Sachez qu'on a de la pudeur.

Tracolin lui offre fa fortune avec fa main, & fe jette à fes genoux, Lambert revient & le furprend avec Laurette. Il fait éclater fa jaloufie, & l'acte finit par un trio bien fait & bien exécuté.

Lambert, qui revient avec Laurette, commence le fecond acte par cet air qui exprime fi bien fon dépit jaloux.

Non, je fuis trop en colere,

Me diras-tu le contraire ?
Quand moi même j'ai vu le téméraire,
Qui te faifait les yeux doux !
Pourquoi faire,
Etait-il à tes genoux ?

Vaine rufe!

Mauvaise excufe!

Me crois-tu donc affez bufe,
Pour m'en laiffer amufer:

Mais voilà comme on s'abuse,
Quand on penfe m'abufer.

Laurette perfifte juftifier & l'amene par degrés au point de l'obliger à demander race lui même. Cette fcène eft parfaitement bien traitée & filée avec beaucoup d'art. Lambert eft furpris à fon tour par Tracolin aux genoux de Laurette, qui dit à ce dernier qu'il furvient à propos, & qu'elle avait befoin de la présence pour faire connaître ses sentimens. Tracolin fe flatte alors de fe voir choifi. Lambert tremble au contraire de ne l'être point. Laurette les defabuse tous deux en donnant la main à fan Maître. Tracolin fe retire confus, & Lambert ravi, chante avec

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