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Le caractére de Laure paraît calqué d'après Ninon l'Enclos; l'efprit, les talens, les graces, & le mépris des préjugés; voilà fon portrait. Ses mœurs ne font ni licentieufes, ni féveres; mais fon ame eft généreufe, noble, & compatiffante. Elle écoute l'Amour, & obtient de la confidération; ce caractere eft neuf au théâtre & y produit un grand effet, joué par Madame Favart, qui s'en acquitte fupérieurement. On aurait feulement défiré qu'elle reparût à la fin de la Piece pour y recueillir le fruit de fes leçons, ce qui aurait été trèsfacile, en venant masquée dans le bal, qui en fait le dénouement. Il eft fagement annoncé au premier acte, & bien naturellement amené au troifieme. Elle a eu dix-huit représentations, trèsapplaudies.

L'ENTET É.

Comédie en un acte, en vers
s Juin 1758.

DERVAL

ERVAL eft amoureux & aimé de Célie, niéce d'Araminte, vieille ridicule; malgré les difpofitions favorables où fe trouvent pour lui & le cœur de la niéce, & le goût de la tante, Lindor fon ami, l'avertit dans la premiére fcène, que fon entêtement avec tout le monde, & particuliérement avec Araminte, pourrait rompre fon mariage, & lui faire préférer Argant, fon Rival, perfonnage doux & complaifant. Ce motif émeut Derval qui, voyant entrer Araminte, court lui demander pardon de la derniere querelle, que fon obftination lui a fait avoir avec elle: il ajoûte à cela un compliment qui la flatte; mais ce raccommodement n'eft pas de longue durée. On parle d'un Auteur; Araminte le trouve mauvais, Derval auffi-tôt foutient qu'il eft bon: Araminte veut répliquer, Derval infilte; on s'échauffe, on fe brouille, & Araminte fort indignée, promettant

de donner fa niéce à Argant. Lindor, après de nouveaux reproches, engage Derval à aller la retrouver, pour fe réconcilier de nouveau; celui-ci y confent & réuffit. Cette fcène eft fuivie d'une entrevue tendre entre Célie & Derval, fon Amant; elle lui fait les mêmes reproches & les mêmes prieres que Lindor. Elle l'exhorte à imiter le caractere d'Argant, dont la douceur lui aurait infpiré de l'amour, fans fes fentimens pour Derval. Celui-ci la contredit, fur l'opinion qu'elle a d'Argant; mais Célie le voyant paraître, fe retire. Elle dit en partant à Derval, que s'il eft vrai, comme il le prétend, qu'Argant fe pare d'une douceur feinte; il doit apprendre de lui cet art, qui peut feul l'aflurer de fon cœur. Argant entre avec un maintien qui annonce fon caractere. Cette fcène eft la plus comique de la Piece.

Derval, non content de fe perfuader que cet homme eft jaloux, entêté, de mauvaise humeur, veut encore le forcer d'en convenir lui même. Argant céde à tout fans conteftation, répond tranquillement, & foutient parfaitement le caractère fous lequel on l'a représenté. Cette douceur irrite Der

val, qui eft encore fur le point d'avoir une querelle avec Araminte, qui n'est pas de fon avis fur le compte d'Ar gant. Lindor heureufement raccommode tout, propofe la conclufion du Mariage qu'Araminte fixe à l'inftant même, & à l'occafion des noces, fonge à fe procurer un concert. Elle en parle à Derval, qui applaudit à cette penfée. Araminte ravie de le voir de fon fentiment, l'embraffe de joie; elle lui demande fon choix entre Armide, Atis, Roland. Derval fe récrie fur l'idée qu'elle a de donner de la mufique françaife, & la fronde. Araminte déchire la mufique Italienne, & pour s'en mocquer, chante comiquement une Ariette en certe langue. Derval répond par un récitatif Français; chacun d'eux vante fon goût. Araminte dit à Derval qu'il a tort; Derval foutient qu'elle n'a pas raifon. On fe brouille encore. Célie & Argant arrivent fur ces entrefaites. Araminte donne à ce dernier fa niéce, qui accepte ce parti, rebutée par les procédés de Derval, à qui elle les reproche. L'Entêté ne veut point démordre de fa thèse, & fort en s'écriant que tout cela ne l'empêchera pas de dire que la mufique françaife eft miférable.

Cette Piece eft de Monfieur Bret; on l'a trouvée bien écrite, & l'efprit n'eft pas ce qui y manque; mais le caractère de l'Entêté ne fournit point affez de comique: en ne s'obftinant que fur des matières rebattues, telles que la Littérature, & la Mufique, l'uniformité des démêlés, répand néceffairement trop de monotomie fur la fcène; cette Piece cependant n'eft pas fans mérite; les gens de l'art lui ont rendu justice; mais les gens du monde ne s'y font point affez amufés; elle n'a eu que peu de représentations.

Le 15 Février, le Théâtre Italien fut fermé, ainfi que tous les autres pour le convoi de Madame la Ducheffe d'Orléans; ils fe rouvrirent le lendemain, & l'Opéra feul refta fermé pendant neuf jours.

DEBUT DE Mme, BOGNOLI.

Le 12 Avril Madame Bognoli, fœur aînée de Mademoiselle Catinon, débuta avec beaucoup de fuccès par le rôle de Silvia dans le Jeu de l'Amour & du Hazard, & par celui de Silvia dans la Silphide : le Public lui

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