fer fort à propos fa chaife auprès du château où ils font actuellement, il lui a perfuadé qu'il appartenait à Dorante, pere de Valere, à qui il a deftiné fa fille Ifabelle, qu'il amenait avec lui pour achever le mariage arrêté depuis long-tems. Il ajoute que, pour faire réuffir fon ftratagême, il faut qu'il paffe pour Valere Gendre futur de Ge

ronte.

Léandre a quelque peine à fe prêter à cette fuppofition; mais fon amour pour Ifabelle le fait paffer par-deffus les fcrupules de fa délicateffe. Valentin ne lui en dit pas davantage, & réferve un plus grand détail dans la converfation qu'il doit avoir avec Nérine, Suivante d'Ifabelle. En effet, il lui apprend qu'il a été autrefois Comédien, & même Auteur. Nérine lui demande quelle Piece il a mis au jour en cette derniere qualité. Valentin lui répond que c'eft celle qu'on va jouer dans le château de Léandre, & qu'elle en fera une des principales Actrices; il ajoute que le mariage de Léandre avec Ifabelle en fera l'heureux dénouement.

Nérine inftruite de tout, lui promet de faire honneur au rôle qu'il lui a def

tiné.

Valentin a fi fort prévenu Geronte en faveur du prétendu Valere, qu'il brûle de le voir fon Gendre, il a une conversation avec lui qui augmente encore fon empreffement. Comme le faux Valere n'eft inftruit de rien, il lui échappe des étourderies que Valentin a bien de la peine à fauver.

Ifabelle, qui a déja fait connaître à Géronte fon pere, la répugnance qu'elle a pour l'amant qu'il lui propofe, ne voit pas plutôt que ce Valere fuppofé eft le véritable Léandre, que fa répugnánce fait place à son obéiffance, que fon pere attribue à la Bonne éducation qu'il lui a donnée. Géronte apprenant que Dorante, pere de Valere, eft à Orléans, lui écrit pour le preffer de venir conclure un mariage qui doit mettre le comble à leurs vœux. C'eft un incident que Valentin a dû prévoir, & qui cependant n'eft pas entré dans fon plan; il n'en eft pourtant pas étonné. Il fe flatte de furmonter ce nouvel obftacle; il en furvient un autre qu'il n'a pu prévenir. Arlequin, Valet de Valere, se présente à lui : comme ils font anciens camarades, il lui propose de renouveller connaiffance, le verre à la main; Arlequin n'a garde de fe re

fufer à un défi qui flatte fi fort fon inclination. Valentin lui demande des nouvelles de Valere fon Maître, Arlequin lui apprend en confidence, que Valere eft actuellement dans le château, qu'il y eft arrivé auffi-tôt que Geronte & Ifabelle fa fille, dont ils ont fuivi la chaife pas à pas.

Valentin ayant appris d'Arlequin tout ce qu'il a pu en tirer au moyen de la partie de cabaret qu'il lui a propofée, il le quitte brufquement, ce qui met Arlequin de mauvaise humeur. Valentin craignant que Valere ne vienne preffer le mariage que fon pere a concerté avec celui d'Isabelle, confeille à cette derniere de le recevoir fi mal, qu'il n'ofe plus y revenir; Ifabelle lui promet de ne rien oublier pour le dégoûter d'un mariage qui lui infpire une averfion invincible.

Levéritable Valere vient, & ne se fait d'abord connaître à Ifabelle que comme un ami de celui à qui on l'a promife en mariage; mais Ifabelle lui dit fi pofitivement qu'elle hait & qu'elle haïra toujours celui qu'on prétend lui faire époufer, qu'il fe nomme enfin, & lui apprend que bien-loin de vouloir la contraindre à recevoir fa main, il est prêt

à s'unir avec elle, pour détourner un hymen qui les rendrait également malheureux. Il lui déclare en même tems qu'il aime Julie, fœur de Léandre; Ifabelle en eft au comble de la joie, elle demande pardon à Valere de l'avoir haï fans le connaître, & lui promet fon appui auprès de Léandre, pour lui faire obtenir fon aimable fœur dont il eft aimé autant qu'il l'aime. Valentin eft charmé d'apprendre cette heureuse nouvelle & fe promet de la mettre à profit.

Dorante, pere de Valere à qui Geronte pere d'Isabelle a écrit à Orléans pour le preffer de venir achever l'union de leurs enfans à laquelle fa préfence eft indifpenfablement néceffaire, arrive au château de Léandre, qu'il croit appartenir à Geronte. Valentin qui ne connaît pas, & qui fe dit Valet de la maison, jugeant que ce nouveau venu eft un Acteur de trop dans fa Piece, tâche de l'éloigner comme un obstacle au dénouement qu'il s'eft propofé.

Pour l'obliger à s'en retourner à Orléans, il lui fait entendre que tout a changé de face dans ce château, & que Geronte veut marier fa fille Isabelle à Py

Léandre: Dorante ne peut apprendre fans colere que Geronte, non-feulement lui manque de parole, mais qu'il le falle venir exprès d'Orléans, pour le rendre témoin de fon infidélité ; Valentin l'aigrit encore, il lui conseille de partir fans prendre d'autre éclairciffement, & il le prie fur-tout de ne le point nommer pour la confidence qu'il lui a faite. Dorante le lui promet, & il fe retire; Geronte vient, embraffe Dorante, qui connaît bientôt que Valentin eft mal inftruit ou mal intentionné. Léandre paraît à fon tour. Dorante ne le reconnaît pas, & n'en eft pas reconnu, au grand étonnement de Geronte, qui les croit pere & fils: Valentin vient enfin débrouiller ce chaos, & convient qu'il les a tous trompés ; mais que ce n'a été qu'à bonne intention, attendu qu'il doit réfulter de fa fourberie, un double mariage auffi heureux que celui que les deux vieillards avaient projetté, aurait été malheureux. Tous les perfonnages de la Comédie fe raffemblent & tout eft raccommodé ; cependant Geronte eft le plus obftiné des deux peres; mais Dorante plus raisonnable que lui, eft attendri par le faux Lifimon fon fils, qui reprend fon vé¬