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compagne de l'ennui; elle lui reproche de s'abandonner trop à fa paffion & de ne pas étudier affez les moyens de plaire. Cette conversation eft interrompue par l'arrivée d'un carroffe qui entre dans la cour. Laure apprend que c'eft Saint-Fard, qui arrive; elle propofe à Mélite de paffer dans fon cabinet, pour être à portée d'entendre une converfation qui l'inftruira encore mieux que les préceptes. Saint-Fard entre. Laure à fa toilette, s'ajuftant quelques boucles de cheveux.

Ah! Monfieur, vous voilà, je fuis fort aife de vous voir: Eh bien! on ne peut donc pas avoir la clef de votre Loge?

SAINT-FARD.

Je me fuis fait un plaifir de vous l'api porter moi-même.

LAURE.

Un plaifir d'apporter une clef! cela s'appelle mettre du plaifir par-tout. Mais voilà une belle heure pour aller à un Opéra nouveau.

SAINT-FARD, tire fa montre.

Il n'eft que cinq heures & demie,

& vous n'y arrivez jamais avant fix

heures.

LAURE.

D'accord: mais précisément aujourd'hui je voulais y aller de bonne heure.

SAINT-FARD.

Et c'eft pour cela que votre toilette n'eft pas encore finie.

LAURE.

Ce petit ton ironique veut me prouver apparemment que je n'ai pas le fens

commun.

SAINT-FARD.

Quelle idée, charmante Laure! quelqu'un mieux que moi, fait - il ce qui en eft?

LAURE.

Et pourquoi le fçauriez vous plus qu'un autre? N'ai-je donc de l'efprit que pour vous: êtes vous feul capable d'en juger?

SAINT-FARD..

Ni l'un ni l'autre, Madame; mais je défie que perfonne s'y intéreffe plus que moi, & c'eft cet intérêt qui me fait

diftinguer toutes vos bonnes qualités mieux que perfonne.

LAURE.

Oh! pour le coup, voilà un compliment qui vous eft d'une grande resfource; les hommes font admirables, ils ne nous ont pas plutôt lancé l'épigramme, qu'avec quelques fadeurs ils comptent tout raccommoder, & que nous fommes contentes. Oh bien, Monfeur, gardez votre compliment pour une meilleure occafion, & votre Loge pour un autre jour.

SAINT-FARD.

Vous n'allez donc point à l'Opéra?

LAURE.

Si vraiment, n'y a-t-il que votre Loge dans le monde ? J'ai celle du Baron, qui, plus attentif que vous, me l'a envoyée dès le matin.

SAINT-FARD.

Et vous l'avez acceptée?

LAURE

Pourquoi non?

SAINT-FAR D.

Le Baron eft heureux, Madame. Si j'avais imaginé que vous euffiez pu douter de mon exactitude, vous auriez eu la clef de la Loge dès hier; ainfi celle du Baron....

LAURE.

Soit; tout ce tracas de clefs me rompt la tête. Laiffons cela.

SAINT-FARD.

Volontiers, je connais votre fincérité. Là, avouez que quand je fuis arrivé, vous aviez un petit befoin de gronder, dont vous m'avez donné la préférence. LAURE.

Pourquoi non? C'eft une faveur. Aimeriez-vous mieux que je l'euffe gar

dée

pour un autre (elle fe leve, on ôte la toilette.); vous en fentirez mieux le plaifir de m'entendre chanter l'air que vous m'avez envoyé. Les paroles font fimples & modeftes; voilà comme je les aime, &c.

Elle fe radoucit, chante le Duo, développe tout l'art de la coquetterie, & finit par envoyer fon Amant à

L'Opéra. Mélite fort de fa prifon, remercie Laure de ce qu'elle vient de voir & d'entendre. Sur quelques traits qui échappent à Mélite, Laure décou vre que Saint Fard eft fon Epoux. Il s'était annoncé garçon, cette trahison l'offenfe; elle promet à Mélite de lui renvoyer Saint-Fard dès le même foir.

Mélire arrivée chez elle, prend un ha bit de bal; le Chevalier, ami de SaintFard, & qui voudrait inspirer à Mélite le goût de la vengeance, lui amene une Fête fort à propos. Saint-Fard paraît; les caprices de Laure le mettent hors de lui-même. Il craint de troubler la Féte qu'on donne chez lui; il veut se retirer, Mélite le retient. Dans un Ballet figuré elle unit l'Hymen avec l'Amour. Le Chevalier paraît. Nouvelle entrée, dans laquelle un Danfeur, habillé comme le Chevalier, veut faire violence à l'Amour. Ce Dieu l'écon duit & amene Mélite à Saint-Fard. Le Chevalier demeure confus, & Saint-Fard fe réconcilie avec fon adorable Epoufe.

Cette Comédie eft de Monfieur de Moiffy, Auteur du Provincial à Paris; l'intrigue en eft fimple, les caractéres vrais, & le fujet, pris dans nos mœurs.

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