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AN. 1064.

Gefta, pontif.

cet effet il lui ordonna de venir à Rome : mais Pierre déja vieux & attaché à fon defert de Fontavellane, s'en excufa, & promit feulement d'aller à Mantouë. Le tems marqué étant venu, le pape Alexandre s'y rendit avec les évêques & les cardinaux. Tous les évêques de Lombardie s'y trouverent, hors Cadaloüs, quoique l'archevêque de Cologne lui eût ordonné d'y venir. En ce concile le pape Alexandre sigeb.an.1067 fe purgea par ferment de la fimonie dont il étoit accufé, & prouva par de fi bonnes raifons la validité de fon election, qu'il fe reconcilia les évêques de Lombardie, qui lui avoient été opposez. Au contraire, Cadaloüs fut condamné tout d'une voix comme fimoniaque.

pont.

Il ne fe rendit pas neanmoins, mais aprés que Lamb. Gestal'archevêque de Cologne fut parti, il vint à Rome une feconde fois en cachete; & aïant gagné les capitaines, & diftribué de l'argent aux foldats, il entra de nuit dans la cité de Leonine, & s'empara de l'église de faint Pierre. Le matin le bruit s'en étant répandu dans Rome, le peuple accourut en foule à faint Pierre, ce qui épouventa tellement les foldats qui étoient venus avec Cadaloüs, qu'ils l'abandonnerent tous & fe cacherent dans des caves & d'autres lieux. Alors Cencius fils du prefet, méchant homme, vint au fecours de Cadalous, le reçut dans le château Saint Ange, & lui promit par, ferment de le défendre. Il y demeura deux ans demeura deux ans affiegé par les ferviteurs du pape Alexandre, & n'en fortit qu'en fe rachetant de Cencius moïennant trois cens livres d'argent. Il fe retira lui troifiéme en cachete, parmi les pelerins, pauvre & dépouillé de tout; & arriva ay Tome XIII.

T

AN. 1064.

Lambert.

Gefta pontif.

mont Bardon, puis au bourg de Barette. Durant le peu de tems qu'il furvécut, il continua toûjours de fe porter pour pape legitime fous le nom d'Honorius II. & de traiter Alexandre d'anti-pape, faisant des ordinations, & envoïant fes decrets & fes lettres aux églifes.

Hugues le Blanc, qui avoit été fait cardinal par Leon IX. homme feditieux & double, s'étoit attaché à Cadaloüs, & avoit fouffert beaucoup de maux fous lui: enfin il demanda pardon au pape Alexandre, & l'obtint aprés une fatisfaction convenable. Mais Henri archevêque de Ravenne, perfifta au moins quelque tems dans le schisme, & étant excommunié, loin de demander l'absolution, il excommunioit les autres. Pendant l'automne de l'année 1064. une grande troupe de pelerins partit d'Allemagne pour aller à Lamb.an.1054. Jerufalem, aïant à leur tête Sigefroi archevêque de Maïence, Gunther évêque de Bamberg, Otton de Ra

24.q. 1. audiv.

XII, Pelerinage à Jerufalem.

Sup. lib. 1x. n.

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tifbone, Guillaume d'Utrect & plufieurs autres perfonnages confiderables: toute la troupe étoit d'enviSigeb. an. 1065. ron fept mille hommes. Etant arrivez à C. P. ils faluerent l'Empereur Constantin Ducas qui régnoit depuis quatre ans : ils virent fainte Sophie & baiferent une infinité de reliquaires. Mais aïant paffé la Lycie, & Lambert. an. étant entrez fur les terres des Musulmans, ils furent attaquez par des voleurs Arabes. Leurs richesses qu'ils affectoient de montrer dans leurs habits & dans leurs équipages leur attirerent ce malheur. Car les habitans tant des villes que de la campagne s'amafsoient à grandes troupes pour voir ces étrangers, & de l'admiration ils paffoient au defir de profiter de leurs dépoüilles.

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Celui qui s'attiroit le plus de fpectateurs étoit Gun- AN. 1065. ther évêque de Bamberg. Il étoit dans la fleur de fon âge, de fi belle taille & de fi bonne mine, qu'on s'eftimoit heureux de l'avoir vû. Quelquefois dans les logemens, la foule du peuple étoit fi grande, que les autres évêques l'obligcoient à fe montrer au dehors, pour les délivrer de cette importunité. Il étoit trésriche, aïant un trés-grand patrimoine outre le revenu de fon évêché. Mais il avoit des qualitez bien plus estimables : des mœurs trés-pures, beaucoup de modestie & d'humilité : il étoit éloquent, de bon confeil & bien inftruit des fciences divines & humai

nes.

:

Les pelerins furent donc attaquez le vendredi faint vingt-cinquiéme de Mars de l'année 1065. par des Arabes, qui avertis de leur venuë, s'étoient affemblez de toutes parts en armes pour les piller. Les pelerins qui avoient auffi des armes, voulurent d'abord fe défendre mais au premier choc ils furent renversez, chargez de bleffures & dépouillez de tout ce qu'ils avoient. Guillaume évêque d'Utrect demeura demi mort, nud & eftropié d'un bras. Les autres Chrétiens fe défendoient à coups de pierres, que le lieu fournifsoit abondamment, fongeant moins à se sauver qu'à differer leur mort. Toutefois ils fe retiroient peu à peu à un village qu'ils gagnerent enfin ; & les évêques occuperent une maison entourée d'une muraille tres-baffe & tres-foible. Les pelerins fe deffendirent fi bien dans ce village, qu'ils arrachoient aux ennemis leurs boucliers & leurs épées, & faifoient même des forties fur eux. Ce qui fit prendre aux Arabes la refolution de les affieger en forme, & de les prendre par

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famine, les harcelant toutefois continuellement, ce qui leur étoit facile étant environ douze mille.

Les Chrétiens foûtinrent leurs attaques le vendredi & le famedi faint, & le jour de Pâques jusques à neuf heures du matin, fans avoir un moment de relâche pour prendre du repos : car pour la nourriture ils n'y penfoient pas, ayant la mort devant les yeux, outre qu'ils manquoient de vivres. Comme leurs forces étoient épuifées, un des prêtres qui étoient entre eux s'écria, qu'ils avoient tort de tenter Dieu & de se confier en leurs armes que puifqu'il avoit permis qu'ils fuffent réduits à cette extremité, il falloit se rendre; d'autant plus que les Arabes n'en vouloient pas à leur vie, mais à leur argent. Ce confeil fut approuvé, & aufli - tôt ils demanderent par interprete à capituler.

Le chef des Arabes s'avança avec dix- fept des principaux, & entra dans l'enclos qui fervoit de camp aux Chrétiens, laiffant à la porte fon fils, pour empêcher les autres d'y entrer. Quand il fut monté à la chambre où l'archevêque de Maïence & l'évêque de Bamberg étoient enfermez, l'évêque le pria de prendre tout ce qu'ils avoient & les laiffer aller. Le barbare fier de fa victoire & irrité de leur refiftance dit, que ce n'étoit pas à eux à lui faire la loi, & qu'aprés leur avoir tout ôté, il prétendoit encore manger leur chair & boire leur fang; & auffi - tôt dénoüant son turban, il le mit autour du cou de l'évêque. Le prelat qui étoit grave, quoique jeune & vigoureux, ne pût fouffrir cette indignité, & lui donna un fi grand coup de poing dans le vifage, qu'il le jetta fur le careau : criant, qu'il falloit commencer par le punir de son im

pieté, d'avoir mis fa main profane fur un prêtre de AN. 1063 Jefus-Chrift. Les autres Chrétiens vinrent au secours, prirent ce chef & ceux qui l'avoient accompagné, & leur lierent les mains derriere le dos fi ferrées, que le fang fortoit par les ongles. Le combat recommence avec plus de violence que devant: mais les Chrétiens pour arrêter l'effort des Arabes, leur prefentoient leurs chefs liez, avec un homme l'épée à la main, prêt à leur couper la tête.

En cette extremité les Chrétiens apprirent qu'il leur venoit du fecours. Car quelques uns d'entre eux s'étoient fauvez à Ramla aprés le premier combat du vendredi, & fur leur avis le gouverneur de la place vint avec des troupes nombreuses pour délivrer les Chrétiens. Ils furent extremement furpris que des infideles les fecouruffent contre d'autres infideles : mais c'étoit apparemment des Turcs, qui depuis peu s'étoient rendus maîtres du païs. Si-tôt que les Arabes apprirent qu'ils marchoient contre eux, ils quitterent les Chrétiens & ne fongerent qu'à fe fauver euxmêmes, en fuïant chacun de leur côté. Le gouverneur de Ramla arriva, & s'étant fait representer les Arabes prifonniers, il fit aux Chrétiens de grands remerciemens, d'avoir fi bien combatu contre ces voleurs qui ravageoient impunément le païs depuis plufieurs années, & les fit garder pour les mener au roi fon maître. Ensuite aïant reçû des Chrétiens l'argent dont ils étoient convenus, il les mena chez lui, & leur donna une escorte pour les conduire jusques à Jerufalem.

Ils y furent reçûs par le patriarche Sophrone, qui Ingulf.p.904, étoit un vieillard venerable, & conduits en proceffion

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