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Laurette un Duo qui termine la Piece. Elle eft du même Auteur que la Servante-Maîtreffe, quoique très-plaifante on ne peut nier qu'elle ne foit une fœur très cadete de fon ainée. Ce n'est pas que M. Baurans ne l'ait traitée avec beaucoup d'adreffe & de gaité; & le feul tort qu'on lui peut faire, eft celui de la comparaison.

C'eft la derniere qu'ait donné M. Batrans. Cette Auteur naquit à Touloufe d'une famille honnête. Son pere, plus recommandable dans fa patrie par la fageffe de fa conduite & par l'étendue de fes vues pour le commerce, que par fon habileté à profiter de fes avantages, fe contentait de trouver dans fon induftrie & dans un patrimoine très-borné, les moyens d'élever une famille nombreufe. Le jeune Baurans fe diftingua de bonne heure par fa pénétation & par fes talens naiffans. It montra dès l'âge leplus tendre ce caractere doux, fenfible, ces mœurs pures &fimples qui augmenteat parmi fes amis les regrets de fa perte. Son pere le deftinait au Barreau; mais il tenait de la nature un penchant invicible pour les beauxArts; le devoir l'emporta fur la Nature; il fe prêta aux vues de fon pere,

& fe livra à l'étude des Loix. Malgré l'inclination la plus forte, la Poéfie & la Mufique, pour lefquelles il fe fentait les plus grandes difpofitions, ne furent plus pour lui qu'un amufement. Il cultiva les Arts & ne négligea point l'étude des Loix. Il favait que la Mufique & la Poéfie ne méritent de plaire qu'autant qu'elles peignent ou les objets qui frappent nos fens, ou les impreffions de l'ame. Il remonta à la fource des Arts, & étudia la Nature; il fit des progrès rapides dans la Phyfique; il nous refte de lui un Affai fur Electricité, qui prouve cel cût pû faire dans ce l'aidaient à fupno devoir d'autant plor trariait tous les goûts. excepté fa timidité; affection de l'ame qui n'est point une paffion. & qui cependant eft plus forte que toutes les paflions enfemble, fléau des talens qui naît de l'amour propre, & qui en eft le tyran. M. Baurans, malgré fa répugnance, avait acquis la connaiffance la plus étendue des Loix; mais, lorfqu'il voulut entrer dans la carierre, ou tout autre, avec bien moins de favoir & de difpofitions, eût pû faire

domens

Beru d'un

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qu'il conInmonta tout,

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la plus grande réputation, il fe méfia de fes forces & renonça à une victoire assurée ; non qu'il craignit le combat, mais parce qu'il redoutait l'éclat du triomphe. Il aurait renoncé avec plaifir au Barreau ; mais il ne voulait pas déplaire à fa famille. Dans cette alternative, il fse borna à une charge de Subftitut du ProcureurGénéral au Parlement de Toulouze ; il en remplit les fonctions avec zèle, tant qu'il ne fallut que donner des conclufions par écrit. Enfin il crut qu'il lui ferait plus aifé de vaincre fa timidité fur un théâtre où il ferait moins connu. Il vint à Paris, dans le deffein de fe faire recevoir Avocat au Confeil; mais fa fortune fut un obftacle qu'il n'avait point prévu. Il lutta quelque tems contre elle. La perte qu'il fit de fon pere lui fut plus fenfible que tout ce qu'il avait éprouvé du fort. Il n'hérita que de fes vertus; il ne négligea point ce patrimoine & fe hâta de le mettre à profit. Comme il avait reçu l'éducation la plus heureuse, il voulut la tranfmettre, & n'ayant aucun deffein de fe marier, il fe choifit une famille ; ce fut celle d'un de fes Protecteurs, qui dépofa

entre les mains les droits facrés de pere, & qui lui confia fon fils. M. Baurans devint bientôt l'ami de l'un, & fe conduifit comme le pere de l'autre. Il fe retira avec fon eléve au College de Louis le Grand; comme il ne s'était engagé que de veiller fur fes mœurs & de diriger fes études, fes loifirs lui permirent de fe livrer à fes goûts fans réserve.

Depuis que le célebre Rameau avait accoutumé les Français à fon harmonie; qu'il avait créé pour ainfi dire, un genre nouveau de Mufique, leur prévention en faveur de l'ancienne monotonie, s'etait un peu affaiblie ; mais il n'y avait encore que quelques connaiffeurs qui vouluflent convenir de la fupériorité de l'Italie dans cet art, fur la France; le préjugé régnait toujours fur le gros de la Nation. M. Baurans entreprit de le diffiper entiérement. L'éloquent Citoyen de Geneve avait tenté, par fes argumens, de nous perfuader que notre Mufique ne méritait point ce nom, & que ce qui nous plai'ait ne devait point nous plaire; fes raifonnemens parurent des paradoxes; au lieu de perfuader, il révolta les efprits prévenus; & ceux qu'il gué

riffait de leur erreur, fe plaignaient encore d'avoir été guéris. M. Baurans ufa de plus d'adreffe; il attaqua leur opiniâtreté par le fentiment même. Il choifit un des chefs-d'œuvre de la Mufique Italienne la Serva Padrona de l'inimitable Pergoleze. Il compofa des paroles Françaises, auxquelles il adappta le chant du célébre Muficien Italien. Sa timidité lui fit garder long-tems le fecret, il ne communiqua fon projet qu'à quelques amis. L'excellente Actrice qui fut fi fouvent applaudie dans cette Piece, le força de lui communiquer fon ouvrage, l'encouragea & fe chargea du fuccès. Il fut complet; le Public y courut en foule. Le nombre prodigieux de repréfentation.. qu'eut ce Drame, l'éclat avec lequel il fe foutint, annoncerent une révolution prochaine dans notre Mufique; malgré le préjugé, les Ariettes de Pergoleze furent chantées à la Cour & à la Ville; & fi quelque chofe peut nous faire croire le délire des Abdéritains après la repréfentation de l'Andromede d'Euripide, c'est l'efpece d'enthoufiafme qui s'empara des Français pour les airs de la Servante Maîtreffe. M. Baurans donna un fecond Effai dans ce genre, qui

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