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Tout hait dans l'Univers, même en difant qu'il aime.

L'étonnement ferme la bouche à Liv fidor, & Lucile profite de fon filence pour étaler tous les défauts qu'elle luitrouve, & l'accabler d'injures; à la fin il s'indigne de fe voir ainfi outragé & il lui répond fur le même ton; mais avec un peu plus de ménagement.

Puifqu'au char de la haine il vous paraît fi doux,

D'enchaîner un Amant qui brûlait d'être à

vous,

Vous venez d'obtenir une pleine victoire,
Goûtez donc à loifir cette nouvelle gloire,
Et puifqu'un tel aveu vous flatte en ce mo-

ment,

Madame, je vous hais; mais fi parfaite

ment,

Que de l'averfion où mon amé eft livrée,
Rien n'éteindra jamais la force & la durée.

En ce moment Arlequin vient annoncer le Notaire, dont le miniftere est très-fuperflu, la haine paffe dans le cœur de tous les autres Acteurs, qui fe quittent en fe promettant bien de plaider & de fe détefter de tout leur cœur;"

il n'y a pas jufqu'à Lifette qui donne un foufflet à Arlequin: (elle s'enfuit.) ARLEQUIN.

Va, tu fais bien de fuir, je t'aurais fur mon

ame ?

Sans être ton époux, traité comme ma fem

me;

Finir fans mariage & rompre fagement,
Voilà ce qu'on appelle un heureux dénoue-

ment.

La Piece finit par un Divertiffement que Milord Guinée avoit fait préparer. La haine traveftie en hymen, parait vouloir unir plufieurs amans ; mais dès qu'ils touchent au moment qui doit les rendre heureux, elle reprend fa véritable forme, & fouffle par-tout la difcorde.

Cette Piece avait befoin d'être vivement & fortement écrite; car le caractere de Lucile devait révolter tous les fpectateurs, elle eut cependant dixhuit représentations, & à fouvent été reprise. M. Boiffi, qui en eft l'auteur, a donné la preuve de ces deux vers.

a

Il n'eft point de Serpent, ni de Monftre odieux,

Qui par l'art imité, ne puiffe plaire aux yeux.

L'APOLOGIE DU SIECLE,

OU MOMUS CORRIGÉ.

Comédie en un acte en profe,
1er Avril 1734. (1)

UNE Actrice eft étonnée de voir

Momus tenant un bouquet à la main au lieu d'une marotté & lui en marque fa furprise; ce Dieu lui apprend qu'il eft corrigé, & qu'au lieu de tout blâmer, il veut tout louer.

L'ACTRICE

Allons, Seigneur, vous vous mocquez de

moi;

On fait que vous aimez à rire,

Et l'encens de Momus, eft un trait de fatire.

Momus perfifte dans son hipocrifie.

& répond ainfi:

cít

Depuis qu'en bien tout le monde eit changé, Sachez que je fuis corrigé;

De la douceur que je refpire,

(1) La fcène fe paffe fur le théâtre de la

Comédie Italienne.

Ces fleurs font un garant qu'on ne peut con

tredire,

La critique eft hors de faifon,

Et le fiecle vit de façon,

Qu'il ne convient plus d'en médire ;

Il fait voir tant d'efprit, de candeur, de: raison,

Qu'en dépit qu'on en ait, il faut bien qu'on ov Tadmire:

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Plein de fageffe, exempt d'abus,

De fi

De ridiculé, d'injuftice,

Il m'oblige à changer d'humeur & d'attributs,

A l'avenir je ne dois plus
Faire la fatire des vices,

Que par l'éloge des vertus.

Cette réfolation de Momus fait trem bler Actrice, & l'oblige a lui répan-. dre.

Mais jamais au panégyrique,
Ces lieux ne furent confacrés,
Et de tout tems fur la critique,,

Nos revenus font affurés;

Sans elle, ferviteur au théâtre Italique..

MOMUS.

Elle ne fait que l'avilir.

L'Actrice eft remplacée par M. Philinte, grand faifeur d'Epigrammes..

PHILIN TE.

Pour m'enseigner cet Art, où vous semblez: primer,

Apprenez-moi d'abord comment je dois nom

mer

Une Friponne, une Coquette,

Dont la bouche me jure un amour fans égal,, Et qui l'instant d'après, me trahit en ca chette,

Et favorifé mon Rival?

MOM US.

Mais on l'appelle un femme ordinaire.

PHILINTE

Et l'ami délicat qui m'enleve la Belle,
Et qui m'emprunte mon argent
Pour triompher de l'infidelle,

Comment l'appelle-t-on dans ce fieclè chate

mant?

MOM US.

Un ami faible & que l'amour ensporte.."

PHILIN TE.

Momus eft bien compatissant !

Et de quelle façon eft-ce qu'il qualifie
Un Procureur avide, & qui fans modeftie,

De toutes mains reçoit double valeur,

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