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fervir le pape par tout le royaume comme fon pere

AN. 1107. fpirituel.

Le pape celebra à S. Martin de Tours le dimanche Latare quatriéme de Carême ; qui cette année 1107. fut le vingt-quatriéme de Mars; & il portoit la tiare pontificale fuivant l'ufage de Rome. Enfuite il vint à S. Denis en France où il fut reçû par l'abbé Adam avec les honeurs convenables. Mais ce qu'il y eut de memorable, ajoûte Suger qui étoit prefent, c'eft que - contre la coûtume des Romains, il ne defira ni l'or, ni l'argent, ni les pierreries de ce monaftere, comme on le craignoit : il ne daigna pas même les regarder. Il fe profterna humblement devant les reliques, priant avec larmes, & demanda quelque petite partie des ornemens épifcopaux de faint Denis teints de fon fang, en difant: Ne faites pas difficulté de nous rendre quelque peu de vêtemens de celui que nous vous avons envoyé gratuitement pour apôtre.

:

A S. Denis le roi Philippe & le prince Loüis fon fils, vinrent trouver le pape & fe profternerent à fes pieds. Le pape les releva de fa main, & confera familierement avec eux des affaires de l'églife les priant tendrement de la proteger, à l'exemple de Charlemagne & des autres rois fes predeceffeurs : de refister hardiment aux tyrans, aux ennemis de l'églife, & en particulier au roi Henri. Les deux rois, car le prince en avoit déja le titre, lui promirent amitié, aide & confeil, & lui offrirent leur royaume. Et comme il devoit aller à Chaalons fur Marne conferer avec les Ambassadeurs du roi d'Allemagne, ils lui donnerent pour l'accompagner en ce voyage des

archevêques, des évêques, & l'abbé de S. Denis avec. AN. 1107. lequel étoit Suger.

Le pape attendit quelque tems à Chaallons les Ambaffadeurs du roi Henri, qui étant arrivez, furent logez à S. Menge. C'étoit l'archevêque de Trêves, l'évêque d'Halberftat, l'évêque de Munster, plufieurs comtes & le duc Guelfe, qui faifoit toûjours porter une épée devant lui, étant d'ailleurs terrible par la hauteur & la groffeur de fa taille, & le ton élevé de fa voix : tous ces ambaffadeurs fembloient être venus plûtôt pour intimider que pour raifonner.

LIV. Conference de

Ils laifferent à leur logis le chancelier Albert en qui l'empereur avoit une entiere confiance, & vin- Chaalons. rent à la cour du pape en grande troupe & avec un grand appareil. L'archevêque de Trêves le plus éloquent & le plus poli de tous, & qui parloit bien françois, porta la parole; & falua le pape & la cour Romaine avec offre de fervices de la part de l'empereur, fauf le droit de fa couronne. Puis il ajoûta: Telle eft la caufe de l'empereur nôtre maître, pour laquelle nous fommes envoyez. Dés le tems de nos predeceffeurs hommes faints & apoftoliques, de faint Gregoire le grand & des autres, le droit de l'empereur eft qu'avant que l'élection d'un évêque foit publiée, elle doit être portée à fa connoiffance: fila perfonne cft convenable, il y donne fon confentement: puis l'élection faite par le clergé fur la demande du peuple eft rendue publique; & l'élû étant facré librement & fans fimonie, revient à l'empereur pour. recvoir l'inveftiture des régales par la crosse & l'anneau, & lui parte foi & hommage. Et il ne faut pas s'en étonner; car il ne doit point poffeder autrement

AN. 1107.

les villes, les châteaux, les peages & les autres droits qui appartiennent, à la dignité imperiale. Si le pape le fouffre, l'état & l'églife demeureront heureufement unis pour la gloire de Dieu. Ce que l'on nomme ici regales font les biens temporels & les droits que l'églife poffede par conceffion des fouverains.

Aprés que l'archevêque de mayence eût ainsi parlé, l'évêque de Plaifance répondit au nom du pape: L'églife rachetée par le précieux fang de Jefus Chrift, & mife en liberté, ne doit plus être remise en fervitude; & elle feroit efclave du prince, fi elle ne pouvoit choifir un prelat fans le confulter. C'est un attentat contre Dieu, file prince donne l'inveftiture par la verge & l'anneau qui appartiennent à l'autel ; & les prelats dérogent à leur onction, s'ils foûmettent leurs mains confacrées par le corps & le fang de N. S. aux mains d'un laïque enfanglantées par l'épée. A ce difcours les Ambaffadeurs Allemans murmuroient avec emportement, & n'euffent épargné ni les injures ni les mauvais traitemens, s'ils euffent pû le faire impunément. Ils fe contenterent de dire: Ce ne fera pas ici mais à Rome, que cette queftion se décidera, & -às coups d'épée. Mais le pape envoya au chancelier plufieurs perfonnes de confiance & de capacité pour s'expliquer avec lui paifiblement ; & le prier inftamment de travailler à la paix du royaume. C'eft ainfi que Suger rapporte cette conference de Chaalons. Un Ab Urferg. auteur Alleman ajoûte que Henri ne voulant pas que l'on décidast rien fur cette queftion dans un Royaume étranger, obtint un délai de toute l'année suivante: pour aller à Rome, & y examiner l'affaire dans un concile géneral.

Les Allemans s'étant retirez, le pape vint à Troyes, AN. 1107. où il avoit indiqué un concile depuis long-tems. Il

LV. จ Concile de

T

le tint vers l'Afcenfion, qui cette année 1107. étoit le Troyes. vingt-troifiéme de Mai; & fa principale intention tom. x. p. 754. étoit d'exciter au voyage de la terre fainte, & affermir la trêve de Dieu. Aufli y excommunia-t-on ceux qui la violeroient, & principalement les ufurpateurs des biens d'églife. On y défendit encore de brûler les maisons en aucune guerre, ni enlever les brebis ou les agneaux: ce que j'entens des guerres particulieres. On y rétablit la liberté des élections, & on confirma la condamnation des inveftitures. Plufieurs évêques d'Allemagne y furent fufpendus de leurs fonctions pour diverses causes.

Pendant ce concile l'églife de Dol en Bretagne envoya au pape des deputez, qui en fa prefence élûrent pour leur évêque Vulgrin chancelier de l'églife de Chartres; & le pape y donna fon confentement, fans avoir égard aux excufes de Vulgrin qui étoit prefent. Il s'en plaignit fortement à Ives fon évêque, qui en écrivit au pape en ces termes : Quoiqu'il foit homme Ivo. ep.176. de lettres & de bonnes mœurs, il allegue toutefois plufieurs raifons de fon infuffifance; & dit qu'il n'y a rien qu'il ne foit preft à fouffrir, plûtôt que de fubir en ce tems-ci la charge de l'épiscopat, Vous savez que les loix feculieres ne permettent pas de marier un fils de famille fans fon confentement; combien 1, 12. Cod. d eft-il plus neceffaire pour donner un époux à l'églife? "". & quel bien pourra-t-il faire en agiffant par contrainte? Je vous prie donc à genoux, de ne l'y pas engager par vôtre autorité. Je fuis obligé de voir à fon falut autant qu'il m'eft poffible, puifque

pour

AN. 1107.

ep. 178.

Poenit. Theod.

Sup. liv. LXIV.

22.21.

jc

l'ai levé des fonts. L'églife de Dol ayant écrit à Ives de Chartres afin qu'il obligeast Vulgrin à accepter: Ives répondit, qu'il n'en avoit pas le pouvoir, Il n'y a que le pape', ajoûte-t-il, qui puiffe donner à l'églife des évêques même malgre eux: ainfi je ne contraindrai nôtre frere en ceci, qu'entant que le pape m'y contraindra.

Pendant que le pape Pascal étoit deça les monts, tom. 2. p. 536. il termina la conteftation qui duroit depuis fi longtems entre Gui archevêque de Vienne & Hugues évêque de Grenoble, au fujet du territoire de Salmoriac, les faifant convenir d'un partage entre les deux églifes. L'accord fut fait à Lion dés le vingt-neuviéme de Janvier en presence des évêques d'Albane, de Plaifance, du Pui, de Viviers, de Geneve, de Valence & de Maurienne : mais la bulle n'en fut expediée le fecond jour d'Aouft de cette année 1107. Indiction quinziéme. Le pape aprés le concile de Troyes retournoit lentement en Italie, & il fut reçû à Rome avec une joye incroyable.

Ab Visperg.

LVI. Concile de Lon

dres.

vor.

que

Le roi d'Angleterre ayant affemblé fa cour à Pâques, qui cette année 1107. fut le quatorziéme d'AEdmer. 4. No- vril: les réglemens qu'il avoit réfolu d'y faire touchant les églises, furent differez jufques à la Pentecôte, parce que le pape avoit mandé de lui envoyer au concile de Troyes Guillaume de Varelvaft & le moine Baudouin, qui avoient été auparavant deputez à Rome ; & le roi efperoit aprendre à leur retour quelque chofe de nouveau touchant les intentions du pape. Mais l'archevêque Anfelme étant tombé dangereufement malade entre Pâques & la pentecôte, le concile qui fe devoit tenir à cette fête fut remis au

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