compofition; ils ont été principalement remarqués, & les Artiftes en font cas. Les grilles des petites loges qui font deffous, font de bon goût & s'accordent bien avec l'ensemble général.

Toute cette Salle eft peinte en inarbre blanc veiné, & tous les ornemens font en or. Les poteaux des premieres loges font décorés de têtes de Lions en confoles, tenant un fefton de laurier. Les devantures font ornées de feuilles de refend & de canaux ; le deffous de ces devantures eft foutenu par des confoles très-mâles; le deffous des plate-bandes eft orné de rofettes qui s'entrelacent, & de poftes courantes.

Les appuis des fecondes loges font ornés fucceffivement de lyres avec des branches de laurier & une guirlande de chêne, & de médaillons pareillement ornés de guirlandes. Les plate-bandes de ces fecondes loges font les mêmes que celles des premieres.

Ceux des troifiemes loges font embellis par des têtes d'Apollon & des rinceaux d'ornemens. Des confoles d'un bon genre ornent les poteaux des fecondes & des troifiemes. Autour de celles-ci regnent les deux premieres moulures de l'architrave de l'avant

fcène; lefquelles fervent de tailloir aux confoles, & fuppléent l'architrave de la corniche, qui eft mâle, & dont tous les ornemens font bien entendus. Dans la frife regnent au pourtour des feftons de fuites. Le plafond eft peint en ciel, des Génies artistement grouppés soutiennent les luftres qui femblent attachés aux guirlandes avec lefquelles les Génies fe jouent.

L'efcalier qui conduifait aux premieres & fecondes loges a été totalement changé, & on en a fubftitué un nouveau beaucoup plus large & plus commode. On a ménagé à l'entrée un beau Veftibule qui communique au Parterre & à l'efcalier des troifiemes, dont cependant la communication eft interrompue pendant le Spectacle, par une grille qu'on ouvre à la fin, & qui laiffe au Public un grand efpace pour fortir. Telle était la difpofition de la Salle, lorfque vivement follicités par des perfonnes de la plus grande diftinction, de faire conftruire des loges dans l'avant fcène, pour être louées à l'année, les Comédiens Italiens fe dé. terminerent à en fupprimer les colonnes, pour fatisfaire à l'empreffement du Public, d'une part, & d'autre côté

pour ne point empiéter fur les fecondes & troifiemes loges, tant la fureur des petites loges eft devenue à la mode.

En conféquence, pendant les trois femaines de vacances de l'année 1764, les colonnes ont été jetées à bas, & ont été remplacées par trois loges de chaque côté, contenant chacune fix places, & deux loges de foubaffement pareilles à celles qui font fous les balcons. Ces loges font en faillie de fept à huit pouces fur le poteau où fe termine le balcon, dont les places deviennent meilleures qu'elles n'étaient auparavant, & fe terminent en plan circulaire du côté du théâtre. Leur décoration eft la même que celle qui regne dans toute la Salle. Derriere ces nouvelles loges font adroitement pratiqués des efcaliers qui y conduifent & qui defcendent fous le théâtre; ce qui rend la communication plus facile qu'elle n'était auparavant, parce que l'escalier du côté de la Reine, defcen. dait feulement jufqu'en bas. Ce changement en a occafionné un général dans la Salle, qui a été repeinte & dorée de nouveau en entier ; elle eft préfentement dans l'état le plus brillant. Tous les fonds des loges qui étaient en marbre de brêche violette, ont été peints en

damas jaune, ce qui fait un meilleur effet & eft plus avantageux aux femmes. Il n'eft refté duplafond que la corniche; le reste a été peint & changé.

Quand les colonnes étaient en place, un fimple fcfite orné de rinceaux dans le goût antique qu'elles portaient, terminait la Salle: en y fuppléant des loges, il a fallu changer la forme du plafond vers le théâtre; il fe termine préfentement en une vouffure, au milieu de laquelle font les armes du Roi, foutenues par quatre Vertus, la Force, la Juftice, la Prudence & la Tempérance. Sur le plafond dans l'angle du côté de la Reine, eft le Temple du Goût, où de petits Génies foutiennent les médaillons des Auteurs modernes qui ont travaillé pour ce théâtre (1); de l'autre côté font des Génies tenant le haut d'une grande & vafte draperie, qui forme le rideau, & qui lorfqu'il eft levé fe joint aux pentes qui defcendent le long des loges jufques fur le théâtre; au deffous des armes fur le rideau eft Thalie,

(1) On n'y voit point ceux des Delisle, des Marivaux, des Boiffi, des Favart; depuis longtems ils font placés au temple de-l'immortalité.

tenant la devife, caftigat ridendo mores, de la main droite; de l'autre un masque accompagné de plufieurs petits Génies, dont un regarde à travers le masque, & lance un trait (emblême qui paraît très-propre à cette Mufe, qui fous le mafque lance des traits piquans) & les autres levent le rideau qui fermé l'entrée du Palais de cette Mufe. Le Public, quoique regrettant l'ancienne avant-fcène, qui était le feul cadre que nous euffions à Paris dans nos Salles de Spectacles, a paru très fatisfait du nouvel arrangement qui n'a rien gâté à cette Salle.

Toutes les peintures & dorures ont été faites avec le plus grand foin. Le plafond & le rideau, qui font à préfent les morceaux les plus intéreffans, font. très-bien imaginés. La draperie eft d'une très-grande vérité; l'étoffe, dont le deffus eft une grande broderie d'or, & le deffous un velours cramoifi, est parfaitement exécutée. L'entrée du Temple de Thalie, à moitié découverte, dans le périftile duquel eft une Caffolette jettant des parfums, foutenue par trois figures de femmes, fait un très-bon effet, parce qu'elle fe lie avec la richeffe de la draperie.