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leurs Kakans les entretiennent; ils obfervent religieufement le fabat; & fi ce jour-là ils ont besoin de feu, ils prient quel ques Chrétiens de leur en allumer cependant il arrive de temps en temps que quelquesuns fe font Turcs par la crainte de la mort, ou de la baftonnade: les nouveaux Mufulmans originairement Juifs, font peu eftimés des anciens Mahométans; ils confervent toujours de pere en fils une inclination fecrette pour le Judaisme jufqu'à réciter leurs anciennes prieres au lieu de celles de l'Al

coran.

Il y a environ foixante ans qu'ils fe perfuaderent que le Meffie alloit enfin paroître. Pour fe préparer à fon arrivée, & le recevoir plus dignement, ils cabalerent ensemble,& voulurent

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fe rendre maîtres de la ville; les Commandans Turcs en furent avertis; on fit arrêter les Chefs de la révolte, & à force de menaces on les obligea d'embraffer la Religion Mahométane, après leur avoir fait avouer que Jefus-Chrift eft le Meffie; c'est un aveu que les Mahométans exigent toujours d'eux avant leur prétenduë” converfion.

Outre plufieurs petites Ecoles, les Juifs ont à Salonique un Collége feulement, où ils enfeignent leur Philofophie, leur Droit, & je pense auffi leur Théologie; les dix mille écoliers que quelques voyageurs leur ont libéralement donnés, fe réduisent à quelques centaines, tous, ou presque tous de la ville même, & non pas de tout l'Empire Ottoman. Il Tome IX.

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n'y a nulle apparence que ce Collége ait jamais été plus floriffant les étudians y foutiennent des Thèses imprimées comme leurs autres Livres en caractères hébraïques; mais dans leur langage vulgaire. 11 ne paroît pas qu'il y ait à Salonique de Juifs fçavans en Hébreu, & l'on n'y parle d'aucun Rabin de réputation; ils y ont cependant une grande liberté pour l'exercice de leur Religion. Leurs Synagogues font fituées & ouvertes fur les rues, privilége que n'ont pas les Chrétiens. Quand ils portent leurs morts en terre ils chantent de toutes leurs forces, & leur chant eft très-defagréable le convoi eft fouvent nombreux, mais les femmes n'en font point; elles fe contentent de pleurer à la maifon, elles ont une cer

taine formule de lamentations & de gémiffemens. Les cimetieres de cette Nation occupent un fort grand terrein, hors d'une des portes de la ville; parce qu'ils n'enterrent jamais, non plus que les Turcs, deux corps dans la même place. Quand ils ont mis le corps en terre, quelques-uns tournent à l'entour, & le Kakan paroît parler au mort; on remplit enfuite la foffe fur laquelle on accumule de petites pierres, de forte que leur fépulture s'éleve toujours de terre; on met fur la plupart une tombe communément de marbre, fur laquelle on grave l'épitaphe en lettres hébraïques avec des ornemens de fleurs & de diverfes figures. Il n'y a que les pauvres qui n'ayent point de tombe, ou qui n'ayent qu'une pierre plate fans épitaphe.

Outre les Juifs anciens habitans de Salonique, il y en eft arrivé depuis vingt-cinq ou trente ans d'Italie, d'Espagne, & de Portugal; ces nouveaux venus font vêtus comme les Francs, ils ne portent point la barbe, mais feulement une mouftache; ils ne fe font pas même fcrupule manger avec les Chrétiens: auffi les autres ne les regardent que comme des demi-Juifs, & prefque comme des déferteurs de la Loi.Ilya parmi eux de gros marchands, qui, à la Religion près, font honnêtes gens : ils ont des Médecins affez habiles, qui font pour la plupart fous la protection de la France.

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C'est le commerce qui attire tant de monde à Salonique. Il n'y a guéres que cent ans que les négocians des divers pays de l'Europe y trafiquent les

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