ÆäÀÌÁö À̹ÌÁö
PDF
ePub

Eponine dans celle qui s'eft montrée à Paris, Eponine lui répond.

Ce ne l'eft pas, vous dis-je, & d'un nom fup

pofé,

On avait cru parer un caractere usé,
Eprife par devoir d'un époux refpectable,
Une telle union doit être inviolable;
L'Amour n'aura de moi qu'un méprifant re-

fus,

J'écoute cependant le Jargon de Titus,

De fes fades difcours je fuis prefque attendrie,

Je n'ai point de fecrets que je ne lui confie, Mon cœur eft enchanté de fon air fimple & doux,

Je remets en ses mains le fort de mon époux, Je gémis, je foupire, interdite & tremblante, Aux pieds de l'Empereur je tombe en Suppliante,

[ocr errors]

Je frémis de le voir prêt à nous accabler. Ah! Seigneur! Eft-ce là comme je dois par fer?

Le Carnaval lui dit qu'on a eu vraiment tort de la faire parler fur un ton fi peu convenable. Mais qu'il ne faut pas juger Melpomene à la rigueur, & que ce n'eft pas fa faute fi on l'a mife

fur ce pied-là? Quoi ! lui répond Epo

nine,

Vous aimez à voir l'augufte Tragédie,

Dans un dédale obfcur marcher en étourdie ;
Lorfque vous lui donnez des applaudiffemens
Vous partagez fa honte & fes égaremens ;
A votre Jugement fes erreurs font injure,
Rappellez les Héros que fa main défigure;
Vendôme est un rébelle, Orofmane un ga
lant,

Gustave un étourdi, Califthene un pedant,
Sabinus un Gascon que fon mérite étonne,
Toujours avec respect parle de fa perfonne.

A cette jufte critique des caractéres qu'on donne aujourd'hui aux Héros de Tragédie, Eponine oppofe ceux que Corneille & Racine, & quelquesautres Auteurs anciens, leur ont donnés autrefois. Elle s'exprime ainfi en parlant des Héroïnes de Théâtre.

Ne fe fouvient-on plus de celles qui jadis, Avec jufte raison étonnaient tout Paris? Phédre, par Vénus même à la fureur livrée Dans fes vaftes projets Athalie égarée, Roxane, en qui l'amour cede à l'ambition, Ino, conduifant feule une grande action, Léontine, d'un Roi confervant la famille,

Clitemneftre volant au fecours de fa fille, Ces fublimes objets dignes de vos bontés, Refpectés de tout tems, ne font plus imités.

A cette belle Scène en fuccéde une autre, dont on aurait pu fe paffer; mais les Auteurs ont voulu marquer une espece d'impartialité, en traitant auffi mal leurs ouvrages que ceux d'autrui. Cependant ils ont pris la précaution de mettre la Critique de leur Prodigue puni, (1) dans la bouche d'un Yvrogne, pour en émouffer les traits par la qualité du perfonnage. En voici un qui a plus de poids, c'est l'Opinion; comme elle eft la Reine du monde, elle juge de tout en dernier reffort; mais avec cette différence, qu'elle paffe légerement fur les Eloges, & qu'elle appuie terriblement fur les invectives. En effet en parlant de Didon (2) & de la Pupille, (3) elle fe contente de dire en paffant.

(1) Le Prodigue puni ou le Frere, ingrat, Comédie en trois actes en vers, de Davennes & Romagnefi, qui ne s'eft point épargné dans cette Piece critique, dont il eft auffi l'Auteur. (2) Tragédie de M. Lefranc de Pompignan. (3) Comédie en un acte en profe, de Fagan, qui réuffit très-bien & qui le méritait.

J'ai goûté des plaifirs extrêmes
A Didon; la Pupille avait un tour heureux

Mais quand il faut dire du mal, elle ne tarit point, on en va juger par la Scène qu'elle a avec Durval, au sujet duPréjugé à la mode. (1) Elle commence par critiquer le titre par ces Vers:

C'est un travers & non pas une mode. Durval, prévoyant par ce premier trait, ce qu'il doit attendre d'un Tribunal fi févére, veut fe retirer, & dit. Mon titre feul produit d'abord une difpute, Je vais me fouftraire à vos yeux,

Aux traits les plus piquants je m'offrirais en butte,

Si je demeurais dans ces lieux.

Le Carnaval lui ordonne de refter, l'Opinion même l'y convie avec adreffe par ces. Vers flatteurs.

Ne craignez point de mortelle piqûre,
Je blâme doucement, & loue avec raison;
Le résultat de ma censure,

Est un remede & non pas un poison.

(1). Comédie en cinq actes en vers, de la Chauffée, trop connue & trop eftimée, pour avoir befoin d'être rappellée.

Durval ne veut pas convenir que: fa Piece ait befoin de reméde ; il le fait connaître par ces Vers.

Je ne fai pas de quel efpece
Sont les défauts qu'on veut me reprocher,
Il n'eft pas en moi d'empêcher

Que de certains efprits ne condamnent ma
Piece,

Mais ce fera fans aucun fruit ;
Je m'expofe d'abord fans faire trop de bruit
D'une façon douce & facile,

Irréprochable dans mon style,
L'exactitude me conduit

A cette expreffion qui frappe, qui féduit..

L'Opinion convient que l'expofition eft faite avec adreffe, & que le fonds était fi mince, que l'Auteur a agi trèsprudemment de le ménager, & de ne pas tout expofer dès le premier Acte, pour éloigner le dénouement ; elle veut bien encore lui paffer qu'à l'égard de ces Vers, il y en a de très-bien faits, cependant elle ajoute..

Mais quelquesfois auffi j'en ai vu de pervers,, Qui chagrinaient fort mon oreille.

Durval releve fort le caractére de Les petits Maîtres..

« ÀÌÀü°è¼Ó »