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queftion, parce que l'archevêque Raoul s'étoit déja AN. 1095. foûmis. Le huitiéme jour du concile l'archevêque de Lion se plaignit que l'archevêque de Sens n'avoit point encore voulu reconnoître la primatie, quoiqu'il l'en eût fait fommer par fes députez Aganon évêque d'Autun & Lambert d'Arras. C'eft pourquoi le pape du confentement de tout le concile, interdit à l'archevêque de Sens l'ufage du Pallium & l'obéïffance de ses luffragans, jusques à ce qu'il obéït luimême. Il prononça de même contre l'archevêque de Rouen qui étoit abfent, s'il ne fe foûmettoit dans trois mois. Quant à fes fuffragans qui étoient prefens, Odon de Baïeux, Giflebert d'Evreux & Serlon de Sées, ils reçurent avec soûmission le jugement du concile.

Le pape en fit donc expedier une bulle adreffée à Hugues archevêque de Lion, où il lui confirme à lui & à ses succesfeurs la primatie fur quatre provinces, fuivant le privilege donné à Gebuin par Gregoire VII. Les quatre provinces font celles de Lion, de Rouen, de Tours & de Sens; & les contrevenans font menacés d'excommunication. A ce jugement affifterent douze archevêques; c'est-à-dire, tous ceux qui étoient au concile, hors celui de Sens: quatrevingt évêques & plus de quatre-vingt-dix abbés. La date eft du premier de Decembre 1095. La resistance particuliere de l'archevêque de Sens pouvoit être fondée fur ce qu'il fe prétendoit lui-même primat, en vertu du privilege accordé à Anfgife fon prédecef- sup. liv LII feur par le pape Jean VIII. outre qu'il fe trouvoit alors fous une autre domination que l'archevêque de Lion, foumis à l'empire à cause du roïaume de Bour

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2. 33.

AN. 1095. gogne. Et cette raison lui étoit commune avec l'archevêque de Rouen fujet du roi d'Angleterre. L'archevêque de Tours fut plus facile, peut être dans lesperance de recouvrer fa jurisdiction fur les évêques de Marienne coll Bretagne. En effet, il l'obtint au concile de Clermont,

7.72.

Conc. p.472. S. .

Miffel. p. 282.

& Guillaume évêque de Poitiers qui y affistoit, en donna depuis une atteftation, où il dit: que Raoul archevêque de Tours avoit proposé sa demande contre l'archevêque de Dol, & que le pape aïant attentivement confideré la demande & les réponses, avoit condamné l'archevêque de Dol à être foûmis à l'archevêque de Tours, & lui faire fatisfaction pour la défobéiffance paffée.

Vers la fin du concile, c'est-à dire, le vingt-huitié. me de Novembre 1095. le pape fit lire publiquement la bulle du rétabliffement de l'églife d'Arras; & à cette féance affiftoient quatorze archevêques, deux. cens vingt-cinq évêques, & plus de quatre-vingt-dix abbés. La bulle fut approuvée & confirmée de tout le concile, où Lambert nouvel évêque d'Arras avoit pris féance, y étant nommément appellé par le pape. Mais Gaucher qui fe prétendoit évêque de Cambrai, fut dépolé de toute fonction d'évêque & de prêtre, avec menace d'anathême contre lui & fes fauteurs, Narrat Tornac, s'il occupoir davantage ce fiege, parce qu'il l'avoir 20.12. Spicil p. 4459 acheté à prix d'argent, & avoit reçû la croffe & l'anneau de la main de l'empereur Henri. Le concile confirma l'élection de Manaffés archidiacre de Reims, & ordonna qu'il feroit facré évêque de Cambrai: ce que Gaucher avoit empêché jufques-là par l'autorité de l'empereur. Toutefois Gaucher fe foûtint après le concile par la même protection, & le chifme de l'é

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AN. 1095.

XXX'. Voïage de Pierre l'ermite.

Muf. Ital. p. 131.

De tous les actes du concile de Clermont le plus fameux, & celui dont les fuites furent plus importantes, Yeme eft la publication de la croisade, dont l'occasion fut Hift bell. fac. telle. Il y avoit en France un ermite nommé Pierre du diocefe d'Amiens, homme d'une grande vertu & vivant dans une extrême pauvreté. Il étoit de petite taille, avoit le visage maigre, l'exterieur negligé`: alloit nuds pieds, couvert d'une méchante chape, & n'ufoit d'autre monture que d'un âne. Il alla par devotion à Jerusalem vifiter le faint Sepulcre, & fut fenfiblement touché de voir les lieux faints fous la domination des infideles: la place du temple occupée par leur mosquée, & des écuries joignant l'église du faint Sepulcre. Comme il étoit homme industrieux, il s'enquit de fon hôte qui étoit Chrétien, non-feule- Guill. Tyr. lib. ment de leur mifere prefente, mais de ce que foufroient leurs ancêtres depuis plufieurs fiecles; & pendant un affez grand féjour qu'il fit dans la ville, il vifita les églifes, & reconnut par lui-même l'état des choles.

Comme il apprit que le patriarche Simeon étoit un homme vertueux & craignant Dieu, il l'alla voir & entra en conference avec lui par interprete. Le patriarche reconnoiffant que ce pelerin étoit homme fenfé, de grande experience & perfuafif, s'ouvrit à lui; & volant qu'il ne pouvoit retenir les larmes & demandoit s'il n'y avoit point de remede à tant de maux, il lui dit: Nos pechez empêchent que Dieu n'exauce nos prieres, ils ne font pas encore affez pu nis mais nous aurions quelque efperance, fi vôtre peuple qui fert. Dieu fincerement, & dont les forces

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C. 11.

A N. 1095.

font encore entieres & formidables à nos ennemis, vouloit venir à nôtre fecours, ou du moins prier JESUS-CHRIST pour nous. Car nous n'attendons plus rien des Grecs, quoi qu'ils foient plus proches de nous, & par les lieux & par la liaison du fang, & que leurs richeffes foient plus grandes. A peine peuvent-ils fe défendre eux-mêmes, toute leur force eft tombée, & vous pouvez avoir appris, que depuis peu d'années ils ont perdu plus de la moitié de leur enpire.

Pierre répondit: Sachés, faint pere, que fi l'église Romaine & les princes d'Occident étoient inftruits de la perfecution que vous fouffrez, par une personne exacte & digne de foi, ils essaïeroient au plûtôt d'y apporter remede. Ecrivés donc au pape & aux princes des lettres étendues & fcellées de vôtre fceau: je m'offre d'en être le porteur, & d'aller par tout avec l'aide de Dieu, folliciter vôtre fecours. Ce difcours plût extrêmément au patriarche & aux Chrétiens qui étoient préfens; & aprés avoir rendu à Pierre l'ermite de grandes actions de graces, ils lui donnerent les lettres qu'il demandoit. Quelque tems aprés, comme il prioit dans l'églife du faint Sepulcre pour le fuccès de fon voïage, il s'endormit & vit en songe Jesus-Christ, qui lui difoit: Leve- toi, Pierre, hâte - toi d'executer ta commiffion fans rien craindre: car je ferai avec toi. Il eft tems que les lieux faints foient purifiés, & mes ferviteurs fecourus.

Pierre l'ermite encouragé par ce fonge, prit congé du patriarche, s'embarqua, arriva en Poüille à Bari: vint à Rome, rendit au pape les lettres du patriarche & des Chrétiens de Jerufalem, & s'acquitta fide

lement de fa commiffion. Il fut tres-bien reçu du AN. 1095. pape, qui lui promit de s'emploïer ferieufement pour cette affaire, quand il en trouveroit l'occafion Cependant Pierre l'ermite, pouffé par fon zele, parcourut toute l'Italie, paffa les Alpes & alla trouver l'un après l'autre tous les princes d'Occident: les. follicitant & les preffant pour le fecours des Chrétiens d'Orient & la délivrance des lieux faints, & il en perfuada quelques-uns. Non content de parler aux grands, il exhortoit auffi les peuples à cette même œuvre ; & avec un tel talent, que c'étoit prefque toujours avec fruit. Auffi il fervit comme de precurfeur au pape avant qu'il paffa les monts, & difpofá les efprits à recevoir fes exhortations.

il

XXXII.

Croisade pu

Cap. 15.

Le pape donc aïant reglé les affaires ecclefiafti-. ques au concile de Clermont, fit un fermon, où il blice. difoit en substance: Vous favés, mes freres, que le: Sauveur du monde a honoré par fa prefence la terre qu'il avoit promife aux anciens peres, qu'il l'a nommée fon heritage & la particulierement cherie; & bien qu'à caufe des pechez de fes habitans il l'ait livrée pour un tems entre les mains des infideles, ne faut pas croire qu'il l'ait rejettée. Depuis longues années, la nation impie des Sarrafins tient les faints lieux fous une dure tyrannie. Ils ont réduit les fi deles en fervitude, & les accablent de tributs & d'avanies. Ils enlevent leurs enfans, les contraignent d'apoftafier, & s'ils le refufent, ils les font mourir. Le temple de Dieu eft devenu le fiege des demons, l'églife du faint fepulcre eft fouillée de leurs impuretez, les autres lieux faints font devenus des étables & des écuries. Ils n'ont pas plus d'égard aux per

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