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Tours, de Narbonne & de Milan, les évêques d'Italie, de Saxe & d'Aqui¬ taine. Les reglemens en étoient plus uniformes, mais le peu de refidence des évêques nuifoit à l'execution.

Ces affemblées étoient effentiellement parlemens, & conciles par oc cafion, pour profiter de la rencontre de tant d'évêques enfemble. Le principal objet étoit donc le temporel & les affaires d'état ; & les évêques ne pouvoient fe difpenfer d'y prendre part, étant convoquez pour cet effet comme les autres feigneurs. De-là vient ce mélange du temporel & du fpirituel fi pernicieux à la religion. J'ai rapporté en Hift. liv.xxxx.. leur tems les maximes des anciens fur la diftinction des deux puiflan- #. 45. ces ecclefiaftiques & feculieres entre autres la lettre de Synefius & le liv, 30. n. zła fameux paffage du pape Gelafe, tant de fois relevé dans la fuite. Vous avez vu que ces faints docteurs étoient perfuadez, qu'encore que les deux puiffances euffent été jointes, quelque fois avant la venuë de Jefus-Chrift, Dieu connoiflant la foibleffe humaine, les a depuis entierement feparées, & que comme les princes fouverains, bien qu'établis par l'ordre de Dieu, n'ont aucune part au facerdoce de la loi nouvelle ainfi les évêques n'ont reçû de Jefus - Chrift aucun pouvoir fur les chofes temporelles. En forte qu'ils font entierement foumis aux princes à cet égard, comme pour le fpirituel; les princes font entierement foumis aux évêques. Voilà les maximes de la fainte antiquité , que nous voïons en leur entier au huitiéme fiecle dans la feconde lettre du pape Gregoire III. à Leon Ifaurien. Le pape Nicolas. I les alleguoit encore au fiecle fuivant, écrivant à l'empereur de C. P. Avant Jefus Chrift, dit-il, il y avoit des rois qui étoient auffi prêtres, comme Melchifedec. Le diable l'a imité en la perfonne des em- Nic. ep. 8. to 8. conc. p. 324. B. pereurs païens qui étoient fouverains pontifes: mais aprés la venue de hift. 1. L. n. 419 celui qui eft veritablement roi & pontife, l'empereur ne s'eft plus attribué les droits du pontife, ni le pontife les droits de l'empereur. JefusChrist a feparé les deux puiffances: en forte que les empereurs Chrétiens euffent befoin des pontifes pour la vie éternelle, & que les pontifes fe ferviffent des loix des empereurs pour la vie & les affaires temporelles. Ainfi parloit le pape Nicolas, que perfonne n'accuse d'avoir negligé les droits de fon fiege.

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n. 9,

X.

Mais depuis que les évêques fe virent feigneurs & admis en part du vernement des états, ils crurent avoir, comme évêques, ce qu'ils n'avoient Confufion des que comme feigneurs : ils prétendirent juger les rois, non feulement dans deux puiffances le tribunal de la penitence, mais dans les conciles; & les rois, peu inftruits

de leurs droits, n'en disconvenoient pas : comme je l'ai rapporté, entre au- H‹ft.liv. XLIX! de Charles le Chauve & de Louis d'Outremer. La ceremonie du fa- n. 46. 11. 12. cre, introduite depuis le milieu du huitiéme fiecle, fervit encore de pre- Lv. n. 36. texte : les évêques en impofant la couronne, fembloient donner le roïaume

de la part de Dieu.

Dés auparavant je trouve un attentat notable fur la dignité royale, que je compte pour le premier. C'eft la dépofition de Vamba roi des

Vifigoths en Efpagne au douziéme concile de Tolede l'an 681. fous liv. XI. n. 291)

pretexte qu'on l'avoit mis en penitence & revêtu de l'habit monastique: liv,XLVII. 40, quoiqu'à fon infçû parce qu'une maladie lui avoit fait perdre connoiflance. Le fecond exemple celebre eft la penitence de Louis le debonaire, aprés laquelle les évêques qui la lui impoferent, pretendoient qu'il ne lui étoit plus permis de reprendre la dignité roïale. Saint Ambroife ne tira pas de telles confequences de la penitence de Theodofe. Dira-t-on que ce grand faint manquât de courage pour faire valoir l'autorité de l'églife: ou qu'il fût moins éclairé que les évêques Gots du feptiéme fiecle, & les François du neuvième?

fiv.xxiv.n.51.52. Le comte Boniface gouverneur d'Afrique, pouffé à bout par les enAug. ep.220. nemis qu'il avoit à la cour, prit les armes pour fa fureté, & confulta faint Auguftin fon ami. Ce faint docteur lui donne des avis falutaires pour le reglement de fes mœurs & le bon ufage de fa puiffance: mais quant à la guerre qu'il avoit entreprise, il lui declare nettement, qu'il n'a point de confeil à lui donner, & qu'il ne veut point toucher cette matiere. C'eft qu'il favoit parfaitement les bornes de fes devoirs, & ne vouloit pas faire un pas au delà. Nos évêques bien plus hardis fe déclarerent contre Louis le debonaire pour fes enfans; & les animerent à cette guerre civile qui ruina l'empire François. Les pretextes fpecieux ne leur manquoient pas: Louis étoit un prince foible, gouverné par fa feconde femme, tout l'empire étoit en defordre: mais il falloit prévoir les confequences, & ne pas prétendre mettre en penitence un fouverain, comme un fimple moine.

Hift. liv. 11, n. 24. LII. n. I.

Les papes croïant avec raison, avoir autant & même plus d'autorité que les évêques, entreprirent bien-tôt de regler les differends entre les fouverains: non par voye de mediation & d'interceffion feulement, mais par autorité : ce qui en effet étoit difpofer des couronnes. C'est ainfi qu'Adrien II. deffendit à Charles le chauve de s'emparer du roïaume de Lothaire fon neveu, & trouva fort mauvais qu'il n'eût pas laiffé de s'en mettre en poffeffion. Mais vous avez vû avec quelle vigueur Hincmar répondit aux reproches de ce pape, lorfqu'il lui difoit 111.n.8.Hinem. fous le nom des feigneurs François, que la conquête des roïaumes de •pusc. 41. ce monde fe fait par la guerre & par les victoires, & non par les excommunications du pape & des évêques. Et enfuite: Priez le pape de confiderer, qu'il ne peut être tout ensemble roi & évêque : que ces prédeceffeurs ont reglé l'églife & non pas l'état. Et encore: Il ne convient point à un évêque d'excommunier, pour ôter ou donner à quelqu'un un roïaume temporel ; & le pape ne nous perfuadera pas, que nous ne puiffions arriver au roïaume du ciel, qu'en recevant le roi qu'il nous voudra donner fur la terre.

Voilà jufques où font allez les inconveniens de cette alliance de l'epifcopat avec la feigneurie temporelle. On a crû dans ces tems moins éclairez, qu'être évêque & feigneur, valoit mieux qu'être évêque fimplement : mais on n'a pas confideré, que le feigneur nuit à l'évêque, comme nous ne voïons que trop encore à prefent en Allemagne & en Pologne, C'eft en ces rencontres qu'a lieu la fage maxime

d'Hefiode, que la moitié vaut mieux que le tout. Mais à quoi bon citer Hefiode quand nous avons l'autorité de Jesus-Christ même, qui nous enfeigne, que la vertu toute seule vaut mieux que la vertu avec les ri

chefles.

Conc. Claron.

Aurel. III. c. 3.

Dans cette confufion des deux puiffances, les feculiers empieterent auffi de leur côté. Souvent les feigneurs, fans la participation des évêques, mettoient des prêtres dans les églifes qui dependoient de leurs terres : & les rois dés la premiere race prétendoient difpofer des évêhift. 1.xxxII. chez, quoiqu'en même-tems dans les conciles tenus avec leur permiffion, 44. n.69, on recommandât la liberté des élections, dont la forme s'observoit toûjours. Le docte Florus diacre de l'églife de Lion, remarque fort bien, que fous l'empire Romain ni les empereurs, ni les magistrats, ne fe mêloient ordinairement de l'élection des évêques, non plus que de an. $35.c.I.conc. l'ordination des prêtres : c'eft que les évêques n'avoient point de puiffance temporelle, comme ils n'en ont jamais eû dans l'empire Grec. Mais dans les roïaumes formez du debris de l'empire d'Occident, les poft.gob. to. 20 évêques étoient, fi puiffans, qu'il étoit de l'interêt des rois de s'en af- P. 2540 furer: c'eft pourquoi dans les élections les plus canoniques, le con- hift. liv, XLVI, fentement du prince étoit neceffaire. Il ne faut pas en cette matiere pré- n. 47. tendre établir le droit fur les faits fouvent abufifs, mais fur les canons, les loix & les actes authentiques. Ce que j'ai dit des évêques doit s'entendre auffi des abbez à proportion. Quoiqu'ils fuffent titulaires & par confequent moines, ils fe trouverent feigneurs, à caufe des terres que poffedoient les monafteres: ils eurent des vaffaux & des troupes qu'ils menoient à la guerre : ils étoient fouvent à la cour, & étoient appellez aux confeils des rois & aux parlemens. On peut juger dans cette vie diffipée, combien il étoit difficile à ces abbez d'obferver leur regle; & non feulement à eux, mais aux moines dont ils menoient toûjours quelques-uns à leur fuite. Combien l'eur abfence caufoit de relâchement au monaftere & leur retour de diftraction. Ces abbez feigneurs aïant befoin d'être riches pour fournir à tant de voiages & d'autres depenses, fe fervoient de leur credit pour fe faire donner plufieurs abbaïes. & les gardoient fans fcrupule.

L'abus alla plus loin on donna des monafteres à des évêques & à des clercs, quoique n'étant point moines ils fuffent incapables d'être abbez: car les commendes n'ont été introduites que dans les derniers fiecles. Enfin les rois donnerent des abbaïes à des purs laïques, ou les prirent pour eux-mêmes, & cet abus dura publiquement depuis le huitiéme ficcle jufques au dixiéme. Des feigneurs, fans autre formalité que la conceffion du prince, alloient fe loger dans les monafteres avec leurs femmes & leurs enfans, leurs vaffaux & leurs domeftiques, leurs chevaux & leurs chiens : confumant la plus grande partie du revenu, & laissant le reste à quelque peu de moines qu'ils y fouffroient pour la forme, & qui fe relâchoient de plus en plus.

Le même abus regnoit en Orient, mais l'origine en avoit été plus hift liv. LEX. canonique. Les Iconoclaftes ennemis declarez de la profeffion monafti- n. 16:

XI.

Richeffe des

Eglifes,

Chrif. hom. 85.

in Matth.

Aug. fer. 355. $56. Pof. fid. vita 6. 24. hift. liv. XXII. n. 25. XXIV.n.39. 40,

que avoient ruiné la plupart des monafteres. Pour les rétablir, les empe reurs & les patriarches de C. P. chargerent des évêques ou des laïques puiffans d'en prendre foin; de conferver les revenus, retirer les biens alienez, reparer les bâtimens, raflembler les moines. On appella ces adminiftrateurs Charifticaires. Mais de protecteurs charitables ils devinrent bien-tôt des maîtres intereffez, qui traittoient les moines en efclaves, s'attribuant prefque tous les revenus, & transportant même à d'autres le droit qu'ils avoient fur les monafteres.

Voilà l'effet de la richeffe des églifes. C'eft dans tous les tems une tentation continuelle pour l'ambition des clercs & l'avarice des laïques : principalement quand le clergé ne s'attire pas par fa conduite l'amour & le refpect du peuple, quand il paroît lui être à charge, & ne lui pas rendre de fervice proportionné aux revenus dont il joüit. Il eft neceffaire qu'il y ait des fonds deftinez aux dépenfes communes de la religion Chrétienne, comme de toute autre focieté; à la subsistance des clercs occupez à la fervir, à la conftruction & l'entretien des bâtià la fourniture des ornemens & fur tout au foulagement des pauvres. Dés les premiers fiecles, fous les empereurs païens, l'église poffedoit des immeubles, outre les contributions volontaires, qui avoient été fon premier fond. Mais il eût été à fouhaiter, que les évêques euffent toûjours compté ces biens pour un embarras, comme faint Chrifoftome, & euffent été auffi refervez que faint Auguftin à en acquerir de nouveaux.

Nos évêques du neuviéme fiecle n'étoient pas fi defintereffez, comme nous voïons par les plaintes que l'on faifoit du tems de Charlemagne qu'ils perfuadoient aux perfonnes fimples de renoncer au monde, afin que l'églife profitât de leurs biens au préjudice des heritiers legitimes. Capit. 2. ann. Sans même emploïer de mauvais moïens, je vois des évêques reconnus pour faints trop occupez, ce me femble d'augmenter le temporel. La vie de faint Meinvere de Paderborn, fous l'empereur faint Henri, eft principalement remplie du dénombrement des terres qu'il acquit à fon hift.liv.xLv.n. églife.

BII.conc. Cabil. an. 813. c. 6.

FI.XLVI. n. So

:

Le trefor des églifes, je veux dire l'argenterie, les reliquaires & les autres meubles précieux, étoient les appas qui attiroient les infidelBoll.s.Jun.to.19. les à les piller comme les Normans en France, & les Sarrafins en Italie les terres & les feigneuries excitoient la cupidité des mauvais Chrétiens, foit pour les envahir à force ouverte, depuis la chûte de l'autorité roïale, foit pour les ufurper fous pretexte de fervir l'églife. De là vint la brigue & la fimonie, pour tenir lieu de vocation aux dignitez ecclefiaftiques. Mais c'eft auffi ce qui doit nous raffurer contre les fcandales que nous voions pendant le dixiéme ficcle, principalement à Rome. Le fils de Dieu promettant d'affifter fon églife jufques à la fin du monde, n'a point promis d'en défendre l'entrée aux mé chans au contraire, il a predit qu'elle en feroit toûjours mêlée jufques à la derniere feparation. Il n'a pas promis la fainteté à tous les miniftres & à tous les pafteurs de fon églife, non pas même à leur chef,

il à feulement promis des pouvoirs furnaturels à tous ceux qui entreroient dans le miniftere facré fuivant les formes qu'il a prefcrites. Ainfi comme de tout tems il s'eft trouvé des méchans, qui fans la converfion du cœur & les autres difpofitions neceflaires ont reçû le baptême & l'euchariftie: il s'en eft trouvé qui ont reçû fans vocation l'impofition des mains, & n'en ont pas moins été prêtres ou évêques : bien qu'ils l'aient été pour leur perte & fouvent pour celle de leur troupeau. En un mot Dieu ne s'eft point engagé à arrêter par des miracles les facrileges, non plus que les autres crimes. Il ne faut donc point faire difficulté de reconnoître pour papes legitimes ni Sergius III. ni Jean X. & Hift.liv. LIV. les autres, dont la vie fcandaleuse a deshonoré le faint fiege, pourvû qu'ils n. 42. 49, ayent été ordonnez dans les formes par des évêques : mais il faut convenir qu'il eût été plus avantageux à l'églife d'être toûjours pauvre, que d'être expofée à de tels fcandales.

XII, Corruptions

Ils furent auffi en partie caufez par l'ignorance, depuis qu'elle eut jetté de trop profondes racines. Aprés la chûte des études, les bonnes mœurs & les pratiques de vertu fubfifterent encore quelque tems, par des mœurs, la force de l'exemple & de l'éducation. On vivoit ainfi à Rome, fous le pape Agathon, vers la fin du feptiéme fiecle. Mais l'ignorance croiffant toûjours, on fe relâcha de ces faintes pratiques, dont on ne connoiffoit plus les raifons; & la corruption vint au point où vous l'avez vuë vers la fin du neuviéme fiecle, aprés Nicolas I. & Adrien II. enforte que pour relever l'églife Romaine, il fallut vers le milieu de l'onziéme ficcle y appeller des Allemans mieux inftruits, comme Gregoire X. & Leon IX. L'ignorance n'eft bonne à rien, & je ne fçay où fe trouve cette prétendue fimplicité qui conferve la vertu. Ce que je fçay, c'eft que dans les fiecles les plus tenebreux & chez les nations les plus groffieres, on voyoit regner les vices les plus abominables. J'en ai donné quelques preuves à l'occafion, mais je n'ai ofé les rapporter toutes, & je n'ofe même les marquer plus precifément. C'eft que la concupifcence eft en tous les hommes, & ne manque point de produire fes funeftes effets, fi elle n'eft retenue la raifon aidée de la grace. par Il ya un genre de crime, dont je ne trouve en ces fiecles des exemples que dans l'Orient. C'eft l'impieté & le mépris manifefte de la religion. Vous avez vû fans doute avec horreur les jeux facrileges du jeune empereur Michel fils de Theodora, qui fe promenoit par les ruës de C. P. avec les compagnons des fes débauches, revêtus des habits facrez contrefaifant les proceffions & les autres ceremonies de l'églife, même le redoutable facrifice. Photius alors patriarche le voyoit & le -fouffroit, comme il lui fut reproché au huitième concile : ce qui mon- liv. 15,#. 43. tre qu'il étoit encore plus impie que l'empereur. Car ce prince étoit un jeune fou, fouvent yvre, & toûjours emporté par fes paffions mais Photius agiffoit de fang froid, & par de profondes reflexions, c'étoit le plus grand efprit, & le plus favant homme de fon fiecle : c'étoit un parfait hypocrite, agiffant en fcelerat & parlant en faint. Il paroît l'auteur d'une autre efpece d'impieté, c'eft d'avoir pouffé la flatterie, jufques à canonifer

Hift. liv. XLIX. n. 17.

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