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diacre pour faire juftice. L'archevêque fe leva & AN. 1114commença par demander grace, de ce qu'ayant été apellé par des lettres du pape, il n'étoit pas venu à sa

cour.

Il propofa des excufes, que le pape fit examiner par des cardinaux & des archevêques établis juges par le faint fiege. Ils fe retirerent à part; & aprés avoir long-tems conferé ensemble, ils dirent à l'archevêque de Benevent en préfence de tout le concile: Puifque vous dites que ce n'eft pas par mépris, mais par crainte que vous n'êtes pas venu à la cour, y étant appellé, nous jugeons que cette excufe n'eft pas canonique. On lut enfuite les Canons fur ce fujet. Ce préliminaire étant jugé, le diacre appella une feconde fois l'archevêque de Benevent pour faire justice. Il fe leva & demanda : Sur quoi? Sur ce, dit le pape, que vous avez pris les regales de faint Pierre contre nôtre volonté : vous vous êtes faifi des clefs des portes, vous avez envahi le palais & chaffé Landulfe, vous avez porté un cafque & un bouclier : vous avez obligé Foulques à prêter ferment, introduit les Normans & le refte. L'archevêque répondit: Je n'ai pris les regales de faint Pierre que pour vôtre fervice: car quand vous étiez à Benevent vous m'avez recommandé la ville. Je n'avois pas pris les clefs; & nous favons tous que celui qui les garde vous eft fidele. Je n'ai point pris de bouclier: il eft vrai que j'ai porté un cafque pour me garantir des coups de pierre. Je n'ai point fait entrer de Normans dans la ville, mais feulement feize Lombards pour fecourir le peuple. Le ferment de Foulques & celui du peuple n'ont point été faits par mon ordre.

AN. II14.

Chr. Caff. IV.

6. 49.

Alors le pape commanda encore aux cardinaux & aux autres juges de dire leurs avis fur ces faits. Ce que voyant l'archevêque de Benevent, il pria le duc Guillaume, le comte Robert, Pierre de Leon & les évêques de prier le pape de ne les pas deshonorer publiquement; offrant d'aller en exil, même outre mer. Ils fe jetterent aux pieds du pape, mais ils n'en pûrent rien obtenir. Les juges eux-mêmes aprés avoir déliberé ne pouvoient le réfoudre à prononcer: mais le pape leur ordonna par la foi qu'ils devoient à faint Pierre & à lui, de dire ce qui étoit conforme aux canons. Alors l'évêque de Porto parla le premier, & dit avec de grands fentimens de douleur: Parce que vous avez les regales de S. Pierre, gardé les clefs des portes, envahi le palais, chassé Landulfe, & méprisé de venir à la cour, y étant appellé : nous prononçons contre vous la fentence de dépofition. L'archevêque de Capouë & le cardinal Gregoire prononcerent de même; & comme les autres juges vouloient parler en conformité, l'archevêque de Benevent se leva pâle & défait : on ôta fon fiege, & il fortit du concile comme hors de lui. Cette affaire au fonds étoit purement temporelle, mais on y voit encore la forme des jugemens canoniques.

pris

En ce même concile l'archevêque de Cofence accufa Roger comte de Sicile, de l'avoir chaffe de fon fiege, & contraint de fe rendre moine au MontCallin. Sur quoi le pape dit: Ce n'est pas moi que regarde cette affaire, c'est l'abbé du Mont-Caflin, fuivant le pouvoir que lui en ont donné mes prédéceffeurs. L'abbé dit: Dieu ne veut point de fervices forcez : c'est pourquoi fi vous avez pris l'habit mo

nastique,

nastique contre vôtre volonté, mettez-le aux pieds AN. 1114. du pape vous pourrez enfuite le reprendre ou le laiffer. L'archevêque de Cofence mit auffi-tôt fon habit monaftique aux pieds du pape, & jamais on ne put lui perfuader de le reprendre.

XXVIII.

Retraite de S.

miens.

Vitalib, 2.,

Godefroi évêque d'Amiens étoit fatigué depuis long-tems de l'indocilité de fon peuple, & des vio- Godefroi d'Alences exercées par les nobles, au mépris de la treve de Dieu. Celui dont il eut le plus à foufrir, fut Guermond vidame de Piquigny, qui, bien que fon vaffal, 30. prit à fes yeux un autre de fes vaffaux nommé Adam, contre la paix qu'il avoit jurée, & le tint dans une dure prifon : fans être touché ni de l'excommunica- lib. 1.c. tion de l'évêque, ni de fon humilité, qui le porta jufques à aller trouver Guermond chez lui, & fe jetter publiquement à fes pieds. Enfin Guermond étant c.s. pris lui-même, le faint évêque cut encore la charité de le délivrer. Les bourgeois d'Amiens ayant obtenu du roi le droit de commune, à l'exemple de ceux de Laon, l'évêque en favorifa l'établissement: mais En- Guibert. 111. de guerran comte de la ville voyant diminuer par là fes anciens droits, s'y oppofa comme à une rebellion, & attaqua les bourgeois à main armée. Ils le chafferent de la ville & lui firent la guerre, foûtenus par l'évêque & par le vidame. Mais ayant été abandonnez par Thomas de Marle, qu'ils avoient appellé à leur fecours, ils ne pûrent se maintenir.

Godefroy ne pouvant donc plus foufrir les défordres dont fon diocefe étoit agité, résolut de tout quiter; & ayant oüi parler de la fainte vie des ermites de la Chartreufe, il s'y retira. Guigues homme distingué par sa science & par sa vertu, en Tome XIV.

Bb

vita S. c. 14.

c. 6.

étoit alors prieur. Quand il vit la fainte fimplicité An. 1114 du prélat, il en rendit graces à Dieu, & l'auroit auffi

XXIX.
Concile de

Beauvais.

tôt reçû dans fa communauté, s'il n'avoit craint que le pape, l'archevêque de Reims & les autres évêques de France ne l'euffent obligé à en fortir. Il lui donna toutefois une cellule, où le faint évêque ravi de se trouver en liberté s'appliquoit à tous les exercices fpirituels avec la même ferveur, que s'il n'eût fait que commencer de fe donner à Dieu.

Cependant Conon évêque de Palestrine, cardinal & légat du pape, tint un concile à Beauvais avec les tom. p. 797. archevêques de Reims, de Bourges & de Sens, & leurs fuffragans le fixiéme de Décembre 1114. En ce concile on excommunia l'empereur Henri ; & on renouvella plufieurs decrets des derniers papes touchant la confervation des biens ecclefiaftiques, & les autres points de difcipline les plus néceffaires alors. On y fit de grandes plaintes contre Thomas feigneur de Marle, qui défoloit par fes pillages les diocefes de Laon, de Reims & d'Amiens: fans épargner les églifes, les monafteres, ni les pauvres. Il tuoit de fang froid fes prifonniers, ou les faifoit pendre par les poûces, & mourir fous les coups, ou les laissoit périr en prifon. Le légat prononça contre lui, bien qu'abfent, fentence d'excommunication, & le déclara infâme, déchû de l'ordre de chevalerie & de toute dignité.

Guib. vita S. 21.c.17.

Lifiard évêque de Soiffons, alla confulter ce concile touchant des heretiques qu'il avoit decouverts dans fon diocefe. Un païfan nommé Clementius avec son frere Ebrard, paffoient pour être des premiers de la fecte, & l'enfeignoient fecretement &

avec une extrême diffimulation. Ils difoient que l'incarnation du fils de la Vierge n'avoit été qu'un fantôme. Ils tenoient pour nul le baptême des enfans avant l'âge de raison ; & appelloient leur baptême la parole de Dieu, y employant un long circuit de difcours. Ils avoient tellement en horreur le mystere de nos autels, qu'ils nommoient bouche d'enfer la bouche des prêtres. Ils condamnoient le mariage & tout fruit de l'union de fexes: d'où vient qu'ils ne mangeoient rien de ce qui eft produit par cette voye, comme la chair & le lait. Ils tenoient leurs affemblées dans des foûterrains & d'autres lieux cachez, où on les accufoit de commettre des abominations inoüies, Guibert abbé de Nogent qui rapporte cette histoire, ajoûte: Si vous relifez les herefies rapportées par S. Augustin, vous n'en trouverez point de plus conforme que celle des Manichéens.

AN. 1114.

L'évêque de Soiffons ayant interrogé les deux freres, ne put en tirer la confeffion de leurs erreurs ; & les deux témoins qui avoient déposé contre eux étoient abfens ; savoir, une femme que Clementius avoit féduite pendant un an, & un diacre qui avoit oüi de sa bouche quelques herefies. L'évêque faute de preuve les condamna au jugement de l'eau exorcifée. Il dit la meffe où il les communia, en difant: Que le corps & le fang de N. S. vous foit aujourd'hui une épreuve : puis il fit l'éxorcifme de l'eau, où Clementius étant jetté n'alla point au fonds. Ainfi il fut tenu pour convaincu, & mis en prison avec fon frere, qui avoit confeffé les erreurs, mais fans y renoncer. On arrêta auffi deux autres heretiques tresconnus, qui étoient venus de Dormans à ce fpecta

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