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S. V.

D. Si la nature doit fervir l'homme, d'où vient fes richeffes ne fe découvrent que par fucceffion? On jouit aujourd'hui des chofes qu'on a regardées avec indifférence durant un grand nombre de fiècles, ou que l'on a même abfolument ignorées.

R. Ces découvertes mêmes, la nouveauté des connoiffances & des ufages, font un aliment néceffaire à la curiofité, à l'intelligence & à l'induftrie de l'homme; il ne lui feroit point avantageux de connoître tous les fecrets & toutes les richeffes de la nature; mais il lui eft avantageux de les étudier, & l'activité de fa raifon lui en fait une tâche indifpenfable (a). L'économique difpenfation de la nature l'empêche de s'épuifer, même dans les fiécles de la plus grande lumiere; elle garde toujours quelque étonnant secret pour les générations fuivantes, & prépare de nouveaux tributs d'admiration à la grandeur & à l'intariffable puiflance de fon Auteur (b). On ne peut mieux exprimer cette vérité, que n'a fait un Hiftorien auffi élégant que judicieux. Hæc atque alia his fimila fubinde rariora miracula effector mundi oftendit, ut homines quantumvis in hac rerum univerfitate tam multa quotidiè fummá admira

(a) Cunda fecit bona in tempore fuo, & mundum tradidit difputationi eorum, ut non inveniat homo opus quod operatus eft Deus ab initio ufque in finem. Eccle. 3.

(b) Dies diei erudat verbum, & nox nocti indicat fcientiam. Pf. 118. Omne opus hora fua fubminiftrabit. Eccli. 39. Ut agnofeat generatio altera, filii qui najcentur & exurgent. Pl. 77. Multa abfcondita funt majora his, pauca enim vidimus operum ejus. Eccli. 46.

tione digna confpiciant, tamen intelligant plura effe, quæ de infinité illá vi fapientiáque ignorantz & falutem ex inufitatis hifce, quoniam affuetudo cæteris authoritatem ademit, in admirationem ejus & venerationem excitentur. Sacch. Hift. Soc. part. 2, anno 1560, n. 276.

D. Pourquoi quelques Pays font-ils comblés de toutes les faveurs de la nature, tandis que d'autres font dévoués aux glaces de l'hiver, & à toutes les rigueurs de l'indigence? Si la terre n'eft belle & féconde que pour les plaifirs & les befoins de l'homme, pourquoi l'homme ne jouit-il point par-tout de fes bienfaits?

R. Il n'y a pas de Pays au monde qui jouiffe à-la-fois de tous les avantages du climat, du fol, du commerce, &c. mais auffi n'y en a t-il pas qui en foit abfolument dépouillé. Ceux qui pa- Sed Deus roiffent le moins bien partagés dans les diftribu- temperavit corpus, ci tions de la nature, ont de grandes reffources qui cui deerat, leur font propres. La Norvége, par exemple, & rem tribuen.

abundantio

les Provinces foumifes aux frimats du Pôle, trou do honorem, vent dans leur fituation même une fource de ri- "t non fit chelles fchifma in que des régions plus fortunées pourroient corpore. envier, & que nous allons effectivement cher-1. Cor. 12, cher chez eux (a). C'eft ce que M. de Pontopidan, Evêque Luthérien de Bergen, en Norvége, faifoit obferver à fes Diocéfains, dans une belle Lettre paftorale qu'il leur a adreffée, il y a peu

(a) Voici comme un ancien Poëte a parlé sur ce fujet :
Nonne vides, croceos ut Tmolus odores,
India mittit ebur, molles fua rura Sabai,
At Chalybes nudi ferrum, virofaque Pontus
Caftorea, Eliadum palmas Epirus equarum..
Continuò has leges æternaque fœdera certis
Impofuit natura locis. I. Georg.

d'années, & qui a paru dans les Journaux du temps (a)... La mer fubjuguée par l'homme, a réuni en quelque forte toutes les régions, & enrichi chaque Province des productions de tous les climats... La fertilité variée & inégale de la terre, eft devenue le lien des Nations, & a réduit le monde en une fociété formée par des befoins & des fecours.... Si, dans quelques plages, les poifons font multipliés, les antidotes le font auffi. Chaque mal trouve par-tout le reinede qui le combat.... Les folitudes mêmes les plus hériffées, les landes fauvages & brutes ont leur ufage, elles fervent dans la nature comme les ombres dans un tableau ; elles donnent aux autres parties plus de relief & d'éclat; elles en font fentir toute la beauté. Dans un Pays fertile & riant, l'habitude de voir les merveilles qui nous envi→ ronnent & fe fuccédent fans interruption, nous y rend infenfibles. L'affiduité du spectacle en émoufle l'agrément, & ralentit l'impreffion profonde qu'il devroit faire fur les efprits, auffi-bien que fur les yeux. Nous réfervons toute notre admiration pour ce qui est étranger ou extraordinaire. La nouyeauté, plutôt que la merveille de la chofe même, eft ce qui réveille notre attention. Nous demeurons diftraits au milieu de tant de fujets de réflexions, & nous fommes conduits par cette distraction à l'ingratitude. Mais la vue des montagnes arides & des landes brûlées, montre à quelle demeure nous pourrions être réduits, & que c'est pour nous une faveur infigne d'habiter

1760,

Elle a été imprimée à Paris, chez Nyon, en

une contrée délicieufe, à laquelle nous n'avions aucun droit.

S. V I.

D. Quand on ne pourroit affigner la cause finale de quelques êtres, s'enfuivroit-il qu'effectivement ils n'en ont pas ?

R. Les roues & les refforts d'une montre ne ceffent pas d'être néceffaires pour la direction du ftyle, parce que bien des perfonnes ignorent la maniere dont ils concourent à produire cet effet. La deftination de bien des chofes nous eft encore inconnue. Notre corps renferme des énigmes que l'anatomie n'a pas encore expliquées. Bien des êtres qu'autrefois on croyoit inutiles, font maintenant reconnus pour les premiers liens de l'univers.

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Confentement de tous les hommes dans la profeffion d'un Dieu. Questions fur quelques auributs de Dieu. Digreffion Jur l'existence du mal Optimifme.

S. I.

D. LE CONSENTEMENT de toutes les Nations dans la croyance d'un Dieu, eft-il une preuve bien folide de fon exiftence?

R. Le moyen d'en douter, puifque ce confentement démontre la force des preuves métaphyfiques, phyfiques & morales, qui établissent la néceffité d'un être Souverain? D'une extrémité du monde à l'autre tous les hommes ont acquiefcé

de concert à la vérité des principes qui renverfent l'Athéifme, tous ont fenti que la matiere étoit incapable de se mouvoir; par-tout où ils fuppofoient du mouvement, ils fuppofoient un efprit moteur: tous ont reconnu que l'ordre qui regne dans l'univers eft l'ouvrage d'un Créateur intelligent & fage; tous ont compris la néceffité d'un ordre moral, la distinction du bien & du mal, du vice & de la vertu; tous ont cédé au sentiment invincible de leur dépendance & à l'effor de l'âme vers fon Auteur.

D. N'y a-t-il pas des opinions fauffes qui ont gagné également le fuffrage des Nations?

R. Ces opinions, 1.° ont été moins unanimes, moins univerfelles. 2.° N'étant appuyées d'aucun motif raisonnable, on ne peut attribuer leur adop tion à la force des raifons qui les établissoient; mais l'existence de Dieu étant prouvée d'ailleurs, un acquiefcement général à ces preuves eft un grand préjugé en faveur de leur folidité & de leur force à convaincre. 3.° Plufieurs de ces opinions faulles ou regardées aujourd'hui pour telles font fondées fur le témoignage des fens qui font trompeurs; celle des revenants, p. ex. n'a pour garant que le rapport des yeux: mais Dieu ne tombant pas fous les fens, ne peut être connu chez toutes les Nations de la terre que par un témoignage général, uniforme & évident de la raifon. 4. Quoique fauffes peut-être en elles-mêmes ces opinions font la fuite & la conféquence de quelque principe inconteftable. On n'a cru aux revenants que parce qu'on a cru l'immortalité de l'âme, qui eft une vérité du premier ordre. L'opinion de la magie tient à l'exiftence des efprits, que les Sages n'ont jamais niée.

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