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doit, tant en confideration de fa dignité, que de la
peine qu'il avoit prife de faire un fi long voïage; & il
lui promit d'ériger un archevêché dans fon roïaume.
Quelques années aprés, Eric aïant tué
par accident
quatre de fes chevaliers, fit vœu d'aller à Jerufalem
pour l'expiation de ce crime. Son peuple l'aimoit à
tel point, qu'il offrit la troifiéme partie de fon bien
pour le faire difpenfer de ce voïage: mais le roi de-
meura ferme, & avant que de partir, il envoïa à
Rome foliciter pendant son absence, l'érection de la
métropole. Eric mourut en ce voïage, dans l'isle de
Chipre en 1101. & deux ans aprés, fous le roi Nicolas
fon frere & le pape Pascal II. l'érection fut executée.
pape envoïa un legat: qui aïant vifité les princi-
pales villes de Danemarc, choifit celle de Lunden qui
en étoit alors la capitale, pour lui donner la dignité de
métropole: tant à cause du merite d'Afcer ou Atzer,
qui en étoit évêque, que pour la fituation avantageuse
de la ville, qui étant prés l'embouchure d'une riviere
dans le schonen, donnoit aux païs voisins un facile
accés par terre & par mer. Lunden fut donc érigée en
archevêché l'an 1103. & non feulement tirée de la dé-
pendance de Hambourg; mais encore donnée pour
métropole aux trois roiaumes de Danemarc, de Sue-
de & Norvege.

Le

AN. 1098.

LVIII. Prife d'Antio

En Orient le fiege d'Antioche dura fept mois, aprés lefquels elle fut prife par intelligence. Comme che. il n'y avoit que quatorze ans que les Turcs l'avoient conquise, elle étoit encore pleine de Chrétiens, Grecs, Guill. V. 4. 15. Syriens & Armeniens: mais les Turcs ne leur permettoient point l'ufage des armes, ne leur laiffant que le trafic & les métiers. Un de ces chrétiens, mais rené

Nnnn iij

12.

C. 13.17

AN. 1098. gat, nommé Emir-Feïr ou Pir, fit connoissance avec Boëmond & promit de lui livrer une tour dont il étoit le maître, pourvû qu'il fut affuré que les autres feigneurs laissassent à Boëmond la proprieté de la ville. Boëmond leur en aïant fait la propofition, ils s'y ac corderent, excepté le comte de Toulouze. Enfin, le projet s'executa, la tour fut livrée, les croifez entrerent dans la ville d'Antioche, & s'en rendirent maîtres le jeudi troifieme de Juin 1098.

C. 21 22.

Lib. VI c. 7.

C. 10.

c.13.

C. 14.

Mais les Turcs tenoient encore le château, & trois jours aprés arriva une armée immense qui venoit à leur fecours : enforte que celle des croisez se trouva affiegée dans la ville, & comme ils n'avoient pas eu le tems d'y faire entrer des vivres, ils furent aflamez jusques à manger les chevaux & les chameaux. Alors Etienne comte de Chartres, quitta l'armée & repassa en Grece, où il arrêta l'empereur Alexis qui venoit au fecours des croisez, l'affurant qu'il n'y feroit pas à tems. Ce que les infidelles aïant appris, ils prefferent davantage les croisez & les reduifirent au desespoir: enforte que les refusoient d'obéïr, & les feigneurs fongeoient à prendre la fuite.

troupes

Il y avoit vingt-fix jours qu'il étoient ainsi assiegez, quand un clerc Provençal nommé Pierre Barthelemi vint trouver l'évêque du Pui & le comte de Toulouse; & leur dit, que l'apôtre faint André lui avoit apparu en fonge, & lui avoit commandé jufques à trois fois de dire aux feigneurs, que la lance dont nôtre feigneur avoit eu le côté percé, étoit enterrée dans l'église de saint Pierre; & lui avoit marqué le lieu où on la trouveroit. Il ajoûtoit, que s'étant voulu plufieurs fois excuser de cette commission, saint

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“André l'avoit menacé de mort s'il n'obéiffoit. L'évê- AN. 1098. que & le comte aïant communiqué fecretement la chofe aux autres feigneurs, leur prefenterent Pierre qui leur fit fon rapport, & les perfuada fi bien, qu'ils fe rendirent dans l'église; & aïant fait foüiller bien avant au lieu qu'il marqua, on y trouva la lance. Le peuple des croisez regarda cette découverte comme une confolation envoïée du ciel. Tous reprirent courage, & promirent par de nouveaux fermens, que fi Dieu le délivroit du peril prefent, ils ne fe fepareroient point qu'ils n'euffent pris Jerufalem & délivré le faint fepulcre. Ensuite ils firent un tel effort, qu'ils c.19 20. Úc. mirent les ennemis en fuite, & prirent leur camp, où ils firent un butin immenfe. Ils remporterent cette victoire le vingt-huitiéme de Juin 1098.

La ville d'Antioche étant ainfi délivrée & tranquile, l'évêque du pui & les autres prelats croisez, s'appliquerent à y retablir le fervice de Dieu. Premierement ils purifierent & reparerent la grande églife dediée à faint Pierre, & les autres que les infidelles avoient profanées & défigurées : car ils en avoient converti les unes en écuries, & appliqué les autres à d'autres usages indignes. Ils avoient effacé les faintes images, les couvrant de bouë, leur arrachant les yeux, gratant les murailles où elles étoient peintes. On prit d'entre le butin de l'or & de l'argent pour faire des calices, des croix, des chandeliers & d'autres pieces femblables, & des étofes de foïe pour les ornemens. On rétablit le clergé dans fes fonctions, avec des revenus fuffifans. Le patriarche Jean, qui depuis l'arrivée des croisez, avoit été mis aux fers par les infidelles & traité cruellement, fut rétabli dans son siege,

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c. 23,

A N. 1098. par quelle raison ou par quelle necessité Dieu s'est fait homme: & a rendu la vie au monde par fa mort, puifqu'il le pouvoit faire par un autre, foit un ange, foit un homme, ou par la feule volonté.

Anfelme avoit commencé cet ouvrage en Angleterre pendant le fort de fa perfecution; & l'acheva dans cette retraite. Il le divifa en deux livres, dont le premier contient les objections des infideles, avec les réponses; & laiffant à part Jefus - Christ, comme si jamais il n'en avoit été question, on y prouve par des raifons concluantes, qu'il eft impoffible qu'aucun homme foit fauvé fans lui; c'est-à-dire, fans un Dieu fait homme. Dans le fecond livre, on montre de même par raifonnement, que l'homme a été fait pour jouir quelque jour en corps & en ame, d'une immortalité bien-heureufe, mais qu'il ne peut y arriver que par un homme Dieu: d'où s'enfuit que tout ce que nous croïons de Jefus - Chrift, doit être necefsairement. C'est ainfi qu'Anfelme explique lui-même fon deffein. Les infideles dont il parle, devoient être les Juifs répandus alors par toute la Chrétienté & les Musulmans d'Espagne : car pour ceux d'Orient, le commerce n'étoit point encore établi avec eux, Cir, Becc. an. comme il fut depuis les croisades. Cet ouvrage est en forme de dialogue entre Anfelme & le moine Bofon, qui fut depuis abbé du Bec; & le myftere de la fatiffaction de Jefus - Chrift pour le genre humain y eft

1124.

616,

traité à fonds.

Dans le fecond livre, Boson propose cette quef tion: Comment Dieu a-t-il pris la nature humaine de la maffe corrompue du genre humain? Car bien que fa conception foit pure, la Vierge toutefois,

Turcs & les Païens, c'est à vous à vaincre les hereti- AN. 1098. ques, Grecs, Armeniens, Syriens & Jacobites; & venir nous conduire à Jerufalem. Ils fe plaignent enfuite, qu'il accorde à quelques croifez difpenfe de faire le voïage; & l'avertiffement, que l'empereur de C. P. ne leur a point tenu ce qu'il leur avoit promis. La lettre eft de l'onziéme de Septembre. Le pape fe contenta de leur envoïer un legat à la place du deffunt évêque du pui; & ce fut Daïbert archevêque de Pife.

Quelque tems aprés on révoqua en doute la verité de la fainte lance, que l'on prétendoit avoir été trouvée à Antioche; & plufieurs foutenoient, que c'étoit un artifice du comte de Toulouze & une invention intereffée. Le principal auteur de ce foupçon étoit Arnoul chapelain du duc de Normandie, homme lettré, mais corrompu dans ses mœurs & broüillon. Comme l'on difputoit beaucoup fur ce fujet, Pierre Barthelemi, qui prétendoit avoir eu la revelation, demanda à fe juftifier par l'épreuve du feu. On alluma donc un bucher terrible, & tout le peuple s'affembla à ce fpectacle le vendredi faint huitiéme d'Avril 1099. Pierre Barthelemi, quoique clerc, avoit peu de lettres & paroiffoit un homme fimple. Après avoir fait fa priere, il prit la fainte lance & paffa par le feu, d'où le peuple crut qu'il étoit forti fain & fauf. Mais il mourut peu de jours aprés: quoi qu'il fe portât trés-bien avant cette épreuve. Quelques-uns attribuoient la cause de sa mort à l'empreffement du peuple, qui s'étoit jetté fur lui en foule au fortir du bucher par devotion. Enfin cette épreuve fut inutile pour decider la question; & il Tome XIII.

Oooo

Bertold 1098

Guill,VII. c.8.

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