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point de bornes chez eux, à cause de l'ambition, du luxe et de la vanité qui les dévorent: le travail et l'indigence naissent chez eux de leur propre opulence.

ARLEQUIN.

Mais, si cela est ainsi, les riches sont plus pauvres que les pauvres mêmes, puisqu'ils manquent de plus de choses.

Tu as raison.

LELIO.

ARLEQUIN.

Écoute, veux-tu que je te dise ce que je pense des nations civilisées ?

LELIO.

Oui, qu'en penses-tu ?

ARLEQUIN,

Il faut que je dise la vérité, car je n'ai point d'argent à te donner pour caution de ma parole. Je pense que vous êtes des fous qui croient être sages, des ignorans qui croient être habiles, des pauvres qui croient être riches, et des esclaves qui croient être libres.

LELIO.

Et pourquoi le penses-tu ?

ARLEQUIN,

Parce que c'est la vérité, Vous êtes fous,

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car vous cherchez avec beaucoup de soins une infinité de choses inutiles; vous êtes pauvres, parce que vous bornez vos biens dans l'argent ou d'autres diableries, au lieu de jouir simplement de la nature comme nous qui ne voulons rien avoir, afin de jouir plus librement de tout; vous êtes esclaves de toutes vos possessions, que vous préférez à votre liberté et à vos frères, que vous feriez pendre s'ils vous avaient pris la plus petite partie de ce qui vous est inutile. Enfin vous êtes ignorans, parce que vous faites consister votre sagesse à savoir les lois, tandis que vous ne connaissez pas la raison qui vous apprendrait à vous passer de lois comme nous.

LELIO.

Tu as raison, mon cher Arlequin, nous sommes des fous, mais des fous réduits à la nécessité de l'être.

ARLEQUIN.

Votre plus grande folie est de croire que Vous êtes obligés d'être fous.

LELIO.

Mais que veux-tu que nous fassions ? il faut du bien ici pour vivre; si l'on n'en a point, il faut travailler pour en avoir, car le pauvre n'a rien pour rien.

ARLEQUIN.

Cela est impertinent. Mais, à propos, je

n'ai point d'argent, moi, et par conséquent je suis donc pauvre ?

LELIO.

Sans doute que tu l'es.

ARLEQUIN.

Quoi! je serai obligé de travailler comme ces malheureux pour vivre ?

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Que le diable t'emporte. Pourquoi donc scélérat, m'as-tu tiré de mon pays pour m'apprendre que je suis pauvre? je l'aurais ignoré toute ma vie sans toi : je ne connais sais dans les forêts ni les richesses ni la pauvreté : j'étais à moi-même mon roi, mon maître et mon valet, et tu m'as cruellement tiré de cet heureux état, pour m'apprendre que je ne suis qu'un misérable et un esclave. Réponds-moi scélérat, homme sans foi, sans charité. (Il pleure.)

LELIO.

Console-toi, mon cher Arlequin, je suis riche, moi, et je te donnerai tout ce qui te sera nécessaire.

ARLEQUIN.

Et moi, je ne veux rien recevoir de toi;

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comme vous ne donnez ici rien pour rien, ne pouvant te donner de l'argent, qui est le diable qui vous possède tous, tu voudrais que je me donnasse moi-même, et que je fusse ton esclave, comme ces malheureux qui te servent je veux être homme libre, et rien de plus. Ramène-moi donc où tu m'a pris, afin que j'aille oublier dans mes forêts qu'il y a des pauvres et des riches dans le monde..

LELIO.

Ne t'alarme point, tu ne seras point mon esclave: tu seras heureux, je t'en donne ma parole.

ARLEQUIN.

Bon! belle parole, qui sans caution ne vaut pas cela.

(Il fait un signe avec les doigts.)

LELIO.

Eh bien! je te donnerai des cautions.

ARLEQUIN.

Allons, malgré le mépris que j'ai pour tes frères, je veux bien demeurer ici pour l'amour de toi et d'une jolie fille qui se nomme Violette, dont je suis amoureux.

LELIO.

Violette! dis-tu ? la suivante de Flaminia se nommait ainsi. Où as-tu vu cette Violette ?

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Non, elle était avec une autre fille plus maigre qu'elle, mais jolie, et avec un homme fait... ah! si tu le voyais, tu crèverais de rire il a une robe noire et du rouge dessous, un couteau à sa ceinture, et une barbe longue et pointue; ah, ah! je n'ai jamais vu une figure si ridicule.

LELIO.

C'est assurément Pantalon, voilà son por

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