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faires les plus fecretes de ceux qui l'alloient confulter.

Par ces moyens on pouvoit répon→ dre même fans avoir befoin de recevoir de billets, & ces moyens n'étoient pas fans doute inconnus aux Prêtres de l'Apollon de Claros, s'il eft vrai qu'il fuffifoit de leur dire le nom de ceux qui les confultoient. Voici comme Tacite en parle au 2. 1. des Annales. Germanicus alla confulter Apollon de Cla→ ros. Ce n'est point une femme qui y rend les Oracle's comme à Delphes, mais un homme qu'on choifit dans de certaines familles, & qui eft prefque toujours de Milet. Il fuffit de lui dire le nombre & les noms de ceux qui viennent le confulter, enfuite il fe retire dans une Grotte, & ayant pris de l'eau d'une fource qui y eft, il vous répond en Vers à ce que vous avés dans l'efprit, quoique le plus fouvent il foit très-ignorant,

Nous pourrions remarquer ici que I'on confioit bien à une femme l'Oracle de Delphes, parce qu'il n'étoit queftion que d'y faire la Démoniaque, mais que comme celui de Claros avoit plus de difficulté,on ne le donnoit qu'à un homme. Nous pourrions remarquer encore que l'ignorance du Pro

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phete, fur laquelle roule une bonne partie de ce qu'il y a de miraculeux dans l'Oracle, ne pouvoit jamais être fort bien prouvée; qu'enfin le Demon de l'Oracle, tout Demon qu'il étoit, ne pouvoit fe paffer de fçavoir les noms de ceux qui le confultoient, mais nous n'en fommes pas-là présentement c'eft affés d'avoir fait voir comment on pouvoit répondre nonfeulement à des billets cachetés, mais à de fimples penfées. Il eft vrai qu'on ne pouvoit pas répondre aux pensées de tout le monde, & que ce que le Prêtre de Claros faifoit pour Germanicus, il ne l'eût pas pû faire pour un fimple Bourgeois de Rome.

CHAPITRE X V.

Des Oracles en Songes. LE nombre eft fort grand des Ora

cles qui fe rendoient par Songes. Cette maniere avoit plus de merveilleux qu'aucune autre, & avec cela elle n'étoit pas fort difficile dans la pratique,

Le plus fameux de tous ces Oracles étoit celui de Trophonius dans la Beotie. Trophonius n'étoit qu'un fimple Heros, mais fes Oracles fe rendoient avec plus de ceremonies que ceux d'aucun Dieu. Paufanias qui avoit été luimême le confulter, & qui avoit paffé par toutes ces céremonies, nous en a laiffé une description fort ample, dont je croi qu'on fera bien aife de trouver ici un abregé exact.

Avant que de defcendre dans l'Antre de Trophonius, il falloit paffer un certain nombre de jours dans une efpece de petite Chapelle qu'on appelloit de la Bonne Fortune, & du Bon Genie. Pendant ce tems on recevoit des expiations de toutes les fortes; on s'abftenoit d'eaux chaudes; on fe lavoit fouvent dans le Fleuve Hircinas; on facrifioit à Trophonius, & à toute fa famille, à Apollon, à Jupiter furnommé Roi, à Saturne, à Junon, à une Cerés Europe qui avoit été Nourrice de Trophonius, & on ne vivoit que des chairs facrifiées. Les Prêtres apparemment ne vivoient auffi d'autre chofe. Il falloit confulter les entrailles de toutes ces Victimes, pour voir fi Trophonius

trouvoit bon que l'on defcendît dans fon Antre; mais quand elles auroient été toutes les plus heureuses du monde, ce n'étoit encore rien; les entrailles qui décidoient étoient celles d'un certain Belier qu'on immoloit en dernier lieu. Si elles étoient favorables, on vous menoit la nuit au Fleuve Hircinas. Là deux jeunes Enfans de douze ou treize ans vous frotoient tout le corps d'huile. Enfuite on vous conduifoit jufqu'à la fource du Fleuve, & on Vous y faifoit boire de deux fortes d'eaux, celles de Lethé qui effaçoient de votre efprit toutes les penfées prophanes qui vous avoient occupé auparavant, & celles de Mnemofine qui avoient la vertu de vous faire retenir tout ce que vous deviez voir dans l'Antre facré. Après tous ces préparatifs, on vous faifoit voir la Statue de Trophonius, à qui vous faifiés vos prieres; on vous équipoit d'une Tunique de lin; on vous mettoit de certaines bandelettes facrées, & enfin vous alliés à l'Oracle.

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L'Oracic étoit fur une Montagne dans une enceinte faite de pierres Dianches, fur laquelle s'élevoient des Obe Dd iiij

lifques d'airain. Dans cette enceinte étoit une caverne de la figure d'un four taillée de main d'Homme. Là s'ouvroit un trou affes étroit, où l'on ne defcendoit point par des degrés, mais par de petites échelles. Quand on y étoit defcendu, on trouvoit une autre petite Caverne dont l'entrée étoit affès étroite. On fe couchoit à terre; on prenoit dans chaque main de certaines compo fitions de miel, qu'il falloit neceffairement porter; on paffoit les pieds dans T'ouverture de la petite caverne, & auffi-tôt on fe fentoit emporté au-dedans avec beaucoup de force & de viteffe.

C'étoit-là que l'avenir se déclaroit, mais non pas à tous d'une même maniere. Les uns voyoient, les autres entendoient. Vous fortiés de l'Antre couché par terre comme vous y étiés enrré, & les pieds les premiers. Auffi-tôt on vous mettoit dans la Chaife de Mnemofine, où l'on vous demandoit ce que vous aviés vû ou entendu. Delà on vous ramenoit dans cette Chapélle du Bon Genie, encore tout étourdi & tout hors de vous. Vous repreniés vos fens peu à peu, & vous recommen

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