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AN. 1131.

6. 15.

croix & les reliques pour les armes, il commença avec fon clergé à chanter des pfeaumes, pour recommander à Dieu le combat qu'il alloit foutenir. Les barbares en furent touchez; ils admirerent ces gens qui chantoient à l'article dela mort, ils s'adoucirent & les plus fages prenant en particulier·leurs sacrificateurs, difoient que leur devoir étoit de défendre leur religion par raifon & non par force. Ainfi ils fe retirerent peu à peu. C'étoit un vendredi ; & l'évêque avec les fiens pafferent ce jour & le fuivant en jeûnes & en prieres.

2;

Il y avoit à Stetin un homme noble nominé Viftac, qui peu de tems auparavant étant allé en courfe fur mer, fut pris par les ennemis & enfermé dans une obfcure prison. Ayant prié Dieu ardemment de le délivrer, il s'endormit & vit en fonge l'évêque Otton, qui l'avoit baptifé au premier voyage, & qui lui dit: Je fuis venu pour te délivrer, mais ne manque pas enfuite de porter mes ordres à Stetin. Vistac éveillé effaye de marcher, & fe fent libre de fes fers, il s'avance à la porte de la prifon & la trouve ouverte: au bord de la mer il rencontre une nacelle avec laquelle il fe fauve. Etant arrivé à Stetin, il affemble les habitans, leur raconte fon avanture, & ajoûte : Cette ville est menacée d'une terrible vengeance de -Dieu, parce que vous avez profané fon culte, fort en le quittant pour les idoles, foit en les joignant avec lui. Quand l'évêque fut arrivé, Viftac parloit encore plus hardiment contre l'idolâtrie, & l'exci-toit à prêcher le peuple.

Le dimanche étant venu, l'évêque aprés avoir celebré la meffe encore revêtu des ornemens & la croix

c. 16.

'marchant devant lui, fe fit conduire au milieu de la AN. 1131. place publique, & monta fur des dégrez de bois d'où on haranguoit le peuple. Comme il eut commencé à parler & que la plupart l'écoutoient avec plaifir : un facrificateur d'idoles fendit la preffe, & de fa voix qui étoit tres forte étouffant celle de l'évêque, il le chargea d'injures, & exhorta le peuple à punir cet ennemi de leurs dieux. Ils avoient tous des dards à la main, & plufieurs fe mirent en devoir de les lancer: mais ils demeurerent immobiles en cette posture, fans pouvoir ni darder, ni abaiffer les mains, ni fe remuer de leur place. C'étoit un spectacle agréable aux fideles ; & l'évêque prenant occafion de ce miracle, leur dit : Vous voyez, mes freres, quelle est la puiffance du Seigneur : que ne jettez-vous vos dards? combien demeurerez vous en cet état ? que vos dieux vous fecourent s'ils le peuvent. Enfin aprés leur avoir donné fa benediction il fe retira.

Cependant les anciens & les fages de la ville tinrent confeil depuis le matin jusques à minuit, & conclurent qu'il faloit extirper entierement l'idolâtrie & embraffer de nouveau la religion chrétienne. Viftac vint auffi-tôt apporter à l'évêque cette agréable nouvelle ; & le lendemain le prelat les trouva tous disposez & soumis : il reconcilia les apoftats par l'impofition des mains, batifa les autres, & confirma leur foi par plufieurs miracles. De Stetin il paffa à Julin, dont il reduifit tous les habitans fans aucun obstacle, tant ils étoient frappez de l'exemple de la capitale.

c. 18.

6.220

e. 28.

Saint Otton voulut enfuite paffer chez les Rutheniens j'entens les habitans de l'ifle de Ruden, qui Bauaran. Rugia.

Iii iij

AN. 11 31.

c. 29.

XIV.
Eglife de Jerufa-

G. Tyr. XII, c. 25.

faifoit autrefois partie de celle de Rugen. Mais les Pomeraniens lui representerent que c'étoit des hommes feroces, legers & brutaux ; & d'ailleurs l'évêque confiderant que ce pays dépendoit de l'archevêque de Danemarc, ne voulut pas y prêcher fans fa permiffion. Il lui envoya donc un prêtre nommé Inuan, avec des lettres & des prefens. Il fut reçû de l'archevêque avec une tres-grande joye ; & ce prelat s'informa avec foin de l'état de S. Otton, qu'il connoiffoit depuis long-tems par fa reputation, de fa doctrine

& de fes actions. Car c'étoit un homme droit & fimple, dont la science & la pieté n'étoit pas mediocre, quoique fon exterieur fentît la rufticité Sclavone. Quant à la miffion chez les Rutheniens, l'archevêque dit qu'il ne pouvoit donner alors de réponse; parce qu'il falloit auparavant confulter les feigneurs Danois. Le prêtre Inuan ne put attendre ce delai, & retourna chargé de prefens retrouver fon maître S. Otton : qui reçut peu de tems aprés des nouvelles lefquelles il étoit rappellé à Bamberg. Il revint par la Pologne, au grand contentement du duc & de fes autres amis, & arriva à Bamberg la veille de S. Thomas vingtiéme de Decembre.

par

A Jerufalem le Patriarche Etiene mourut l'an lem. Foulques roi. 1130 n'ayant pas achevé deux ans de pontificat. Quelques-uns difoient qu'il avoit été empoisonné ; & il paffoit pour conftant, que le roi Baudouin l'étant venu voir pendant fa derniere maladie ; & lui ayant demandé comment il fe portoit, il répondit: Seigneur, je fuis maintenant comme vous me voulez. Son fucceffeur fut Guillaume prieur du S. Sepulchre, homme fimple & mediocrement lettré, mais de bon

6.26.

ne mine, & recommandable par ses mœurs. Il étoit AN. 1131. Flaman de nation & fort agréable au roi, aux feigneurs & à tout le peuple, & tint ce siege quinze

ans.

L'année suivante 1131. le roi Baudouin fe voyant malade à la mort, fortit de fon palais fans aucune marque de fa dignité, & fe fit porter en la maison du patriarche, pour être plus prés du S. Sepulchre. Là il fit venir Melifende fa fille aînée, le comte Foulques fon gendre & leur fils Baudouin, âgé de deux ans ; & en prefence du patriarche, des prelats & de quelques feigneurs, il leur laiffa le gouvernement du royaume & la pleine puiffance avec fa benediction: puis il prit un habit de religieux, & promit d'en garder les vœux s'il vivoit. Ainfi mourut le roi Baudoüin du Bourg le vingt-uniéme jour d'Aouft 1131. &fut enterré au S. Sepulchre avec fes deux predeceffeurs.

C. 2.

Foulques fon gendre & fon fucceffeur, étoit au- liv. xiv. paravant comte d'Angers, du Mans & de Tours, fils de Foulques Rechin & de Bertrade, ou Bertelée de Montfort, qui époufa depuis le roi Philippe. Foulques le jeune époufa en premieres nôces Guiburge fille d'Elie comte du Maine, dont il eut deux fils & deux filles. Aprés qu'elle fut morte il alla en pelerinage à Jerufalem, où il entretint un an durant cent chevaliers à fes dépens, & gagna les bonnes graces du roi & des feigneurs. Etant de retour chez lui il mariafes enfans & regla ses états ; & quelques années aprés il fut rappellé à Jerufalem par le roi Baudouin, qui l'avoit choifi pour fon gendre. Il fut couronné solemnellement le jour de l'exaltation de la fainte croix,

6. 1.

AN. 1131. quatorziéme de Septembre, dans l'églife du S. Sepulcre, par le patriarche Guillaume: & quoiqu'il eut plus de foixante ans, il en regna dix.

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XV.

Le pape Innocent étoit cependant en France, & Le pape à Clair- voulut vifiter par lui-même le monaftere de Clairvaux: où il fut reçû avec une affection finguliere, par les moines vêtus pauvrement, portant une croix de bois mal polie & chantant modeftement. Les évêques pleuroient & le pape lui-même, & tous admiroient la gravité de cette communauté: voyant que dans une joye fi publique ils avoient tous les yeux arrêtez à terre, fans les tourner de côté, ou d'autre par curiofité: en : en forte qu'ils ne voyoient personne étant regardez de tout le monde. Les Romains ne virent rien dans cette églife, qui excitât leur cupidité : il n'y avoit que les murailles toutes nuës; & ces moines n'avoient rien de defirable que l'imitation de leurs vertus. La joye de cette reception fut toute fainte; on fervoit à manger du pain bis, des herbes, des legumes ; & s'il fe trouva quelque poiffon, ce fut pour le Mabill. Chr. pape. L'année precedente S. Bernard avoit refusé l'évêché de Gennes vacant par la mort de Sigefroi ; & cette année 1131. il refufa l'évêché de Chaalons pour lequel il avoit été élû, & y fit mettre en fa place Ġeoffroi

Bern.

pape.

XVI. Lettres de S.

abbé de S. Medard de Soiffons.

Pendant que le pape Innocent étoit en France Bernard pour le S. Bernard écrivit plufieurs lettres tres-fortes à ceux qui ne le reconnoiffoient pas encore, pour les amener à son obéïssance. Il en parle ainfi à Hildebert archevêque de Tours, que Gerard d'Angoulesme s'efforçoit d'attirer au parti de Pierre de Leon : Tous les princes n'ont-ils pas reconnu qu'il eft veritablement

epift. 124.

l'élû

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