C'eft qu'ici bas tout eft frivole, Que la réalité n'eft que l'amufement; Et pour apprendre promptement Ce joli favoir-là, je viens à votre école. La Frivolité lui répond qu'il prend le bon parti. Tout eft, dit-elle, foumis à mon éventail; le fage comme le fou eft au rang de mes fujets. Le Suiffe lui dit que pour l'imiter il compose un roman qu'il vient lui dédier, & qu'il l'écrit en français, d'un ftyle fort léger. La Frivolité paraît furprise d'un honneur fi rare, & lui demande le titre de l'ouvrage. C'eft, réplique-t-il, Le Suiffe qui rêve ou la Philosophic Ce paradoxe vous étonne, Et choque ouvertement le proverbe reçu. La Frivolité lui avoue franchement que l'efprit n'eft pas une vertu dont on foupçonne ceux de fon pays. C'eft de-là, reprend-il, ce que j'ai combattu dans la préface; l'efprit comme le Soleil répand fa lumiere par-tout également, on le transplante en commerçant. Votre commerce, ajoute-t-il, & vos ouvrages nous ont poli; & nous prenons des armes chez vous pour vous vaincre un jour. On parle votre idiôme dans tous les pays. Comme celui de Rome & de la Gréce, Et jufqu'en Amérique il fait des beaux efprits. mence A s'altérer dans vos écrits. Le Savant parmi vous tombé dans le mépris, Et pour les Arts qu'il récompenfe, La FRIVOLITÉ. Newton plus que Dupré, nous paraît admirable; Et l'électricité nous frappe uniquement, Nous l'employons univerfellement, Et dans notre fureur, jusqu'au feu du ton nerre, Nous électrifons tout impitoyablement. Nouveaux titans, dans cette guerre Nous voulons défarmer le Roi du Firmament; Et foumettre le Ciel au pouvoir de la terre. Pour l'érudition dont la lourdeur accable, Si nous la négligeons, le mal n'eft pas bien grand. Le gros favoir fait un Pedant, L'efprit lui feul fait l'homme aimable, Qui chez nous eft le vrai Savant. M. Faufter répond que l'efprit en fait par-tout. La Frivolité le perfiffle un peu là-deffus. Il réplique à cette ironie, que nos piéces, comme nos propos, font les Suiffes les héros de la bêtife, & les chargent d'un vieux ridicule qui n'existe plus que dans notre idée, & qu'il vient prendre fa revanche. Comme Berne, dit-il, Paris à fes Originaux; Cette Ville qui toujours tranche, Ne doit pas Le mocquer de nos treize Can tons, Madame, & vos Marquis valent bien nos Ba rons. Une Anglaise furvient, il s'éloigne un moment. Mifs Blar, qui eft le nom de cette étrangere, vient prendre tongé de la Frivolité, & fe plaint de ce que l'air de Paris a augmenté l'efpric noir qui la tourmente au lieu de le diminuer. M. Faufter s'avance à ce propos, & lui offre, en qualité de Médecin des Dames, de la guérir; la Frivolité fe joint à lui, & dit à Mifs Blar qu'il faut se diffiper. Eh! le moyen, répart-elle ? rien ne m'amufe & tout m'ennuye. M. Faufter lui propofe de prendre un Amant pour fon Médecin. Elle dit que le remede eft pire que le mal. Vous l'avez donc effayé, répliqué til? Non pas à Londres, répondelle. M. FAUSTER. En France, Miledi, l'auriez-vous éprouvé ? Me taire, c'eft affez répondre. La FRIVOLITÉ. Chere Mifs, votre cœur s'en eft-il bien trouvé? MISS BLAR. Au mieux le premier jour, je crus alors re Pour la premiere fois le jour me parut beau, Et je goûtai le bonheur d'être : Le fecond jour mon plaifir s'altéra, Mon Amant fut abfent, mon cœur en fou pira; Le troifieme il revint, & chaffa ce nuage; Et tout mon bonheur difparut. En quatre mots, voilà mon histoire finie; Tout calculé bien justement, Je n'ai vécu que trois jours dans ma vie. La Frivolité lui demande le nom 'de fon Amant; elle dit que c'est fon favori: ce fripon de Marquis qu'elle lui a fait connoître. Elle ajoute qu'elle a toujours confervé exactement fa fageffe malgré tout fon amour. C'eft un effort bien furprenant. MISS BLAR... Monfieur, particulierement Dans une fille de Spectacle. M. Faufter paroît furpris, & lui avoue qu'il la croyoit Miledi. MISS BLAR. Souvent je le fuis au Théâtre. M |