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Vous, qui courez après l'Hymen,
Pour éloigner tout examen,
Prenez toujours fille pour veuve;

Si l'Amour trompe en ce moment
C'est du moins agréablement :
Quelle charmante épreuve !
X

Que Mathuraine ait de l'humeur,
Et qu'al me refuse son cœur,

Qu'il vente, qu'il tonne, ou qu'il pleuve
Que le froid gêle notre vin,

Je n'en prenons point de chagrin,
Je fomme à toute épreuve.

Vous qui tenez dans vos filets
Chaque jour de nouveaux objets,
Soit fille, foit femme, foit veuve ;
Vous croyez prendre & l'on vous prend.
Gardez-vous d'un cœur qui fe rend
A la premiere épreuve.

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Ah! que l'Hymen paraît charmant
Quand l'Epoux eft toujours Amant!
Mais jufqu'ici la chose est neuve:
Que l'on verrait peu de maris,
Si le fort nous avait permis

De les prendre à l'épreuve!
X

Cette Piece eut beaucoup de fuc cès, & le méritait ; elle eft la derniere qui ait été donnée au Théâtre Italien par M. de Marivaux, dont nous placerons: ici l'hiftoire..

Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux nâquit à Paris en 1688, d'un pere qui avait été Directeur de la Monnoie à Riom, en Auvergne, & qui était d'une famille ancienne dans le Parlement de Normandie. Ses ouvrages le firent connaître de bonne-heure. Ils refpirent prefque tous l'enjouement & fa fineffe, & fuppofent affez généralement une imagination vive & un caractere d'efprit fingulier. Parmi les romans de fa compofition, la Vie de Marianne, & le Payfan parvenu, occupent le premier rang: mais par une inconftance qui lui était particuliere, il quitta l'un pour commencer l'autre, & n'acheva aucun des deux. Nous avons de lui fept volumes de Pieces de Théâtre, qui ne font pas toutes du même mérite; celles dont la lecture paraît le plus juftifier le fuccès, font la Surprise de l'Amour, le Legs & le Préjugé vaincu, au Théâtre Français; ainfi qu'au Théâtre Italien, l'autre Sur

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prife de l'Amour, la Double Inconftance, & l'Epreuve.

M. de Marivaux, à ce qu'on peut juger, n'avait fait que de faibles études. On ne peut nier d'ailleurs qu'il ne fût né avec beaucoup d'efprit; ce qui, à la vérité, ne fuppofe pas toujours un goût infaillible. L'ignorance où il était des bonnes fources, & le malheur qu'il eut de fréquenter très-jeune les Partifans d'une opinion très-oppofée à la faine Littératu re, lui firent néceffairement commettre beaucoup de fautes. Nous mettons au rang de fes principales erreurs l'imprudence qu'il eut de fe joindre au parti de M. de la Mothe, dans la querelle. des Anciens & des Modernes. Som aveuglement pour la nouvelle secte l'entraîna même à compofer un. Homere travefti; ouvrage répréhenfible à tous égards, & qui ne paraît avoir échappé à la jufte cenfure des gens de goût, que par l'efpece d'oubli où il est tombé dès fa naiffance.. En. effet, je doute qu'on puille citer un exemple d'une entreprise plus bifarre, que celle de traveftir les Œuvres d'Homere, dans l'efpérance de les faire tom ber. Scaron, du moins, ne s'égaya fur Virgile, que dans le feul but de s'a

mufer, & de faire diverfion aux douleurs de la goutte. On doit même remarquer que ce Poëte burlefque entendait parfaitement fon Auteur; & il réfulte de la lecture de fa traduction bouffonne, qu'il connoiffait infiniment mieux les beautés de Virgile, que la plûpart de ceux qui l'ont traduit férieufement. Quelque mince que puiffe paraître ce mérite, il eft certain que, de ce côté là, notre Académicien n'eut jamais rien de commun avec l'Auteur enjoué du Roman comique. Les partifans de M. de Marivaux conviendront

auffi qu'il ferait fort à defirer pour fa gloire, qu'on ne l'eût jamais foupçonné d'une autre parodie également blâmable, intitulée le Telemaque travefti; production honteufe que tout le monde lui attribua, malgré les efforts qu'il fit - dans la fuite pour la défavouer.

Le hafard préfide souvent au choix de nos premieres connaiffances. Cette feconde éducation que nous recevons à l'entrée de notre carriere, dans les maisons où nous fommes admis, influe prefque toujours fur notre façon de penfer à venir. Un œil pénétrant appercevrait infailliblement, dans les écrits d'un Auteur, l'efprit des focié

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tés par lefquelles il a débuté dans le mondes celle de M. de la Mothe était fans doute très-dangereufe pour M. de Marivaux. On y penfait communément que l'efprit fuppléait à tout. C'eft avec de l'efprit que M. de la Mothe avait cru pouvoir remplacer les graces de Quinault, la naïveté de la Fontaine, & le fublime d'Homere. Ses Partifans avaient introduit la coutume de jetter du ridicule fur l'érudition, ce qui les confolait du malheur d'en manquer. L'illufion dans laquelle cette fecte de beaux-efprits entraîna M. de Marivaux, paraîtra peut-être excufable, fi l'on confidere quelle était alors la réputation brillante de M. de la Mothe, apprécié aujourd'hui à fa jufte valeur, & féparé par une barriere éternelle, des Ecrivains de génie.

De cet abus d'efprit, dénué des lumieres du goût, naquirent chez M. de Marivaux, ces images incohérédentes, cet amour des pointes, ces graces minaudieres, ce ftyle alambiqué, qu'on a caractérisés dans ces deux vers:

Une Métaphyfique où le jargon domine,
Souvent imperceptible, à force d'être fine..

Auffi la plupart des Pieces de cet Au

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