De l'efprit eft l'aréopage; Le Cenfeur en blâmant, s'excite: Le Public ne peut fe dédire, Par fa Critique raisonnée, Puiffe-t-il nous être propice!" Contre ce théâtre animée, Méprife tout ce qui s'y dit L'HEUREUX STRATAGÊME. Comédie en trois actes en profe, 6 Juin 1733. (1) L'HÉROÏNE de cette Comédie eft une Comteffe qui traite d'abord la fidélité de chimere, parcequ'elle regarde cette vertu comme un obftacle à la paffion fi naturelle au beau fexe, qui eft de faire valoir fes droits fur tous les cœurs; prévenu en faveur de fes attraits, elle ne croit rien hafarder en volant de conquête en conquête ; elle aime Dorante; mais elle n'eft pas fâchée d'être aimée du Chevalier Damis, & trouve fort mauvais que fon premier Adorateur s'en formalife; la maniere dont elle s'explique avec Dorante, fur les reproches qu'il ofe lui faire de fon nouvel engagement, acheve (1) La fcène eft à la Campagne, dans la Maifon de la Comteffe,. de le défefpérer. Il fe croit véritablement effacé du cœur de fa maîtreffe; quoiqu'il ne foit que facrifié à fa vanité; une Marquife à qui la Comtesse a enlevé un Amant dont la perte ne lui tient pas à beaucoup près tant au cœur, que Dorante eft fenfible, à celle qu'il croit avoir faite, lui vient ouvrir les yeux. Je connais mon fexe, lui dit-elle, la Comteffe n'eft infidelle qu'en apparence; l'envie de faire une nouvelle conquête flatte fon amour propre; mais la crainte d'en perdre une, qu'elle a déja faite, allarmera ce même amour propre, & vous la rendra plus tendre que jamais. Ce fage confeil eft fuivi de la propofition qu'elle lui fait de feindre. un nouvel amour dont elle veut bien paraître l'objet ; la propofition révolte d'abord, mais elle eft enfin acceptée. La Comtelle ne daigne pas même 'donner la moindre croyance aux nouveaux engagemens de Dorante; elle ne croit pas la chofe férieufe; parcequ'elle la croit impoffible; elle penferait dégrader fes attraits, fi elle s'abaiffait jufqu'à la crainte; elle fait plus, elle découvre le piége qu'on lui tend, mais elle ne laiffe pas d'y donner dans la fuite; en effet elle penfe jufte quand elle dit que Dorante feint d'aimer la Marquife pour la rendre jalouse, & cependant elle va par degrés, jufqu'à craindre que cette feinte ne foit une vérité, & de la crainte elle paffe jufqu'à la conviction. Dorante, par le confeil de la Marquife, ordonne à Arlequin de ne plus voir Lifette; la raifon qui l'oblige à lui faire cette défenfe; c'eft que la Comteffe pourrait croire qu'il continue à voir la Suivante, pour épier la Maîtreffe. Arlequin ne peut fe réfoudre à fe priver de la vue & de la conversation de fa chere Lifette; mais la promeffe que fon Maître lui fait de la lui rendre plus tendre que jamais, le détermine à lui obéir les moyens que la Marquife a fournis à Dorante, ont leur effet, & engagent la Comteffe inquiéte à faire une vifite à fa Rivale. La COMTESSE. Je viens vous trouver moi-même, Marquife, comme vous me demandez un entretien particulier, il s'agit apparemment de quelque chofe de confé quence. La MARQUISE Je n'ai pourtant qu'une queftion à vous faire, & comme vous êtes naturellement vraie, que vous êtes la franchife, la fincérité même, nous aurons bientôt terminé, La COMTESSE. Je vous entends, vous ne me croyez pas trop fincere ; mais votre éloge m'ex horte à l'être. N'eft-ce pas ? La MARQUISE A cela près, le ferez-vous? La COMTESSE. Pour commencer à l'être, je vous di rai que je n'en fai rien. La MARQUISE Si je vous demandais, le Chevalier vous aime-t-il? me diriez-vous ce qui en eft? La COMTESSE. Non, Marquife, je ne veux pas me brouiller avec vous, & vous me haï riez fi je vous disais la vérité. La MARQUISE Je vous donne ma parole que non T |