페이지 이미지
PDF
ePub

ARLEQUIN.

Vous en avez menti; je suis un homme sage, un ignorant, à la vérité, un âne, une bête, un sauvage qui ne connaît point de lois; mais d'ailleurs un très-galant homme, plein d'esprit et de mérite.

FLAMINIA.

Je le crois, mon ami. Cet homme-là me fait peur.

PANTALON.

Un hommo savio, de spirito, un ignorante, un asino, una bestia, ma par nome de grand merito. Ah, ah, ah!

FLAMINIA.

Il y a quelque chose de singulier en lui. Écoute, mon ami, de quel pays es-tu ?

ARLEQUIN.

Moi, je suis d'un grand bois où il ne croît que des ignorans comme moi, qui ne savent pas un mot des lois, mais qui sont bons naturellement. Ah, ah! nous n'avons pas besoin de leçons, nous autres, pour connaître nos devoirs, nous sommes si innocens, que la raison seule nous suffit.

FLAMINIA.

Si cela est, vous en savez beaucoup : mais comment êtes-vous venu ici ?

ARLEQUIN.

Je suis venu dans un canot long, long... pouf, il était long comme le diable; nous y etions moi et puis le capitaine, et puis trois autres nations que l'on appelle les matelots, les soldats et les officiers.

FLAMINIA.

Sa simplicité est extrême, c'est un sauvage, comme il le dit, qui ne sait rien encore de nos moeurs.

ARLEQUIN.

Oh! pour cela pas un mot; tout ce que je sais, c'est que vous naissez fous et coquins, mais que les lois vous rendent sages et honnêtes gens. C'est le capitaine qui me l'a appris; il les sait bien lui, les lois. Les sais-tu bien aussi toi ?

Sans doute.

FLAMINI A.

ARLEQUIN.

Tu es donc de ces honnêtes filles qui offrent aux passans ce qui leur fait plaisir ?

FLAMINIA.

Tu me fais bien de l'honneur.

ARLEQUIN.

Je crois que cette grasse-là les sait mieux que toi ?

[graphic]

FLAMINIA.

Pourquoi ?

ARLEQUIN.

Parce qu'elle est bonne, et qu'elle n'a pas voulu que tu me fisses du mal. Dis-moi, je la trouve jolie, crois-tu qu'elle m'aime ?

FLAMINIA.

Elle vous aimera si elle vous trouve aimable: essayez. (A part.) Il faut que je me' divertisse aux dépens de Violette.

ARLEQUIN.

Elle est appétissante. Je vous trouve bien aimable, et je n'ai jamais vu de fille qui m'ait plu davantage, en vérité.

VIOLETTE.

Vous êtes bien obligeant, Monsieur.

ARLEQUIN.

Je ne suis point Monsieur, je m'appelle Arlequin.

VIOLETTE.

Arlequin, que ce nom est joli!

ARLEQUIN.

Oui. Et le vôtre, est-il aussi joli que vous? Dites-le moi, je vous en prie.

VIOLETTE.

Je me nomme Violette.

ARLEQUIN.

Violette! le charmant petit nom! il vous convient bien; vous êtes si fleurie, que vous devez être de la race des fleurs.

FLAMINIA.

Comment? cela est dit avec esprit.

PANTALON.

J'ai entendu dire que les sauvages parlaient toujours par métaphore.

Il est fort joli.

FLAMINIA.

ARLEQUIN, à Violette.

Vous entendez bien? cette fille me trouve joli me trouvez-vous joli, vous?

VIOLETTE.

Très-joli.

ARLEQUIN.

Vous m'aimez donc ? car on doit aimer ce que l'on trouve joli.

VIOLETTE.

On n'aime pas si facilement dans ce pays : il faut bien d'autres choses.

ARLEQUIN.

Eh que faut-il de plus ? Vous verrez que c'est encore là un tour des lois que je n'entends pas: foin de mon ignorance. Écoutez,

je ne sais qu'aimer; s'il faut quelqu'autre chose pour se rendre aimable, apprenez-le moi, et je le ferai.

VIOLETTE.

Il faut dire de jolies choses, faire des caresses tendres.

ARLEQUIN.

Pour des caresses, je sais ce que c'est, et je vous en ferai tant que vous voudrez; quant aux jolies choses, je ne le sais pas en vérité; mais commençons toujours par les caresses, en attendant que j'aie appris le reste.

VIOLETTE.

Non pas cela, il faut au contraire commencer par les jolies choses, afin de gagner le cœur de sa maîtresse et d'obtenir d'elle la permission de lui faire des caresses.

ARLEQUIN.

Mais comment diable voulez-vous que je vous les dise, ces jolies choses, je ne les sais pas apprenez-les moi, et je vous les dirai.

VIOLETTE.

Ce n'est point à moi à vous les apprendre.

ARLEQUIN.

Et comment ferai-je donc ?

« 이전계속 »