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Enfin, fi malgré la foibleffe de ines lumieres & les bornes étroites de mon intelligence, je trouve tant de raifons & tant de motifs de m'attacher à la croyance d'un enfer éternel, puis-je douter que cette éternité ne foit fondée fur beaucoup d'autres raifons bien plus fatisfaifantes encore & bien plus invincibles, cachées dans la fagesse de Dieu, dans la juftice de Dieu, dans la fainteté de Dieu, puifque ma foi m'aflure qu'elles y font, & que je fuis abfolument incapable de connoître par les efforts de mon efprit toutes les richeffes de ce profond abîme? Cette réflexion regarde toutes les vérités de la Foi.

S. IV.

D. Pourquoi l'Eglife prie-t-elle Dieu de délivrer les ames des Fidèles trépaflés des fupplices de l'enfer (a), fi ces fupplices font éternels, & fi l'arrêt qui les ordonne eft irrévocable?

R. Jamais l'Eglife n'a prié pour les réprouvés: elle fixe fes regards fur le moment qui termine la vie des Fidèles, & prie Dieu de les délivrer, ou plutôt de les préferver de la damnation, de les faire paffer de la mort à la vie (b). Il ne faut connoître ni les ufages, ni les prieres, ni l'efprit des folemnités de l'Eglife, pour ignorer qu'elle envifage comme préfents tous les objets dont elle s'occupe. Elle célèbre la Nativité, la Réfurrection, l'Afcenfion de Jéfus-Chrift, tous les Myfteres, &

>>rement réfléchi & tout bien examiné, je n'ai rien trouvé » qui foit plus felon la fageffe, la raison & la vérité. » (a) Abfolve, Domine, animas omnium fidelium defun&o. rum de pœnis inferni & de profundo lacu; libera eas de ore pro defund, leonis, &c. Expreflions qui pourroient auffi s'apliquer au

Offert. m.

Purgatoire.

(b) Fac cas de morte tranfire ad vitam. Ibid.

tous les événements qui l'intéreffent, comme s'ils s'accompliffoient actuellement. Par là l'attention des Fidèles eft mieux foutenue, & leur dévotion plus animée. C'est d'où vient le proverbe de præSenti gaudet Ecclefia. Souvent même elle envisage l'objet de fes Fêtes comme n'étant pas encore arrivé, & femble le chercher dans des jours éloignés (a).

D. Si la croyance d'un enfer eft fi raisonnable, pourquoi l'Eglife reconnoît-elle un Purgatoire, où les peines font paffageres?

R. C'eft comme fi je difois : Puifque la peine de mort est dûe aux criminels de lèfe- majefté, pourquoi un banniffement de quelques années eftil destiné à des hommes coupables de moindres fautes? Je ne fais s'il y a au monde une perfuafion plus raifonnable que celle d'un Purgatoire. Je conçois qu'un Proteftant imbu des préjugés de fa fecte. peut réfifter à toute autre preuve du Purgatoire; mais s'il eft de fang froid, il ne fe foutiendra pas contre ce que la raifon lui en apprend. Voici comme pourroit s'exprimer fur ce fujet un Orateur Philofophe & Chrétien: L'ame de l'homme, qui ceffe de vivre fur la terre, eft appellée au Tribu➡nal de Dieu : fes œuvres & fes vertus dépofent en fa faveur ; la Loi, qu'elle a faintement obfervée, » s'éleve pour la défendre & pour la faire couronner parmi les Saints. Une faute légere, une foibleffe prefqu'imperceptible, un petit défaut inféparable de la mortalité le montre dans la fo

(a) Rorate cœli defuper, & nubes pluant juftum. Excita, Domine, corda noftra ad præparandas unigeniti tui vias, ut per ejus adventum purificatis tibi mentibus fer vire mereamur.

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ciété de tant de mérites. Vous qui reconnoiflez » un Dieu juste, qui adorez un Dieu miféricor» dieux, & néanmoins un Dieu ennemi de toute iniquité, incapable par fon effence & fa nature de laiffer entrer dans fa maifon quelque chofe d'infecté par la contagion du péché; dites» moi, quelle fera la deftinée de cette ame jufte, & néanmoins chargée d'un péché; fainte, & néanmoins marquée par une faute contre la fainteté; amie de Dieu, & portant néanmoins dans fon fein quelque ennemi de Dieu ? Son péché ferat-il placé avec fes vertus, fa foibleffe fera-t-elle » couronnée comme fon courage, les œuvres Chré»tiennes feront elles confondues avec les œuvres de la fragile humanité? Non, vous n'ofez pas croire, & les adverfaires du dogme du Purgatoire n'ont ofé le dire clairement eux-mêmes. » Mais quoi! cette ame infortunée fera donc réprouvée éternellement fans pitié & fans reffource? La pureté de fa foi, la vivacité de son espérance, l'ardeur de fa charité, des œuvres faintes fans nombre & fans mefure parleront envain pour elle, & Dieu fermera les oreilles à tant de voix qui fe font entendre à-la-fois avec tant d'énergie & de raifon? Gardons-nous bien de le penser. En le penfant, nous attaquerions l'excellence & les perfections infinies du fouverain Maître du monde. Non, Dieu ne mettra jamais dans un même rang de chofes, & n'enveloppera jamais » dans un même fort la furprife & la malice, la foibleffe & le crime, la diftraction dans la priere » & l'abandon total de la priere, le menfonge officieux & le parjure détestable, l'homme de » bien fouillé de quelques taches légeres & le fcélérat noyé dans fon iniquité. Il purifiera l'un,

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& réprouvera l'autre. Il eft le Dieu de toute fainteté, & en même temps le Dieu de toute » juftice. Une ame fainte, mais marquée de quel» que fouillure, n'entrera pas dans la demeure, » parce qu'il eft le Dieu de toute fainteté : & elle y entrera, parce qu'il eft le Dieu de toute juftice. Il la réformera donc, il perfectionnera l'éclat de fes vertus, établira la pureté de fes œuvres, » & la placera enfin dans fa gloire. Voilà le fondement inébranlable de la croyance du Purgatoire, & la conclufion que nous devons tirer des attributs inconteftables de notre Juge & de »notre Dieu. Delà vient que de tous les dogmes » de l'Eglife Catholique il n'y en a guere de plus répandu, de plus généralement reconnu par fes » adverfaires mêmes que le dogme du Purgatoire. La connoiffance d'un Dieu jufte & faint a réuni les Religions les plus ennemies, les plus oppofées dans la croyance du Purgatoire, c'est-à-dire » d'un délai de la récompenfe éternelle, où le juste »eft encore justifié, & où le faint eft encore fanc»tifié; où un Dieu offenfé ne condamne pas, & où un Dieu magnifique ne récompense pas, parce que fa colere ne va pas jufqu'à la mort du coupa»ble, & que fa libéralité eft arrêtée par les délits de l'homme jufte, & cependant coupable. Sages de l'antiquité, vous l'avez enfeigné dans vos Livres (a). Poëtes profanes, mais fublimes, vous. l'avez célébré par vos chants (b). Peuples féduits par le prétendu Prophete de l'Arabie, votre Alcoran le profeffe (c). Hébreux anciens & moder

(a) Plato in Timzo.

(b) Virg. L. vj. Æneid. v. 730.

(c) Cribrat. Alcor. à Card. Cufa, -Chron. Turc, à Lenicero, p. 62.

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nes, vous êtes d'accord avec les Chrétiens. Vous croyez le Purgatoire (a). Et vous Grecs indociles, téparés de l'Eglife par un fchifme long & opiniâtre, n'êtes-vous pas ici contraints de vous joindre à nous contre des Sectaires inconféquents? Peu importe que vous conteftiez fur le mot; en priant pour les morts, vous reconnoiffez en effet ce que vous niez en apparence, & rejettez dans les termes ce que vous profeflez en réalité (b). x

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CHAPITRE

L'Eglife Catholique.

LES PREUVE

D. LIES

S. I

V I.

ES PREUVES qui établissent la vérité du Chriftianifme en général ne font-elles pas infuhifantes pour fixer la croyance des Chrétiens, puifque, dans le fein même de leur Religion, il y a différentes Sectes?

R. La Religion Catholique a les preuves de sa vérité par rapport aux différentes Communions Chrétiennes, comme le Chriftianisme en général

(a) Les Juifs anciens & modernes prient pour les morts, malgré la croyance d'un enfer éternel. Ce n'eft que par des fables & des imaginations ridicules, que quelques-uns combattent la conféquence que nons tirons de ces prieres pour la réalité du Purgatoire.

(b) Perpétuité de la Foi, T. 6. L'on ne peut dire, avec quelques Calviniftes, que les Grecs prient pour les morts parce qu'ils penfent que le jugement des hommes eft différé jufqu'à la fin du monde; puifque les Grecs conviennent que toutes les prieres du monde ne peuvent fauver celui qui eft condamné par les œuvres. Ils détestent la doctrine de Théophilacte, qui enfeigne le contraire.

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